Ressemblance troublante
Chapitre 3 : Ressemblance troublante
Les portes fortifiées qui menaient à la cité étaient impressionnantes par leurs tailles, ainsi que par les ornements qui avaient été gravées dessus.
Les deux jeunes filles, qui ne les avaient vus que de rares fois, les franchirent avec un émoi qu’elles ne cachèrent pas.
Leurs yeux pétillants ne quittaient pas la voûte de pierre, tandis qu’elles avançaient en direction de la ville fortifiée.
À en juger par les décorations florales qui formaient une espèce de haie d’honneur et le monde présent dans les rues, Dalia se dit que la cité se préparait à accueillir un évènement spécial.
Anisha de son côté, était revenue à ses inquiétudes concernant leur père.
_ Tu as vu il y a des gardes partout, releva sa sœur en regardant avec curiosité les alentours. Tu penses que l’on verra un membre de la famille royale passer ? Imagine un peu ? J’aimerai tellement voir la future femme du prince Noram… À ce qu’on raconte, elle est magnifique…
La tête pleine de questions sur ce qu’elles allaient devenir, Anisha ne répondait que tardivement à Dalia.
Elle se contentait de redescendre sa capuche sur son visage, dès que celle-ci glissait un peu en arrière.
Son long manteau couvrant attirait l’attention, mais elle savait que sa physionomie le ferait bien plus, si elle la montrait.
Et il était de grande notoriété que les marchands d’êtres humains recherchaient les personnes atypiques pour les vendre à un meilleur prix.
_ Mira, serait la nièce de la femme du prince Sarod, continua Dalia qui s’intéressait grandement à la noblesse et à ses histoires incroyables. Noram, l’aurait vu lors d’un bal qu’aurait donné le roi d’Orburg à Targat et il aurait aussitôt fait une demande à son père. Ils vont se marier dès ce printemps…
_ Oui, fit sa sœur machinalement, sans avoir suivi.
_ Qu’est-ce que j’aimerais me transformer en souris pour assister aux festivités. Dis tu m’écoute ?
Dali s’impatienta en voyant que Ani continuait de marcher l’esprit dans le vague.
_ Tu as une crotte de chien collée à ta sandale et ton manteau en est tout badigeonné.
_ Oui, continua Ani toujours absorbée par ses pensées.
_ Ani ! Se rebiffa la jeune fille. J’ai l’impression de marcher au côté d’une somnambule !
_ Quoi ?
_ Laisse-tomber, tu es incorrigible.
Comprenant tardivement pourquoi sa sœur s’était emportée de la sorte, la jeune fille lui emboîta le pas.
_ Dali, attends ! Je suis désolée, se confondit-elle en excuses. C’est juste que…
_ … Juste que depuis que père t’a parlé, tu pars complètement en vrille...
Anisha restait interdite. Sa sœur avait entendu quelque chose ?
_ Ne fais pas cette tête, tu veux ? Fit-elle en marchant à reculons pour lui faire face. Ça fait une bonne semaine que son état décline franchement. Les choses sont évidentes, sauf pour toi…
_ Comment ça ?
Et alors qu’elle voulut lui donner une explication, elle trébucha sur une roue ferrailleuse, qui traînait à moitié sur le passage.
Dalia vacilla et tenta de reprendre son équilibre jusqu’à se retrouver sur la route. Au même instant, des soldats et un fiacre, arrivaient sur elle, au galop.
_ Dalia attention ! S’écria Anisha en tentant d’aller l’aider.
Le bruit des fers et des roues sur les pavés de pierres se fit plus fort et plus menaçant.
Tout comme lorsqu’elle plongeait en mer, Anisha retint son souffle et se jeta sur sa sœur pour la pousser hors de la route.
S’attendant à être piétinée à sa place par les sabots des chevaux lancés sur elle, elle se mit en boule et plaça ses mains au-dessus de sa tête pour se protéger.
_ Tu vas bouger du passage, la gueuse ?! Lui cria une voix impatiente.
Anisha releva la tête pour s’apercevoir qu’elle était toujours en un seul morceau.
Sa capuche était redescendue et une multitude de regards pesaient sur elle et des murmures commencèrent à s’élever au-dessus de la foule.
_ Si tu ne bouges pas immédiatement, je te mets aux arrêts, gronda le cavalier qui se tenait sur sa monture juste au-dessus d’elle et qui la dévisageait d’un air mauvais.
Malgré le choc qu’elle venait d’essuyer, la jeune fille se redressa sur ses jambes et s’écarta.
_ Je vous demande pardon, messir…, ce mot s’évanouit sur ses lèvres quand, à la fenêtre du fiacre, elle crut apercevoir Lori.
Cet homme était un peu plus vieux et très richement habillé, mais ses traits étaient identiques en tout point à ceux de son ami.
_ Lori ?! S’écria en joie Dalia, qui s’était postée derrière elle. Ani, regarde ! C’est Lori !
À ces mots, le jeune homme tourna la tête en leur direction, un regard étonné et d’une main vive, il tira sur le rideau de la fenêtre.
_ Eh, vous deux ! Les interpella de manière menaçante le chevalier en descendant de sa selle. On ne vous a jamais appris à baisser la tête devant un prince ?! Vous allez payer votre impertinence sur le champ !
Et alors qu’il allait dégainer son glaive, un homme jeune en habit moins nanti, sortit du fiacre et posa la main sur celle du cavalier.
_ Laisse-les partir pour cette fois. On est pressé et surtout, ces gamines n’ont pas l’air d’avoir toute leur tête.
_ Bien, acquiesça l’homme qui savait que cette intervention était en réalité un ordre. Vous avez entendu ? Déguerpissez avant que je ne change d’avis, dit-il aux deux sœurs qui semblaient encore sous le choc de la menace qui venait de peser sur elles.
Anisha baissa la tête en signe d’obéissance et tira sur le bras de sa sœur.
_ Mais Ani, il s’agit de Lori ! Protesta la jeune fille en montrant du doigt la porte où le valet venait de s’engouffrer.
_ Tu veux nous faire tuer, ou quoi ? Baisse cette main !
Tout en éloignant Dali, elle se tourna vers la diligence qui venait de reprendre sa route, encadrée par la garde royale.
Ce garçon ressemblait comme deux gouttes d’eau à Lori, songea-t-elle perdue.
À moins que ce ne soit vraiment lui…