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Chapitre 3

Je jette presque mon téléphone sur la table de travail tellement cet homme m’énerve. C’est déclaré, je ne réponds plus à ses appels, et il finira par se fatiguer, voilà !

Awa surprise par le bruit du métal sur le marbre me jette un regard inquiet.

Moi : Laisse tomber, c’est un con qui me met dans tous mes états.

Elle doit être étonnée, il est rare que je m’emporte ainsi devant elle.

Mais le temps n’est pas aux réflexions, Demba sera là sous peu, il me faut me changer rapidement.

Moi : Awa, s’il te plait nettoie vite la cuisine et mets y de l’encens avant de déposer l’encensoir dans les autres pièces. N’oublie pas de mettre l’encens sur du papier aluminium d’ abord pour que ca ne grille pas. Et...

Awa : Et ensuite j’ ouvre les fenêtres pour aérer juste après, puis j’ allume le « Brise » pour rafraichir les pièces, je sais.

Sa réponse me fait sourire. Elle a bien compris la leçon. Elle sait que lorsqu'on s’affaire si longtemps en cuisine pour préparer un gigot c’est Demba qui vient. Il est allergique à la fumée mais aime l’odeur de l’encens. C’est ainsi donc que je réponds à son goût si particulier.

Quand ce dernier a dit à sa femme qu’il était allergique à la fumée cette dernière a tout bonnement arrêté de lui brûler de l’encens.

Moi j’écoute tes besoins, tes exigences, et je trouve mes astuces pour les satisfaire.

Je laisse alors Awa dans la cuisine pour aller prendre ma douche. Je choisis ensuite une robe jade au décolleté vertigineux, des boucles pendants blanches accrochées à mes oreilles, un léger maquillage et me voilà prête. Au moment où je récupère mes mules dans la chambre d’ ami je croise Awa qui est prête à rentrer chez elle.

Moi : Humm, Awa, tu as été rapide hein ? Tu m’assures que tu as fini tout ce que tu avais à faire?

Elle rie à ma question avant de me répondre.

Awa : Bien sûr, j’ai fini.

Moi l’observant d’un regard faussement douteux : Ah bon ? Ok, d’ accord, demain tu ne viens pas, je ne serai pas là.

Awa : D’ accord, au revoir.

Je lui remets un billet de deux mille francs que j’attrape sur le buffet du salon avant de lui ouvrir la porte, elle me remercie toutes dents dehors.

Il arrivait souvent que je lui donne comme ca de petits billets pour l’aider un peu, je sais qu’elle a été engrossée par le mari de son ex patronne et que le Monsieur qui l’a engrossé n’a pas reconnu son enfant. Elle se retrouve alors à élever seule son enfant à Dakar dans une chambre qu’elle partage avec d’autres filles de son village.

Au moment où je me passe du parfum mon téléphone sonne, c’est ma copine Mariam.

Mariam : Allo ma puce à moi !

Moi : Hey, il n’ y a pas de puce ici. Dis à ton gars d’arrêter de m’appeler wala mou djot torokhalam (où il va recevoir son humiliation).

Mariam : Chii, toi aussi danga bari histoire torop (tu aimes trop les problèmes). Mais attends de le voir, tu vas changer d’avis. Tu vas tellement craquer que tu vas courir derrière lui pour qu’il t’épouse.

Moi riant : N’importe quoi. Mais toi tu es têtue quoi, moi je ne veux pas et ne compte pas me marier. Et je pèse bien mes mots.

Mariam se tait un moment, puis je l’entends soupirer, ca ne présage rien de bon.

Moi : Ca va chérie ?

Mariam : Hum, même si tu as vraiment tort, et que je reste convaincue que ce que tu fais actuellement n’est pas une vie comme je ne cesse de te le répéter, des fois je comprends que tu ne veuilles pas du tout te marier.

Ca par contre me surprend, Mariam qui est si amoureuse de son mari, ce n’est pas elle qui me dit ca. En plus ca fait à peine huit mois qu’elle est mariée.

Moi : Ah oui, et qu’est ce qui te fait dire ca ?

Je la sens un peu hésitante.

Mariam : C’est juste que Mika commence à m’ inquiéter là, il s’absente de plus en plus souvent depuis quelques temps, des fois il rentre très tard au milieu de la nuit. Et je ne peux poser aucune question, il devient très nerveux quand je tente d’en savoir plus. Là il vient de me dire qu’il ne sera pas là ni cette nuit ni toute la journée de demain et que je peux aller passer la journée chez mes parents. Sans me dire où il ira.

Quand je l’entends pleurer j’ai vraiment pitié d’elle.

J’ai envie de lui dire voilà où ca t’a mené de vouloir te marier si vite avec un homme rencontré juste deux mois avant. De lui dire que je l’avais prévenu, que tous les hommes sont pareils.

Mais je me retiens, elle est quand même mon amie et il me faut la soutenir.

Moi : Désolée chérie, mais peut être que tu ne devrais pas t’ inquiéter, peut être qu’il est toujours lié à des amis ou sa famille et sent le besoin de passer encore du temps avec eux. Il faut pour certains un peu de temps pour se faire à la vie de couple.

Aussi bizarre que cela puisse être, je n’ai jamais rencontré son mari. Elle et Mariam se sont connus lorsqu’il venait de s’installer à Dakar après une longue période d’expatriation dans un pays en Europe dont je n’ai pas retenu le nom. Je ne sais pourquoi et comment mais j’ai reçu la nouvelle de leur rencontre en même temps que la nouvelle de leur mariage religieux qui s’est fait dans la stricte intimité sans aucun invité.

D’ après ce que j’ai compris il s’emporte quand Mariam reçoit des amis, ou même sa famille chez eux. Le jour où je suis partie donner à Mariam le cadeau de mariage que je lui avais préparé il n’était pas chez eux, et Mariam s’est sentie soulagée.

Je lui avais dit que ce n’était pas normal qu’elle en arrive à cacher ses relations amicales à son mari, elle avait balayé mon idée de la main. Disant que Mika ne voulait juste pas être dérangé chez lui. Je n’ai donc pas jugé d’insister.

Entendre actuellement ses pleurs me fait vraiment mal. Mais ma réponse a réussi à la calmer un peu.

Mariam : Tu as surement raison. Peut être que je vais laisser passer un peu et voir où ca nous mène.

Moi : Oui, mais ne ferme pas aussi les yeux chérie. Calme toi mais observe tout. Je ne suis pas d’ accord quand tu dis je laisse passer et voir ou ca nous mène. Je ne veux pas que tu fasses dès conclusions hâtives alors qu’il ne fait rien de mal. Mais soit vigilante sans faire du bruit comme tu as des doutes là et ne te laisse pas avoir, d’ accord ?

Mariam : Je pense que tu as raison, je devrais le pendre ainsi. Tu sais que je t’adore ?

Moi : Moi aussi je t’adore.

Mariam riant: Mais je t’adorerai plus quand je te caserai enfin.

Moi : Et ca recommence, pour ca tu n’es pas prête d’ y arriver.

C’est la que j’entends la sonnerie de l’interphone.

Moi : Excuse moi puce il faut que je raccroche, j’ai de la visite.

Mariam : Comme d’ hab. Ok, et fais moi le compte rendu sur Karim après.

Moi : C’est ca oui, bye.

Je raccroche et me dirige vers la porte pour faire entrer Demba.

Compte rendu de Karim, tu rêves ! Comme si je vais accepter de le rencontrer ce gars qui m’a tout l’ air d’ un don juan doublé d’un gamin de célibataire.

Demba : Hey, ca va toi ?

Il me fait une bise sonore sur la joue.

Moi : Oui, et toi alors ? Entre.

Il fait comme chez lui, s’affale sur le canapé et se précipite pour zapper sur une chaine de football.

Profites en baby, ai je envie de lui dire pendant que je me dirige vers la cuisine pour lui servir à boire, c’est toi qui paies l’abonnement au bouquet, fais comme chez toi.

De retour dans la salon je lui sers à boire, mais il a l’ air particulièrement pas trop dans son assiette aujourd’hui, pas bavard, quelque chose ne marchait pas. Je me mets à côté de lui alors et lui caresse le dos avec ma main.

Moi : Tu ne sembles pas bien là toi aujourd’hui, tout va bien.

Demba : yep !

Moi : Juste ca ? ca ne va vraiment pas fort.

Il émit un long soupir, pose son verre de jus sur la table basse et s’adosse confortablement sur le canapé avant de me jeter un regard triste.

Demba : En ce moment ma femme devrait être à mes côtés. Je ne sais pas à quoi ce sert d’en avoir une si elle ne peut pas être avec moi.

Moi : Bah, tu as fait le choix de prendre une femme médecin aussi, il faut l’assumer ce choix.

Demba : Elle n’ est pas aux urgences en plein temps, elle devrait faire l’effort de s’occuper bien de moi dans ses heures perdues. Je ne me sens pas du tout marié.

Moi :...

Ben sur ca je n’ai pas de réponse. « Vous en avez vous ». Il me faut changer de sujet avant que la discussion ne dérape vers là où je ne veux pas qu’elle aille. Pendant que je me lève, il me retient le bras, je me tourne alors vers lui intriguée.

Moi : Oui ?

Demba : Ca ne te dit toujours pas de m’épouser?

Moi : Tu n’es pas fatigué avec ca ? Ou tu es sourd?

Cette fois je lui lance un regard tellement méchant qu’il me laisse partir. Une fois le dos tourné je ne peux m’empêcher de lui lancer un long tchiiiipppp !

Après avoir dégusté un bon gigot, il n’a même pas pris le temps de finir son dessert que je le vois s’assoupir, sa tête posée sur mes cuisses. Je la soulève doucement pour la poser sur le bras du canapé d’angle.

Je le regarde encore un fois, me demandant ce que je vais bien pouvoir faire de lui. Mais mon téléphone vibre au même moment, je regarde l’écran, puis me rend lentement au balcon, oui c’est lui.

Sur la pointe des pieds je me dirige vers ma chambre, attrape une veste, mon sac à main, mon trolley que j’ai minutieusement préparé ce matin avec tout ce qu’il faut, puis me dirige à pas de loup vers la porte de l’appartement sans faire le moindre bruit avant de la laisser claquer derrière moi.

Je remercie encore une fois mon menuiser qui m’a installé cette serrure à claquer. Demba n’aura juste qu’à tirer la porte derrière lui à son réveil pour que ca se verrouille automatiquement.

Je ne suis pas un baby Sitter quand même, je ne vais pas gâcher mon programme de la soirée pour rester là à attendre son réveil. Et ca me fera un repos biologique énorme « clin d’œil à une amie », je n’aurai pas à me faire deux hommes dans la soirée.

Oui, j’ai un autre programme prévu pour cette fin de la soirée. Je descends rapidement les escaliers et le retrouve en bas, une cigarette dans la bouche. Dès que je mets sur le siège passager il me jette sa fumée sur le visage en clignant les yeux.

Moi : Tu es très incorrect. Ca ne ce fait pas ca.

Mika : Calm down toi, Si ma femme me disait ca j’allais la tuer.

Moi : Si j’étais ta femme, j’allais te casser la gueule.

Il me regarde un instant silencieusement, puis sourit.

Mika : Oui, tu as tout de différent. C’est pour ca que je préfère passer ce fin de weekend end avec toi.

Moi : Blablabla, démarre ou je retourne chez moi.

Il démarre en secouant la tête, je sors mon téléphone et envoie un texto à Demba pour lui dire que je suis sortie en urgence. Me voir tapoter à l’air d’énerver un peu Mika car je le vois s’agripper au volant

Mika : Tu envoies un message à qui ?

Moi : Est ce que ca te regarde ?

Mika : Ecoute, ca ne me regarde pas, mais je veux juste que tu sois complètement avec moi quand on est ensemble. C’est trop demander?

Je vais l’avoir avec moi jusqu’à demain soir, autant jouer le jeu. Mais quelque chose ne me plait pas en lui et c’est toujours comme ca, on s’engueule à mourir. Ses airs autoritaires m’énervent. Il est vraiment du genre à bastonner sa femme ce gars. J’ai plusieurs fois voulu me débarrasser de lui mais c’est lui qui paie mon loyer depuis que je le connais, sept mois déjà. Dès que quelqu’un d’autre me propose de le faire je le balance.

Je range alors mon téléphone dans mon sac à main et tente de me calmer.

Moi : On va où ?

Mika : A Somone (station balnéaire sur la petite côte).

Moi : Oh Non ! Aussi loin ? Mais ta femme a voyagé ou quoi ?

Je ne sais pas, mais j’aime en savoir toujours plus sur leur deuxième vie avec leurs épouses, j’apprends beaucoup avec eux.

Mika : Si elle est là.

Moi : Ah bon ? Et comment tu as fait pour la laisser un week end ?

Mika : Rien, je lui ai juste dit que je ne serai pas chez nous jusqu’à demain après midi.

Moi : C’est tout ? Et elle ne t’a pas fait une crise ?

Mika : Non, elle n’a même pas osé me poser la question. J’ai dompté ma femme moi, elle ne m’ échappe pas comme toi qui ose tout me dire.

Moi : Pfffff

Heureusement que je ne suis pas ta femme, pense je.

Je me concentre alors sur la route, ruminant tout ce qu’il vient de me dire. Tentant d’imaginer ce que sa femme doit ressentir en ce moment même...Mon cœur se met à battre un peu plus vite que d’ habitude.

À suivre.

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