CHAPITRE 5
Je ne savais plus ce qui s’était passé par la suite que lorsque j’ai fini par ouvrir les yeux dans un centre de santé. Quand je repris connaissance, je découvris des plaies presque partout sur mon pauvre corps.
Si seulement je pouvais mourir pour me réincarner dans une autre famille, ça me ferait beaucoup plaisir.
Les soins durèrent environ quarante-huit heures. Deux jours après mes traitements, je fus conduite à l’école par ma maman. Elle était une douanière qui, après trente-trois ans de service, était admise à sa retraite.
Maman et moi nous rendîmes dans mon collège qui était situé dans un coin de la ville de Porto-Novo. Une fois arrivée dans le grand complexe scolaire, elle et moi nous dirigeâmes vers un bâtiment au chevet duquel était écrit en grand caractère, ADMINISTRATION. Nous allâmes ensuite directement en face du bureau du surveillant et nous nous arrêtâmes.
Ma mère clapota les paumes de la main. Quelques instants plutôt, vint à notre rencontre le surveillant.
– Bonjour monsieur, commença ma mère.
– Oui bonjour madame, que puis-je pour vous ?
– C’est ma fille qui est venue nous faire part de sa suspension des cours.
– Grâce est votre fille ?
– Oui, monsieur !
– Et pourquoi vous n’êtes pas venue écouter ce qu’elle a fait depuis que nous l’avions renvoyée ?
– Au fait, c’est une fille très têtue et très capricieuse. Son père et moi, l’ayant vue ce jour où vous l’aviez renvoyée, on avait deviné qu’elle avait déjà commis encore une grave erreur. C’est alors que quand nous l’avions interrogée, nos intentions s’étaient avérées vraies. Comme nous lui avions demandé ce qu’elle a pu faire pour être suspendue des cours et qu’elle nous l’avait certifié, son père et moi nous sommes jetés sur elle et l’avions frappée au point où elle est tombée évanouie et nous l’avions admise à l’hôpital. Ce sont les traitements qui ont coûté des jours, voilà pourquoi nous ne sommes pas venus à temps.
Ma mère n’avait même pas honte. Elle parlait sans vergogne aucune.
– Puis-je connaître la raison pour laquelle vous l’aviez tous les deux frappée jusqu’au point où elle se soit retrouvée dans un centre de santé ? répartit l’homme.
– C’est à cause de ce qu’elle a fait en classe.
– Que savez-vous qu’elle ait pu faire, madame ?
Ma mère demeura silencieuse.
– Non mais répondez-moi ! Vous savez, madame, évitez ces comportements à l’égard de vos enfants. C’est nous les membres de l’administration qui l’avions renvoyée et lui avions demandé d’aller appeler ses parents. La première des choses qu’il fallait faire, c’est de venir entendre le motif avant de lui appliquer n’importe quelle correction. Je n’ai pas du tout digéré ni apprécié votre réaction vis-à-vis de la fille. Regardez le front de la fille avec des blessures un peu partout ; regardez ses pieds ; regardez son bras gauche ! C’est quoi tout ça là ? Et c’est ça vous appelez éducation ? Cette réaction, c’est de la méchanceté pure. Laissez les enfants en paix.
Le surveillant exprima son mécontentement pendant une dizaine de minutes et sans plus chercher l’avis de ma mère, me fit un papier et m’ordonna à regagner la classe. Je pris le papier et disparus des lieux en laissant dans mon dos, ma mère et le surveillant.
À mon arrivée en classe, j’aperçus Vanessa à sa place habituelle recopiant les cours d’anglais. Tous mes condisciples se mirent à me regarder comme si j’étais une nouvelle élève.
***
Nous étions en mois d’avril. Ce quatrième mois de l’année était celui dans lequel on programmait les derniers devoirs surveillés.
Bientôt, le mois de mai.
En début mai, nous fûmes soumis à de différentes épreuves de test. Nous composâmes selon les critères requis. Au départ, ce furent les élèves des classes de la troisième, seconde, première et terminale qui composèrent dans la même période. Ensuite, vint le tour des élèves de la sixième, cinquième et de la quatrième.
Je faisais partie du deuxième lot. Bruno, quant à lui, était du premier.
Quelques semaines après les compositions, c’était le calcul des moyennes. Les résultats de ces calculs étaient ensuite reportés dans de gros cahiers appelés cahiers de notes.
Au cours de cette période, une grande joie m’avait égayée car, j’avais obtenu une meilleure moyenne comme d’habitude ; cette moyenne allait me permettre à faire la troisième l’année qui allait suivre. Quelques minutes plutôt, on calcula celle de Vanessa aussi. Elle avait, grâce à son travail acharné, obtenu sa moyenne. La quatrième était difficile disaient nos amis mais ma copine et moi eûmes la chance de nous en sortir les mains légères. Ma joie était grandissime du fait que Vanessa ait aussi obtenu la moyenne bien qu’elle et moi n’étions pas de bonne entente.
Et puisque j’étais comblée de joie et qu’on allait en vacances, je me levai de ma place et me dirigeai vers ma camarade qui, depuis notre dispute, avait changé de place pour éviter mes propos chiants. Je l’attrapai par la taille et l’embrassai.
– Vanessa, toutes mes félicitations ! lui murmurai-je, toute joyeuse.
Ma copine, aussi simple qu’elle a toujours été, me fixa droit dans les yeux, me sourit et me répondit :
– Merci ! Félicitations à toi également !
– Merci ma chérie ! S’il te plaît Vanessa, pour l’amour de Dieu, laissons passer nos rancunes et remettons-nous ensemble ! Redevenons telles que nous étions au départ.
– Intéressant ! Si tu y tiens, alors j’en suis ravie !
– Merci ma chérie ! Je crois que l’année prochaine, Bruno nous aidera à voir un peu plus clair dans les matières les plus difficiles de la classe de troisième.
– Oui, je crois que c’est une belle idée ! Mais il faut qu’il ait d’abord le temps !
– Il ne peut pas en manquer, encore que c’est toi et moi !
– Tu as peut-être raison !
Les calculs de moyenne durèrent quelques heures.
Au lendemain des calculs, nous qui fûmes élèves des classes intermédiaires prîmes les grandes vacances. Les élèves des classes des examens commencèrent quant à eux, leurs séances de bachotages, la séance des grandes révisions.
***
Un mois venait de passer de nos trois mois de vacances. Nous étions dans la période des cours de renforcement communément appelés, cours de vacances. Pendant cette période, je n’allais nulle part. Les cours de renforcement étaient destinés aux fainéants. Et puisque mes parents me savaient studieuse, ils ne m’inscrivirent point à ce cours.
Puisqu’il n’était pas de l’habitude de mes parents de nous laisser aller en vacances, j’étais tout le temps à la maison. J’allais quelquefois au marché avec ma méchante grande sœur qui m’enviait à chaque seconde. J’avais parfois l’envie de voir Bruno et lui dire quelque chose mais aucune opportunité ne se présentait.
Durant toutes les vacances, je n’avais eu aucune nouvelle de Bruno. Je me demandais s’il avait pu décrocher son brevet d’étude. Parfois, je m’inquiétais de son absence. J’avais envie de lui dire combien j’aimais le voir et combien son amour m’obsédait.