Chapitre 6
Les premières lueurs de l’aube filtraient à travers la petite fenêtre de la cabane, réveillant Luna en douceur. La nuit avait été paisible, une véritable bénédiction pour elle après des années passées dans l’angoisse et l’insécurité. Elle s’étira lentement, savourant cette sensation de tranquillité qui imprégnait l’air.
Mais alors que la journée commençait, un mélange de nervosité et d’excitation envahit son esprit. Aujourd’hui marquait son premier jour dans cette meute inconnue, et même si Lucian lui avait offert une chance, elle n’avait aucune idée de la manière dont les autres allaient la recevoir. Après tout, elle n’était pour eux qu’une étrangère silencieuse, une présence inattendue qui pouvait susciter la méfiance ou, pire, le rejet.
Elle inspira profondément, fermant les yeux pour calmer les battements de son cœur. *Nox, tu penses que ça va bien se passer ?*
*Nous sommes plus forts que ce que nous pensons, Luna,* répondit son loup avec une douceur qu’elle trouvait rassurante. *Montre-leur qui tu es, sans crainte. Les vrais loups reconnaîtront ta valeur.*
Elle acquiesça intérieurement, serrant les poings pour se donner du courage. En sortant de la cabane, elle découvrit le camp de la meute sous la lumière du matin : de modestes habitations dispersées au milieu des arbres, des chemins de terre battue, et des membres de la meute occupés à diverses tâches. Un sentiment d’appartenance, d’harmonie avec la nature, flottait dans l’air.
« Tu dois être Luna. »
Une voix douce et chaleureuse la sortit de ses pensées. Elle se tourna et vit une jeune femme aux cheveux blonds et aux yeux d’un vert profond, un sourire accueillant étirant ses lèvres. L’inconnue se tenait à quelques pas d’elle, les bras croisés sur la poitrine, et Luna sentit immédiatement une aura rassurante émanant de cette femme.
« Je m’appelle Elena, » se présenta-t-elle avec un sourire radieux. « Lucian m’a dit que tu rejoindrais notre groupe. Bienvenue. »
Luna hocha la tête en signe de salut, un sourire timide naissant sur son visage. La chaleur dans les yeux d’Elena la mit instantanément à l’aise. Cette femme semblait sincère, loin de la froideur ou de la méfiance auxquelles elle s’était préparée.
Elena fit un signe de la main en direction d’un banc de bois à l’ombre d’un arbre imposant. « Viens, asseyons-nous un moment. Je suis sûre que tu as des questions, et je peux peut-être y répondre. »
Luna la suivit en silence, prenant place à côté d’elle. Elena l’observa un instant, ses yeux pétillants de curiosité, mais aussi de bienveillance.
« Je sais que tu ne parles pas, » dit-elle doucement. « Lucian m’a expliqué. Je veux que tu saches que ça ne change rien pour moi. Tu pourras t’exprimer de la manière qui te convient le mieux. »
Luna sentit un poids se dissiper légèrement de ses épaules. Elle n’était pas habituée à une telle compréhension. Elle leva une main et dessina dans l’air un petit cercle de gratitude, un geste que sa mère lui avait appris lorsqu’elle était enfant, et qui, dans sa culture, signifiait « merci. »
Elena sourit de plus belle. « Merci à toi aussi, Luna. Je pense qu’on va bien s’entendre. »
Mais alors qu’elles continuaient leur échange silencieux, une silhouette massive s’approcha d’elles, et l’atmosphère sembla se tendre. C’était un homme imposant, aux cheveux sombres et aux muscles saillants, un air farouche sur le visage. Son regard était fixé sur Luna avec une intensité qui frôlait la méfiance.
« Alors, c’est elle, la nouvelle venue ? » lança-t-il d’une voix rauque, presque dédaigneuse. « Lucian a vraiment décidé de nous imposer une étrangère muette ? »
Elena fronça les sourcils, un léger agacement marquant son visage. « Darius, tu pourrais au moins lui souhaiter la bienvenue. »
Darius haussa un sourcil, puis se tourna de nouveau vers Luna, ses bras croisés. « Je suis peut-être direct, mais je n’aime pas qu’on intègre des inconnus dans notre meute, encore moins ceux qui ne peuvent pas se défendre. »
Luna sentit ses joues chauffer sous le regard dur de Darius. Ce dernier ne faisait rien pour dissimuler sa méfiance, et elle comprenait qu’il n’allait pas facilement lui accorder sa confiance. Nox grondait en elle, réagissant instinctivement à l’attitude hostile de cet homme. Elle posa une main sur sa poitrine, cherchant à apaiser son loup.
Elena intervint, posant une main rassurante sur l’épaule de Luna. « Ne l’écoute pas, Darius est toujours sceptique avec les nouveaux. Il finit par changer d’avis avec le temps. »
Darius renifla avec mépris, mais il ne répliqua pas. Au lieu de cela, il se contenta de jeter un dernier regard sombre à Luna avant de tourner les talons et de s’éloigner. Luna le suivit du regard, se sentant à la fois frustrée et légèrement découragée. Ce n’était qu’un début, et elle savait que gagner la confiance de chacun allait être un défi bien plus grand qu’elle ne l’avait imaginé.
Elena poussa un soupir et serra gentiment l’épaule de Luna. « Ne te laisse pas affecter par Darius. Il a un bon fond, même s’il est difficile à percer. Je suis certaine qu’il finira par t’accepter, mais il a besoin de temps. »
Luna hocha la tête, reconnaissante pour le soutien d’Elena. Cette femme représentait un souffle d’air frais dans ce nouvel environnement, une main tendue alors que tout lui semblait encore étranger.
Au fil des jours, elle s’habitua à la routine de la meute, se familiarisant avec les visages et les rôles de chacun. Elle observait Lucian de loin, cet Alpha au charisme indéniable, qui semblait toujours la surveiller d’un coin de l’œil. Il ne la forçait jamais à parler de son passé ou à révéler plus qu’elle ne voulait, mais elle pouvait sentir son intérêt grandissant, comme une chaleur invisible qui l’enveloppait chaque fois qu’il était près d’elle.
Une après-midi, alors qu’elle aidait Elena à trier des herbes pour la guérison, Lucian fit son apparition, l’air grave mais bienveillant. Il s’approcha d’elles et salua Elena d’un hochement de tête avant de poser son regard sur Luna.
« Comment trouves-tu la vie parmi nous, Luna ? » demanda-t-il d’une voix douce, mais pleine d’autorité.
Elle hésita, puis esquissa un sourire timide, posant une main sur son cœur et levant le pouce en signe de satisfaction. La paix qui émanait de cet endroit, la sécurité qu’elle ressentait, étaient bien au-delà de ce qu’elle avait espéré.
Lucian lui rendit son sourire, appréciant sa tentative d’exprimer ses sentiments malgré son silence. « Je suis heureux de l’apprendre. Mais sache que si quelque chose te trouble, je suis là pour écouter… enfin, je trouverai toujours un moyen de comprendre. »
Elena l’observait avec amusement, notant l’attention particulière que Lucian portait à Luna. « Tu vois, Luna, notre Alpha est peut-être strict, mais il a un cœur d’or. Même s’il essaie de le cacher. »
Lucian leva les yeux au ciel, l’air faussement exaspéré. « Ne va pas lui donner de mauvaises idées, Elena. » Mais son regard resta tendre en se posant sur Luna, comme s’il percevait la fragilité et la force qui coexistaient en elle.
Pour Luna, cette nouvelle vie était un paradoxe étrange : un mélange d’épreuves et de bienveillance, de défis et d’encouragements. Elle ne pouvait pas nier qu’elle se sentait mieux ici, qu’elle trouvait un équilibre qu’elle n’avait jamais connu. Cependant, elle savait qu’elle n’était pas encore acceptée de tous et que certains, comme Darius, attendaient sans doute la moindre erreur pour remettre en question sa présence.
Ce soir-là, alors que le soleil disparaissait derrière les montagnes, elle s’assit au bord d’un ruisseau, laissant ses doigts effleurer la surface de l’eau. Nox, dans son esprit, restait silencieux, mais elle sentait sa présence rassurante, son soutien indéfectible.
*Nous avons trouvé un abri ici, Nox,* pensa-t-elle, se parlant autant à elle-même qu’à son loup. *Mais nous devons rester vigilants.*
*Tu n’es plus seule, Luna,* murmura Nox, sa voix comme un souffle dans la brise du crépuscule. *Ces gens… ils voient en toi quelque chose de plus. Ne les repousse pas.*
Elle acquiesça doucement, regardant son reflet dans l’eau. Pour la première fois depuis longtemps, elle envisageait la possibilité d’un avenir, non pas en solitaire, mais entourée de ceux qui, peu à peu, semblaient vouloir faire partie de sa vie.