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004

Je tournai en rond de longues minutes près de la porte arrière de la maison. Je me sentais fébrile et j'admets, paniquée. J'aurais déjà dû être à notre rendez-vous, mais je n'arrivais pas à trouver le courage de sortir. Je l'imaginais en bordure des arbres, sa peau douce caressée par le vent, ses longs cheveux ondulant dans son dos et ses magnifiques yeux me cherchant. Oui, je savais qu'elle m'attendait en ce moment même, je le ressentais comme un poids contre ma poitrine. Elle était si proche... Aller, Yumi, un peu de courage, pour une fois!

Je me motivai mentalement avant de pousser la porte, en prenant une grande inspiration. Tu vois, ce n'était pas si difficile. Heureusement, il faisait beau aujourd'hui et il n'y avait aucune prédiction de pluie à venir. J'avoue que même si le ciel devait nous tomber sur la tête, j'y serais allée quand même.

Je franchis la courte distance qui me séparait toujours du jardin et bifurquai vers l'orée de la forêt, les yeux fixés sur mes pieds; une partie de moi redoutait de les lever sans que je comprenne pourquoi. Peut-être avais-je peur d'être déçue, cependant je n'eus pas le temps d'y réfléchir, on m'interpela.

- Bonjour Yumi!

J'eus une bouffée de chaleur juste à entendre le son de sa voix.

- Bonjour...

Il y eut un court silence.

- Tu peux me regarder, tu sais. Je ne crois pas être si affreuse.

Elle le dit sur le ton de la plaisanterie, j'aurais juré, pourtant, déceler une pointe d'agacement. J'expirai l'air que j'avais retenu sans en être consciente depuis que j'étais sortie de la maison et croisais finalement son regard. Elle me faisait toujours ce même effet, je ressentais un vertige comme si je tombais à la renverse sans jamais toucher le sol. Mon cœur n'en faisait qu'à sa tête et battait à un rythme irrégulier. J'avais chaud... vraiment très chaud; malgré tous ces inconforts, je ne pus retenir un sourire de joie pure. Elle me le rendit et ses yeux pétillèrent de bonheur.

- Voilà qui est mieux! Tu me rejoins ici ou bien tu préfères rester plus loin?

- Oh! Euh... j'arrive...

Je m'approchai avec hésitation, ignorant quelle portée était respectable dans ce genre de circonstances. J'optai pour deux bons mètres et m'arrêtai en lui offrant un sourire timide. À cette distance, pendant qu'elle m'examinait dans les détails, je la voyais déglutir difficilement.

- Eh... Hum... Tu...

- Viens plus près!

J'ouvris grand les yeux et il me sembla que mon cœur cessait de battre. Je devais avoir l'air effrayée puisqu'elle se sentit obligée de s'expliquer.

- Je ne te ferai rien de mal Yumi, je veux juste te parler d'un peu plus près.

Je n'osai pas répliquer de peur que mes pensées s'entremêlent et que je réponde une bêtise. Néanmoins, je fis ce qu'elle me demandait et me retrouvais bien rapidement à un pas d'elle. Elle s'assit dans l'herbe et je l'imitais avec plaisir. Mes jambes n'auraient pas tenu longtemps si nous étions restés debout à proximité l'une de l'autre. J'eus encore droit à un de ses magnifiques sourires.

- Je suis contente que tu sois venue.

- Moi aussi... Je suis demeurée sur le pas de ma porte plusieurs minutes tant j'étais nerveuse.

- Et moi, je suis arrivée des heures à l'avance parce que je ne voulais pas te manquer!

- Ah bon?

Elle hocha la tête en partant d'un rire sincère auquel je me joignis. J'eus l'impression que toute la tension et la nervosité que j'avais accumulées depuis la veille se dissipaient. Comme si d'un simple rire elle pouvait chasser toutes mes peurs.

— Bon sang ! Élizabeth, que t'est-il arrivé ?

— Ah ça, ce n'est rien ! répondit-elle nonchalamment en relevant précipitamment le haut de son chandail.

— Pour que tu sois si prompt à cacher ta blessure, c'est que ça ne doit pas être aussi bénin que tu le prétends...

— Je suis une louve Yumi, ce genre de marque est habituel.

Je fronçais les sourcils. Ce qu'elle disait faisait du sens, mais je sentais que quelque chose sonnait faux. Je voulus tirer sur le chandail, mais elle m'évita à une vitesse déconcertante.

— Je te dis que ce n'est pas grave.

— Tu n'auras pas d'inconvénient à me montrer dans ce cas ?

— ...

Je soutins sans difficulté son regard mécontent. Une fois que j'ai quelque chose en tête, je ne lâche pas facilement. Bon, peut-être que si elle avait été réellement agressive j'aurais laissé tomber... Elle avait beau être gentille envers moi, je n'étais pas stupide au point d'oublier qu'elle était un loup-garou !

— S'il te plaît ?

Elle fit un son à mi-chemin entre un soupire et un grognement. Je considérais qu'elle me donnait ainsi son accord et tirais sur le chandail aussi doucement que possible. Ce que j'y découvris me fit grimacer. Quatre épais sillons rougeoyants marquaient sa chair en partant du buste jusqu'à son dos en passant par son épaule. La peau était boursouflée et suintait comme si elle était infectée.

— Ouf, ce n'est pas joli. Je croyais que vous guérissiez super rapidement.

— Mhm... tout dépend de la blessure.

— Tu sais que c'est infecté ?

— ... Oui, mais ça guérira... comme toujours, souffla-t-elle sans doute plus pour elle-même que pour moi.

— Qu'est-il arrivé ?

En levant les yeux, je fus surprise par la dureté de son regard. Celui qui était si chaleureux quelques instants plus tôt était maintenant froid avec une pointe d'agressivité. Je me reculais instinctivement.

— C'est une affaire de meute.

— Euh... je... d'accord, désolée.

Je me relevais pour m'éloigner, mais elle me retint par la main. Quand s'est-elle relevée ?

— Où vas-tu ?

— Je... je vais chercher quelque chose pour te soigner.

Elle se détendit, mais ne me relâcha pas pour autant.

— Ce n'est pas nécessaire. Je n'aurai plus rien d'ici un jour ou deux.

— D'ici là, ça ne doit pas faire du bien... J'ai ce qu'il faut pour que ce soit moins désagréable. Ne fais pas cette tête, je reviens vite.

— Certaine ?

Un voile de doute hantait son regard. Elle croyait vraiment que j'allais partir juste comme ça ? Elle ne m'avait pas répondu de la meilleure des manières, mais ce n'était pas une raison... du moins pas pour moi.

— Oui, voyons. Allez, je me dépêche.

— D'accord...

Je rentrais donc au pas de course et me précipitais dans la salle d'eau pour chercher quelques bandages et un désinfectant spécial. Mon père le gardait en sûreté puisqu'il nettoyait les infections causées par les morsures et les griffures de loups. Je pris aussi quelques effets supplémentaires au cas où la blessure soit plus grave que ce que j'avais eu le temps de voir.

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