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Je sens mon corps trembler de froid, de peur et d'appréhension. Je sais que j'ai fait échouer un dossier potentiellement important pour mon patron et j'ai tellement peur qu'il déverse son venin sur moi maintenant. Je ne pourrais pas le supporter. Alors pour éviter d'avoir à subir ses foudres, je baisse les yeux et prie pour qu'il s'en aille.
Cependant, Ethan n'agit pas comme je le souhaiterais et au lieu de partir, il s'approche doucement de moi. Ses grandes mains se dirigent sur mes joues pour encadrer mon visage. Avant qu'il ne puisse me toucher, je me recule par reflexe et me crispe, telle une statue de pierre. Pourquoi est-ce que tout le monde veut poser ses mains sur mon corps ? Laissez-moi tranquille ! Sans réussir à maitriser ce qui sort de ma bouche, mes lèvres bleuies s'entrouvrent en gémissant.
-Ne me touchez pas...
J'ai prononcé ces mots dans un souffle de douleur, comme une supplication. Ma voix brisée est si faible que je ne sais même pas si j'ai réellement parlé à haute voix. Ma réaction face à son approche déconcerte totalement Ethan qui replace immédiatement ses mains le long de son corps. Mes yeux scrutent toujours le sol pour masquer ma gêne et je n'ai qu'une envie, c'est de me rouler dans mes draps et de dormir pour oublier. Je voudrais ne jamais me réveiller.
-Candice, c'est moi... n'ayez pas peur...
Ethan a susurré ses mots avec tellement de douceur et de sollicitude que je ne comprends pas sa réaction. N'est-il pas censé être en colère contre moi ? Je relève lentement les yeux vers lui, mon ventre se tordant sous l'appréhension.
-Regardez-moi Candice, je ne vous veux aucun mal. Je suis là pour vous...
Il ment ! Ce n'est pas vrai ! Il n'était pas là quand j'ai eu besoin de lui !
Je me détourne de lui et m'enfonce dans ma chambre d'hôtel. Je m'assois machinalement sur mon lit et je le vois perdu, ne sachant comment réagir face à mon mutisme. Mal à l'aise, il finit par avancer de quelques pas et s'assoit à côté de moi. Il me scrute intensément et son regard me brûle. Je ne supporte pas qu'il me touche de ses yeux. Quand son genou frôle involontairement le mien, je réprime une nouvelle nausée et me lève brusquement. Ne sachant où aller, je me laisse simplement glisser contre le tour du lit, atteignant le sol sans réellement y prêter attention.
-Candice, s'il vous plait, dites-moi comment vous vous sentez... dites-moi ce qu'il s'est passé...
Mon cerveau est actuellement incapable de répondre à ces questions. Alors pour me protéger, je ferme les yeux et chantonne dans ma tête. Je reste ainsi de longues minutes mais lorsque je sens le corps d'Ethan s'approcher de moi, j'ouvre les yeux en sursautant. Il se tient maintenant accroupi en face de moi et ses yeux semblent chercher une réponse. Ne comprenant pas ce qu'il attend de moi, je me contente de l'admirer. Ses cheveux hirsutes, sa barbe brune, ses yeux affolés, ses traits tirés, ses lèvres pincées, ses mains crispées, l'inquiétude que je lis en lui... tout ceci me ramène à la réalité et j'ai à nouveau mal au plus profond de mon être.
-Vous m'entendez Candice ? Je vous ai demandé où sont vos vêtements chauds, vous êtes frigorifiée.
Apparemment, il me parle. Mais depuis combien de temps ? Et pourquoi ne veut-il pas me laisser sombrer tranquillement ? Je me détourne de son regard en gardant mes lèvres closes et mes iris verts se posent maintenant sur les murs blancs qui m'entourent. Ils contrastent tellement avec les ténèbres qui m'engloutissent petit à petit...
L'agitation que crée Ethan autour de moi me sort de ma contemplation. Je devine qu'il a du se relever, sortir de ma chambre quelques instants parce que je le vois maintenant s'approcher tout doucement de moi, son gros sweat à la main. Prenant bien soin de ne pas me toucher, il me le tend et me chuchote :
-Enfilez au moins ce pull Candice, vous êtes transie de froid.
Il a raison, je meurs de froid. Comment pourrait-il en être autrement quand mon âme et mon cœur se sont glacés au moment où j'ai compris la cruauté qui pouvait s'abattre sur moi ? Je réalise que je n'ai jamais cessé de trembler et mes membres contractés à l'extrême me font souffrir. Jusqu'à présent, cette douleur physique me permettait d'oublier, pourquoi veut-il m'en priver ?
-Si vous ne bougez pas, je vais être obligé de vous couvrir quand même. Je ne peux pas vous laisser dans cet état.
Je n'ai jamais entendu autant de douceur et de bienveillance dans sa voix. Même lorsqu'il m'a sauvé de ma crise d'angoisse. La simple pensée que cet homme veuille réellement prendre soin de moi en cet instant me reconnecte avec la réalité. Imperceptiblement, je hoche la tête, mes mains lâchent faiblement mes jambes et j'attrape du bout des doigts le vêtement qu'il me tend. Machinalement, j'enfile son sweat doux et moelleux et son odeur me frappe instantanément. Je positionne la capuche sur ma tête et me laisse envahir par le parfum d'Ethan mélangé à une lointaine odeur de nourriture. Je reconnais immédiatement les effluves du restaurant de Murphy dont le tissu s'est imprégné. Cette senteur unique me replonge dans notre soirée de la veille. Je me pelotonne contre le sweat et je le frotte pour qu'il guérisse ma peau. Ces merveilleux souvenirs doivent effacer la torpeur dans laquelle je suis plongée.
Grâce au pull de l'homme qui me fixe intensément, je me crée une bulle hermétique dans laquelle seuls la légèreté, le désir, le plaisir et le bien-être trouvent place. Je retrouve les délicieuses sensations que j'ai ressenties hier soir et mon cœur se réchauffe lentement. Je voudrais rester emmitouflée dans la douceur de ce pull pour toujours, j'ai l'impression qu'Ethan sera là pour me protéger quoiqu'il arrive. Mais la vérité, c'est qu'il n'était pas là. Et que j'étais seule pour me débattre.
Toujours prostrée à même le sol, je n'arrive pas à empêcher mon cerveau de me rappeler que mon patron m'a jetée dans la gueule du loup sans sourciller. Il m'a abandonnée pour partir je ne sais où et il ne s'est pas soucié de mon sort. Je suis définitivement seule, quoi qu'il arrive, j'ai beau avoir grandie, avoir murie, je serais toujours seule. Je croyais pouvoir compter sur lui d'un point de vue professionnel, j'avais confiance en lui. Mais il m'a abandonnée.
-Vous m'avez laissée seule...
Ces quelques mots sortent de ma bouche tel un gémissement non maitrisé et font instantanément réagir Ethan. Il est accroupi face à moi et me regarde maintenant avec de grands yeux, comme s'il était en train d'intégrer ce que mes lèvres ont prononcé. Il finit par se prendre la tête dans les mains, se frotter le visage puis il ébouriffe nerveusement ses cheveux avant de murmurer tristement :
-Je n'avais pas le choix... je... il... il avait besoin de moi...
La peine et la culpabilité qui transpercent dans sa voix me déchirent le cœur. Avec cette seule phrase, l'évidence me frappe : Ethan s'en veut terriblement.
-Je suis revenu dès que j'ai pu... je vous le promets Candice... j'ai senti que vous appréhendiez ce rendez-vous et je n'étais pas tranquille... je suis rentré au plus vite...
Ce que j'entends me heurte, me piétine, me blesse, me déchiquète le cœur. Il se sent coupable et cette responsabilité le ronge. L'homme blessé en face de moi plante son regard sincère dans le mien et je ne peux retenir un faible sourire qui semble le rassurer légèrement.
-Qu'est-ce que vous lui avez fait ?
Cette question me brûle les lèvres depuis quelques minutes et j'ai besoin de savoir que mon patron ne va pas avoir d'ennuis à cause de moi.
-Je l'ai dégagé dehors et je lui ordonné de ne plus jamais nous contacter. Je ne veux plus entendre parler de ce salopard. Mais si vous souhaitez porter plainte, je témoignerai pour vous.
Je secoue la tête de gauche à droite, je veux oublier cette histoire au plus vite.
-Je pensais que vous l'aviez frappé...
-Il aurait bien mérité que mon poing s'écrase sur son sale visage c'est sûr mais... je me suis promis de ne jamais frapper personne. Je ne peux pas...
Cette discussion ne fait que remuer le couteau dans la plaie et mon cerveau continue de revivre sans cesse les évènements insupportables qui m'ont terrassée. Alors, à chaque fois que de nouveaux souvenirs de mon agression refont surface, j'inspire profondément et me délecte de l'odeur d'Ethan. L'odeur du vrai Ethan, celui avec qui j'ai diné hier soir dans une petite taverne excentrique, celui qui m'a dévoilé un peu de sa vraie personnalité, celui qui a fait tomber son masque professionnel et distant l'espace de quelques heures. Cet homme-là me fait du bien en cet instant car il me permet de me rappeler que tous les êtres humains ne sont pas nés pour faire souffrir les autres. Il y en a certains qui sont sur cette terre pour que le voyage de la vie soit plus doux et j'ai naïvement envie de croire qu'il en fait partie.
Mon patron est toujours accroupi en face de moi et il m'observe à nouveau intensément. Les sourcils froncés, je vois son regard me détailler. L'expression soucieuse qu'arbore son envoûtant visage est si sincère que j'aimerais le rassurer en lui disant que je n'ai rien physiquement. Seuls mon cœur et ma confiance ont été anéantis. Mais je n'arrive pas à prononcer le moindre mot, j'ai trop peur de réaliser que cette mésaventure est réelle. Alors je reste ainsi, prostrée au sol et emmitouflée dans un morceau de tissu auquel je me raccroche plus que de raison.
Au bout d'un long moment, mon esprit se reconnecte lentement et mes bras crispés ainsi que mes jambes contractées me font souffrir de plus en plus intensément. J'esquisse un mouvement pour me redresser ce qui fait immédiatement réagir Ethan. Il amorce un geste pour m'aider dans ma tâche mais se reprend tout de suite, ne souhaitant pas me braquer encore plus. Je sens que la distance que j'ai instaurée entre nous le ronge de l'intérieur mais il fait de réels efforts pour la respecter et ne pas me brusquer. Nous nous retrouvons ainsi tous les deux debout au milieu de ma chambre d'hôtel et les yeux du grand brun se font plus interrogateurs que jamais. Il n'est pas à l'aise, j'ai l'impression qu'il a peur de commettre une maladresse et son attention me touche de plus belle.
Me sentant embarrassée d'être scrutée de la sorte, je me décale vers la droite et mes yeux se posent sur le grand miroir sur pied qui trône dans l'angle. Mes jambes me guident vers cette glace qui me renvoie un reflet peu flatteur mais tellement réaliste de mon état. La jeune femme qui se tient debout face à moi est plus pâle que lune et son regard est voilé de tristesse. Ses iris verts émeraude semblent las et résolus tandis que ses fines jambes seulement couvertes d'un short de pyjama la rende plus fragile et chétive que jamais. Cette jeune femme me rappelle la Candice j'étais pendant mon adolescence, celle qui se faisait marcher dessus par tout le monde, ses parents en première ligne. La revoir aujourd'hui me brise encore plus que je ne le suis déjà.
Je m'observe dans ce miroir depuis de longues minutes maintenant. La nuit est tombée sur la capitale anglaise, à l'extérieur la neige immaculée qui virevolte sans cesse depuis deux jours crée une luminosité exceptionnelle qui ne fait que me rappeler que je me débats toujours avec mes propres ténèbres. Ethan a allumé la petite lampe de bureau qui se trouve à ma gauche et une faible lueur nous enveloppe. A pas de loup, il s'approche lentement de moi. Je vois son reflet à travers le miroir et mes yeux se plantent dans les siens. Il avance si doucement que j'ai l'impression qu'il ne bouge presque pas mais il me laisse en réalité le temps de m'habituer à sa présence. Ses pupilles marron ne me lâchent pas une seule seconde du regard tandis que ses jambes musclées enchaînent les pas pour se rapprocher de moi.
Je ne bouge pas d'un millimètre, je reste immobile en attendant de comprendre où il veut en venir. Je reste sur mes gardes et mes poings se serrent malgré moi pendant que tout mon corps se raidit. Tous mes muscles sont contractés, j'ai toujours froid et mon cœur ensanglanté pèse plus lourd dans ma poitrine à chaque minute qui passe. Ethan se tient maintenant près de moi, dans mon dos et son torse se soulève au rythme de ses respirations calmes. Nous ne nous sommes pas quittés une seule seconde du regard depuis qu'il a amorcé son approche et je peux lire tellement de douceur et de délicatesse dans ses prunelles que ses yeux me réchauffent petit à petit. Son visage et ses iris me transmettent tellement d'émotions que je suis hypnotisée par cet homme protecteur que je ne peux voir qu'à travers ce miroir.
-Laissez-moi vous approcher Candice, n'ayez pas peur de moi.
Ces mots murmurés si faiblement résonnent en réalité au plus profond de moi. Il me demande de baisser ma garde. Il veut que je détruise les barrières que j'ai immédiatement érigées en signe de protection après mon agression. Il souhaite que je retrouve ma sérénité. Mais je ne sais pas encore si j'en suis capable.
Se rapprochant encore un peu plus de mon corps, Ethan positionne sa tête par-dessus mon épaule sans jamais me toucher. Ses lèvres atteignent mon oreille droite mais seul son souffle m'effleure. Je frémis d'angoisse sous cette approche à la fois douce et brûlante. Je prends quelques instants pour tolérer sa sollicitation et mon corps commence à se détendre légèrement. Je hoche discrètement la tête pour lui faire comprendre que je l'accepte. Immédiatement, ses épaules s'affaissent légèrement, comme si mon accord lui enlevait un poids qui comprimait sa poitrine.
-Est-ce que cette enflure vous a touché ? me demande-t-il les yeux clos et les poings fermés.
J'ai l'impression qu'il doit rassembler toutes ses forces pour se maitriser en prononçant cette phrase. Il brise le contact visuel qui nous liait depuis quelques minutes et le réconfort de ses yeux me manque instantanément. Sans son regard dans le mien, je me sens comme en chute libre, seule et abandonnée. J'ai besoin qu'il me prouve de ses prunelles captivantes qu'il est là pour m'envelopper dans sa bulle protectrice.
Il garde ses yeux clos pendant quelques furtives secondes qui me paraissent être une éternité. Quand son regard se verrouille à nouveau au mien, il peut y lire toute l'anxiété et la fébrilité que son abandon oculaire a déclenchée en moi. Il s'empresse de rapprocher sa bouche de mon oreille et me chuchote :
-Je suis là, ne vous en faites pas. Mais s'il vous plait, répondez-moi.
Je hoche à nouveau la tête. Par ce simple geste, je rends réelles les longues minutes d'horreur que j'ai vécues un peu plus tôt. Mes tremblements redoublent à nouveau d'intensité et je réprime un sanglot qui menace de m'ensevelir. Immédiatement, Ethan lève ses mains mais se retient de les poser sur ma peau et ce geste semble beaucoup lui coûter. Il se contente alors de pivoter légèrement sa tête vers la gauche et, ses yeux toujours plantés dans les miens à travers le miroir, il laisse courir son souffle chaud sur ma joue puis sur ma nuque pour m'apaiser.
Mon cœur sursaute, mon corps frissonne et mon ventre se contracte aussi douloureusement que délicieusement. L'onctuosité de ses gestes me permet de ré-apprivoiser mon corps et la proximité d'un homme. Il continue ses lointaines caresses jusqu'à ce que mes poings se desserrent enfin et que mes iris ne lui expriment plus de méfiance mais une profonde confiance.
-Montrez-moi où ce porc a posé ses mains.
Sa voix tremble sous l'intensité de sa demande. Je comprends immédiatement qu'il redoute profondément ma réponse. Ses yeux me supplient de le rassurer et sa détresse me submerge. Je veux retrouver le cocon qu'il a bâti de son simple souffle sur ma peau, et vite. Alors sans attendre, mes mains se soulèvent et mes doigts indiquent malgré moi ma hanche droite, mes bras puis le flanc de mon buste et enfin le haut de ma cuisse gauche.
La respiration d'Ethan s'accélère aussi vite que sa colère l'envahit et je l'entends murmurer « quel connard ! » entre ses dents serrées. Mon regard fragile doit l'aider à se reprendre puisque très vite, il fait à nouveau un pas en avant et son torse frôle mon dos. Je me fige sous ce faible contact mais son souffle revient caresser ma joue et j'ai immédiatement l'impression de me blottir dans un champ de coton. J'accepte alors ce nouveau rapprochement et mon corps se détend petit à petit. Les yeux envoûtants de mon éphèbe me fixent toujours aussi intensément et je prends un court instant pour le contempler. Je vois en cet homme magnifiquement ténébreux et viril toute la sollicitude et le réconfort qu'il souhaite me transmettre. Mon cœur bat encore un peu plus vite, un peu plus fort.
-Promettez-moi qu'il ne vous a rien fait d'autre.
Sa voix tremblante et ses yeux légèrement affolés s'apaisent au moment où je hoche la tête et que j'esquisse un faible sourire. Par mon regard, je le rassure du mieux que je peux. Non, il ne m'a pas fait plus de mal mais oui, il m'a détruite.
Ethan libère un long souffle de soulagement qui se répercute dans ma nuque et mon ventre se contracte encore plus intensément. Ses mains se rapprochent dans la plus grande lenteur de mes bras et il les laisse en suspens pendant que ses mots se logent dans ma tête et dans mon cœur.
-Maintenant, je vais effacer tout ce que ce salopard vous a fait. Faites-moi confiance, Candice.
Mon corps se met à trembler d'appréhension et ses mains chaudes se posent enfin sur mes bras. Son toucher est doux, lent, telle une infime caresse qui me couvre de frissons. Je reste tout de même tendue, ne sachant pas si je peux réellement me laisser aller et accepter cet assaut subtil sur ma peau blessée. Mon cœur sursaute, mes mains se mettent à trembler et je n'arrive pas à cacher mon angoisse. Ethan me scrute si intensément que je me convaincs d'essayer de me détendre à son contact mais cette résolution s'avère difficile à mettre en œuvre. Ses paumes affirment alors légèrement leur présence sur ma chair et commencent à effectuer de lents va-et-vient qui après quelques minutes parviennent à me calmer. Je verrouille mes yeux aux siens afin de me nourrir de sa détermination et de sa quiétude. Mes poumons commencent à enchainer des inspirations régulières qui m'apportent plus de sérénité que d'oxygène.
Les mains de mon patron se baladent toujours sensuellement sur mes bras tandis que je prends à nouveau conscience de tous mes membres. Je sens mes pieds ancrés dans le sol, mes jambes retrouver un peu de vigueur tandis que mes bras glacés me brûlent sous son toucher. J'ai envie de fermer les yeux pour profiter de ce bien-être qui commence à s'emparer de moi mais je me retiens, son regard ardent, presqu'hypnotisant m'est vital en cet instant.
Ethan doit sentir que ses gestes ont l'effet escompté puisqu'il brise enfin l'infime distance séparant nos deux corps et colle son torse à mon dos. Je ressens immédiatement ses inspirations autrefois régulières s'accélérer discrètement et je cale mon rythme au sien. Je veux retrouver l'osmose qu'il sait si bien créer, je veux replonger dans notre bulle qui n'appartient qu'à nous.
Ses paumes chaudes et réconfortantes se montrent maintenant aventureuses puisqu'elles quittent langoureusement mes bras pour se poser sur mes hanches dans un geste à la fois délicat et possessif qui déclenche immédiatement une envolée de papillons dans tout mon corps. Ethan me fixe toujours intensément et le mélange de son odeur, de son souffle, de son regard et de son toucher me fait quitter la terre ferme. Je plane les yeux ouverts. Cette homme immense m'enveloppe de ses bras si protecteurs que plus rien ne peut désormais m'arriver. Mon corps se relâche de plus en plus, je suis maintenant totalement en appui contre lui et je me laisse aller dans cette étreinte d'une rare intensité. Le fait que je puisse suivre le mouvement de ses mains à travers le miroir ne fait qu'intensifier les sensations voluptueuses que je ressens. Ethan remplace ma douleur par sa douceur, il cicatrise ma défaillance de sa confiance et il guérit ma peur grâce à sa chaleur.
Au fur et à mesure que ses mains remontent sur mon ventre, puis sur mes flancs, je sens le corps d'Ethan se raidir. Ses larges mains rugueuses se promènent sur son sweat et elles effleurent à travers le tissu ma peau si sensible à cet homme. Mes terminaisons nerveuses se réveillent et je sens ma chair crépiter partout où il laisse ses empreintes. Si ses doigts ne faisait que me frôler il y a encore quelques minutes, ils s'enfoncent maintenant doucement dans ma peau. Sa prise se raffermie et ses paumes envahissent maintenant chaque parcelle de mon buste. Elles passent innocemment de mon ventre à ma poitrine, puis de mes épaules à ma nuque et redescendent effleurer ensuite la pointe si sensible de mes seins. Son étreinte salvatrice se fait si sensuelle que ma peine commence à laisser place au désir.
Tandis que ma respiration se fait plus sporadique, que les contractions de mon ventre se répercutent entre mes jambes et que mon cœur me fait mal tellement il bat la chamade, les mains d'Ethan se dirigent maintenant plus bas et atteignent le haut de mes cuisses nues. Ses pupilles dilatées sont toujours connectées aux miennes à travers la glace et elles déclenchent un brasier qui ne demande qu'à m'envahir. La peau de mes jambes se couvre de frissons et la sensation de ses doigts sur ma chair ardente ne réveille plus mon corps. Elle déclenche une vague de plaisir, de désir et de feu qui m'engloutit intensément. J'appartiens aux mains de cet homme, à son toucher si excitant et à son regard si brûlant.
Le rythme effréné de mon cœur qui s'écrase contre ma cage thoracique fait vibrer mon corps tout entier. Oubliés la souffrance et la peine ! Ethan a nettoyé ma chair des salissures qu'un monstre a laissées et il m'enferme maintenant dans une insoutenable étreinte. Je ne soutiens absolument plus mon corps, seuls ses mains et son torse me maintiennent debout. Je le laisse prendre possession de moi et cicatriser mes plaies autrefois béantes. Je sens les mains de mon homme s'enfoncer avec délice dans la chair de mes cuisses puis remonter dans une insoutenable lenteur jusqu'à mes hanches tout en prenant soin de caresser mon intimité avec ses pouces. Il combine alors l'action de ses paumes avec d'exquis baisers humides qu'il dépose d'abord timidement sur ma clavicule droite. Voyant que je me délecte de ses initiatives, la bouche d'Ethan se montre maintenant plus vorace et elle se met à dévorer mon épaule, puis ma nuque tandis que ses doigts entament des va-et-vient entre mes hanches et mon entrejambe. Les innombrables décharges de désir et de plaisir qui me submergent me rende haletante puis pantelante et je me love encore plus intensément dans ses bras. De sa voix rauque et éraillée, Ethan grogne alors mon nom en silence et cette douce mélodie m'ancre à nouveau à la réalité.
Malgré tout le bien-être et le plaisir que cet homme m'apporte, je ne suis pas prête à aller plus loin ce soir. Mon agression est encore trop récente et je ne me sens pas capable d'offrir à Ethan ce qu'il attend. Même si chaque cellule de mon corps le réclame, je sais que ce serait une erreur de franchir le pas ce soir. Alors, sans me décoller de lui, je penche imperceptiblement à droite pour coller ma tête à la sienne et lui chuchote, mes iris émeraudes toujours bloquées dans les siennes :
-Ethan...
A l'entente de son prénom, il s'attèle à baiser ma nuque plus intensément encore. Mon ventre fait le grand huit et l'accumulation du plaisir qui s'est logé en moi depuis le début de notre étreinte manque de me faire chavirer.
-Je ne peux pas... pas ce soir...
Au lieu de le contrarier, mes mots semblent le soulager. Son corps qui m'enveloppe si chaudement se détend et sa langue continue de me cajoler.
-Je sais Candice... mais laisse-moi rester avec toi, s'il te plait...
Pour toute réponse, je lui souris à travers le miroir. Ethan lâche un long soupir qui atterrit sur la peau humide de mon cou, intensifiant par la même occasion ses baisers charnels. Nous restons ainsi de longues minutes, enveloppés dans notre bulle de douceur, de plaisir et de désir. Les gestes d'Ethan se font langoureux mais protecteurs, ils créent de l'excitation qu'ils remplacent immédiatement par une profonde volupté. Le miroir en face de moi me renvoie le reflet d'un loup affamé qui cache un homme doux comme un agneau sous son costume. Emmitouflée si puissamment dans ses bras, j'ai l'impression de lui appartenir.