Chapitre 4
Jamila sortit de sa chambre décidé à mettre en exécution son plan. Ils allaient
retourner à Jeddar et elle refusait de s'en aller sans Marcella. Elle soupira une
fois avant de lancer un regard à Farida . Elle s'avança vers Marcella qui lui
souriait et avant qu'elle ne l'atteigne, elle se laissa tomber.
Marcella accourut aussitôt mais ne pu amortir la chute de la petite. Elle la
souleva de terre et la fit coucher sur le transat.
- Mon Dieu,Jamila , m'entends-tu ?
- Elle est tellement têtue la petite, je lui ai maintes fois dit de ne pas trop courir
alors qu'elle est en convalescence. Fit Farida.
Marcella l'examina et remarqua qu'elle avait la fièvre.
- Elle est brûlante. Je vais chercher mon matériel , surveillez là.
Jamila ouvrit un oeil.
- Bien joué chérie, lui souffla Farida.
- C'est pour papa qu'on le fait hein, chuchota Jamila.
Farida hocha la tête et jeta un coup d'œil derrière pour être sûr que Marcella ne
les surprennent pas.
- Mais tu es allé fort avec les épices, ma langue me fait souffrir le martyr.
- Je le sais mais on n'avait pas le choix, c'est pour la bonne cause chérie.
Farida vit que Marcella approchait alors elle fit signe à Jamila de se recoucher.
Marcella l'examina longuement avant de donner son diagnostic.
- Elle a dû manger une chose à laquelle elle fait de l'allergie, un peu de repos et
tout ira bien.
- Vous en êtes sûre ? Cela fait deux semaines qu'elle est malade et je ne croit pas
que ça soit de l'allergie. Fit Farida en se tenant la poitrine.
Marcella jeta un coup d'œil a Jamila qui était devenue toute rouge.
- Je vais appeler son père, lui dit Farida avant de s'en aller en courant.
Bien que Jamal soupçonnait un coup de sa fille en collaboration avec Farida , il
était tout de même inquiet pour sa fille. Il courut plus vite que Farida et arriva à
la piscine. Il trouva une Marcella qui caressa doucement les cheveux de sa fille
et ne put s'empêcher de ressentir une émotion particulière face à cette scène qui
se jouait sous ses yeux.
- Est ce qu'elle va mieux ? Demanda-t-il.
Elle sursauta et respira un bon coup avant de tourner son attention sur Jamila.
- Je crois qu'elle devrait aller mieux avec un peu de repos.
Jamal toucha les joues de sa fille et ses soupçons se confirmèrent. Il lui fallait
avoir une bonne discussion avec sa fille. Jamila était allergique aux épices et
cela lui donnait toujours l'impression d'être malade lorsqu'elle en prenait.
- Merci d'avoir pris soin d'elle, lança-t-il à l'endroit de Marcella.
- Je n'ai fait que mon travail, assura celle-ci.
Un long silence s'installa entre eux, silence que Jamal appréciait car il lui
permettait d'admirer ses magnifiques yeux verts.
- Papa ? Est ce que c'est toi ? Fit une petite voix affaiblie.
N'eût été la situation dans laquelle il se trouvait, Jamal lui aurait fait des
remontrances ou même rire de la tête de sa fille. Il avait du mal à réaliser qu'une
fillette de cinq ans puisse jouer si bien la comédie.
- C'est moi chérie, comment te sens-tu ? Demanda-t-il d'une voix douce.
- J'ai vue la mort venir, fit sa fille.
Jamal se retint de rire pour ne pas que Marcella se doute de quelque chose mais
sa fille avait l'air si sérieuse qu'il aurait crû à cette histoire s'il ne la connaissait
pas si bien.
- Ne dis pas ça chérie, tu as encore plusieurs années à vivre, lui dit tendrement
Marcella .
- Tu es tellement gentille Marcella, tu veux bien venir avec nous à Jeddar afin de
t'occuper de ma santé ? Demanda Jamila d'une voix douce.
Marcella dévia son regard vers Jamal qui avait un regard impassible. Il
n'affichait aucune émotion, il était difficile pour elle de donner une réponse. Elle
ne voulait en aucun cas décevoir cette petite qui lui avait apporté un peu de
réconfort.
- Tu es mignonne chérie mais je ne pense pas que ce soit une bonne idée, je suis
sûre que tu as de bons docteurs qui s'occuperont très bien de toi.
- Mais ils ne sont pas toi, répliqua Jamila. Papa, est ce qu'elle peut venir aussi ?
Au fond , Jamal était heureux de cette proposition. Il y réfléchissait depuis leur
retour du désert et là sa fille venait de lui tendre une belle perche.
- Si ça ne vous dérange pas , je voudrais que vous veniez avec nous à Jeddar afin
de suivre de plus près sa santé.
Marcella secoua la tête et se leva. Elle s'en alla s'en regarder en arrière.
- Ne t'en fais pas mon papa, elle viendra avec nous quoiqu'il advienne.
- En parlant de ça , tu me dois une bonne explication sur cette prétendue maladie
Jeune fille alors je t'écoute .
Jamila se redressa et s'assit sur le transat.
- Jamal Al Bayane Jeddar, tout ce que je fais , absolument tout ce plan tordu que
je fais alors que je n'ai que cinq ans et qu'en temps normal je devrais être en train
de jouer avec mes poupées, c'est pour que tu ne sois plus tout seul et que tu soit
heureux. Remercie moi pour mes efforts papa.
Jamal soupira longuement. Cette fillette qui était sa fille avait le dont de faire
sortir de sa bouche des paroles d'adultes si bien qu'il avait du mal à discuter avec
elle comme il le ferait avec un enfant de son âge .
- Mémé Farida ?
- Oui chérie.
- Ramène moi dans ma chambre, j'ai besoin de repos.
Jamal regarda sa fille partir en compagnie de Farida. Il resta assis un bon
moment avant de se lever. Il devait à tout prix retourner dans son pays car il
avait plusieurs affaires à gérer.
- Pourquoi j'ai l'impression que quelque chose te tracasse ?
Malik vint s'asseoir près de lui et lui tapota légèrement les épaules.
- C'est juste que je ne sais plus où j'en suis, d'un côté ma fillette de cinq ans qui
se comporte comme si elle en avait trente et d'autre part mon rôle de souverain
qui m'impose beaucoup d'obligations. Je crois que j'aimerais parfois être comme
tout le monde et ne pas avoir à subir toute cette pression.
- Tu n'es pas le seul cousin , chacun a ses problèmes à lui, même l'homme le
plus pauvre du monde a ses soucis à lui. Il faut juste que chacun puisse régler
ses propres problèmes par ses propres moyens sans pour autant en vouloir au
monde.
- Je crois bien que tu as raison, finit par dire Jamal.
- Je viens de voir Jamila dans les bras de Farida, dis moi ce qu'elle a encore
manigancé.
Jamal se passa une main sur le visage et poussa un long soupir.
- Je crois que ma fille va me faire vieillir avant même que je n'atteigne le
troisième âge.
- Ne me dis pas qu'elle a fait ce à quoi je penses.
- Tu connais ta nièce Malik et je te jure qu'à l'allure où on va, je ne serai plus
surpris de quoique ce soit venant d'elle. On me dira que Jamila effectue un
voyage sur la lune que je croirais sans discuter.
Malik éclata de rire.
- Je l'adore ma nièce, je crois bien que je voudrais avoir un enfant comme elle.
- Toi ? Le grand Malik, qui parle d'enfant ? Ça alors quelle grande nouvelle ?
Malik haussa les épaules et se leva.
- Tout change mon cher cousin, seuls les imbéciles refusent de changer. Je crois
bien que toi aussi tu devrais prendre les choses en main parce que Jamila le fait
mieux que toi.
Jamal regarda Malik s'en aller avant de se lever à son tour. Malik avait raison,
Jamal avait à présent l'impression que c'était sa fille qui dirigeait sa vie. À vrai
dire c'est Jamila qui prenait toujours les choses en main quand il s'agissait de sa
vie à lui. Il était temps pour lui de faire face à son destin.