2 - Première journée de cours
Yanie :
Mon réveil retentit dans la chambre. Je souffle d'agacement. J'ouvre un œil puis le second. Je suis épuisée. On dirait que je n'ai pas dormi du tout. Puis, mon cerveau percute.
Aujourd'hui c'est lundi.....J'angoisse. Je vais devoir aller en cours. On nous a fourni un costume que nous sommes obligés de porter, il s'agit de la tenue règlementaire de cet établissement. Nous n'avions pas besoin de ce genre d'accoutrement à Paris. J'ai horreur de ce costume. Je dois porter une jupe alors que mon style de vêtement est plutôt "hip hop". Je ne porte que des pantalons ou éventuellement des shorts. Là, j'ai une jupe qui m'arrive au-dessus du genou. J'ai l'impression d'être une petite fille modèle. Je n'aime pas cette impression, et, encore moins le reflet de mon image dans le miroir de la salle de bain.
Pour notre première journée, Monsieur Fresmont s'occupera de conduire Li-anne à la crèche à quelques mètres de notre école. Il nous a promis qu'il resterait une semaine avec nous pour que nous puissions nous adapter, et nous reposer sur lui si nous en ressentons le besoin. Pendant le Week-End, mon frère Paul a acheté une voiture. Nous montons tous à l'intérieur, et je supporte tant bien que mal de devoir aller en cours, des crampes à l'estomac me plie pratiquement en deux. Je suis étouffée par la peur. Je me pose beaucoup de questions. Je vais rester une partie de la matinée avec mes frères. Mais, je suis consciente que je ne serais pas dans la même classe qu'eux. Nous garons notre voiture sur le parking réservé aux étudiants. Nous descendons, et déjà, tous les regards sont posés sur nous. Je n'aime pas que l'on nous épie de la sorte. Je serre les lèvres.
Je baisse la tête et je suis de très près, mes frères. Je ne veux pas me rendre seule à l'intérieur de l'école. Je les suis, donc, et nous nous dirigeons vers l'accueil. Comme je le pensais, nous sommes les seuls européens. Nous récupérons nos plannings et je dois quitter mes frères pour me rendre dans ma salle de classe. Je suis un peu en avance, je décide de m'éloigner légèrement pour ne pas gêner les autres. De toute manière, si quelqu'un me parle, je ne suis pas persuadée que je parviendrais à tout comprendre.
Les étudiants commencent à attendre que le professeur ouvre la porte. Je ne préfère pas lever les yeux pour les regarder. Quand ils commencent à entrer, je suis le mouvement. Mais dans la classe le professeur me retient à son bureau, pendant que tous les autres étudiants vont s'asseoir. Je ne comprends pas ce que le professeur me demande, et les autres rient. Ils se moquent de moi, je suis très embarrassée. Alors, je décide de répondre en anglais.
" - Désolée, je ne comprends pas très bien le Coréen. Mais, je peux dialoguer en anglais !" Je propose en professeur de chant.
"- Soit, d'où venez vous," me demande-t-il, donc en anglais.
"- France !" Je réponds.
"- Comment vous appelez - vous ?" Questionne le professeur.
"- Je m'appelle Yanie Olivier." Dis-je.
Je sens tous les regards curieux posés sur moi, ce qui me déstabilise.
"- Cela ne va pas être évident de communiquer ensemble. Je suppose que vous devez avoir des cours de Coréen !" Poursuit le professeur.
"- Oui, monsieur." Je lui réponds.
"- Dans ce cas, allez vous assoir, nous allons commencé le cours de chant par des vocalises !" M'explique-t-il, puis aux autres étudiants de la classe, en coréen et en haussant la voix pour toute l'assistance.
Je m'assois au fond de la classe, la seule table libre, à vrai dire. Ils me suivent tous du regard. Cela m'énerve. Le cours commence, nous chantons des notes tous ensemble. Un garçon qui s'appelle Min Kunk vient au tableau et commence à interpréter une chanson coréenne. Il chante bien, et, il est très mignon aussi. Une fille vient également au tableau interpréter un folklore coréen. Sa voix est très aigüe, trop à mon goût. Je suis bien élevée, sinon, je me boucherais les oreilles.
Puis, le professeur se tourne vers moi et me demande de venir à côté de son bureau devant tout le monde. D'habitude, je n'ai pas peur mais là, je ne connais personne, je ne parle pas la même langue qu'eux. Mais, je me lève. Le professeur me demande ce que je veux chanter. Je lui dis en anglais.
"- Je peux vous interpréter une chanson qui j'aime beaucoup !"
Je lui annonce le titre et la chanteuse.
"- Je ne connais pas, mais nous vous écoutons !" Conclut-il.
Je jette un petit coup d’œil aux étudiants devant moi. Tous les regards sont braqués sur moi, curieux de voir ce que la petite française est capable de chanter.
Et je commence les premières notes. Ma voix est nette, j'ai beaucoup de possibilité vocale. Je peux partir du grave et monter assez haut dans les aigus. Et, puis je ne suis plus dans la salle de classe. Je chante, je ne vois plus rien. Je suis à fond dans la chanson. Je ne fais aucune fausse note. Je sais et je suis modeste, je chante très bien. Je m'imprègne du texte de la chanson plutôt optimiste, et je me laisse transporter par la magie de la mélodie. J'expose mon talent en souriant.
A la fin de la chanson, le professeur reste sans voix. Comme personne ne bouge, ne dit mot, je décide de retourner à ma place. Et le professeur me félicite pour mon interprétation.
La sonnerie de la fin de cours retentit, et, j'attends que tout le monde quitte la classe pour sortir. Mon cœur bat encore la chamade de la pression de tout à l'heure. Et puis tous ces regards sur moi, j'ai géré, mais je n'étais carrément pas très à l'aise. J'espère que ce genre de situation ne se reproduira pas. Heureusement, que j'ai tout oublié autour de moi dès que j'ai commencé à chanter. Je n'aurais pas aimé qu'ils se moquent de moi dès la première heure de cours. Je ne chante pas des classiques comme eux. Et j'ai franchement eu peur que mon choix de chanson soit critiqué.
Je me dirige vers mon cours de Coréen. Devant la salle, je retrouve mes frères. Ils me sourient et nous entrons pour notre premier cours de la langue nationale..............