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04

Ne refusant que peu un Starbucks, je lui offrit un sourire chaleureux en guise de réponse. Le temps de nous préparer puis d'avertir Mike et Elya, et le tour était joué. Le soleil couchant refléta nos moments éphémères avant qu'une douce bise accompagne nos au revoir.

Les semaines passèrent et je m'étais faite quelques amis au lycée, n'ayant que peu de temps pour les rumeurs enfantines et les chamailleries. Sarah avait rejoint notre groupe et les sorties à cinq se multipliaient au fil des jours.

Un des lundis de juin fut particulièrement chaud. Le lycée avait fermé ses portes, ordonnant aux élèves de rester chez eux et les rues demeuraient vides. Nous avions invité Mike, Elya et Sarah à la maison pour que nous puissions nous baigner. Même si je m'étais promise de rester loin de cette dernière, elle m'attirait indéniablement. La seule solution était de la fréquenter pour ne plus ressentir ce vide qui me faisait sentir un peu plus vivante à chaque fois.

Mes deux amis arrivèrent le sourire aux lèvres et la serviette aux mains. Je les fis entrer et il ne fallut pas cinq minutes pour que Sarah se retrouve dans l'eau, jetée par Mike sous les rires enjoués d'Elya et de ma sœur.

Un après-midi qui s'annonçait relaxant mais qui allait prendre une toute autre tournure.

Sarah était sur mes épaules et Elya sur celles de ma sœur, Mike allait arbitrer le round. Ce jeu est sans aucun doute incontournable quand vous avez une piscine : les premiers à tomber font la vaisselle. Mike donna le départ et il ne fallut pas dix secondes avant de me retrouver sous l'eau avec Sarah un peu plus loin qui buvait la tasse.

- Eh bah alors ? nargua Elya. Quelle équipe va faire la vaisselle ? C'est la votre !

May et elle entamèrent une danse de la joie tandis que Mike sortait de la piscine en se jouant de la scène. Il déverrouilla son portable et prit une photo du moment en l'immortalisant.

May me tira la langue d'un air victorieux. Je lui fis un clin d'œil et d'un infime mouvement de tête lui envoyai la bouée flamant rose dessus. Elle se mit à crier et à m'envoyer des gerbes d'eau avec l'aide de son associée. De là, s'enchaîna une bataille d'eau où ma sœur se retrouva à engloutir tout le contenu de la piscine.

Quand j'eus eu mon quota d'intrusion pulmonaire, je sortis de la piscine suivie de Sarah. Nos regards s'accrochèrent longuement puis je rougis en m'enroulant d'une serviette à l'effigie de Thor.

- Très bon choix, me dit-elle en montrant le héro sur le tissu.

Je lui souris et commençai à empiler les assiettes vides pour les transporter à l'intérieur suivie de la jolie brune.

- Je veux gagner la prochaine fois, ordonna-t-elle.

- Il n'y aura pas de prochaine fois.

Elle déposa les verres et les couverts dans l'évier en veillant à ne rien briser. Ses cheveux gouttaient sur ses épaules en faisant naître de sublimes anglaises. Elle pivota vers moi en posant une main sur le plan de travail.

- Ah. Et pourquoi ça ?

Son regard était joueur et sa proximité me forçait à tourner la tête pour ne pas sentir son souffle sur mon visage. Je reculai de quelques pas en pointant mon index sur son front.

- Parce que t'es trop nulle !

Elle ouvrit la bouche outrée et me poussa contre le frigo en me tendant son majeur. Elle ouvrit le robinet en enfonçant le bouchon pour que l'évier se remplisse.

- T'étais sensée être le pilier ! me reprocha-t-elle.

- Il n'y a pas de mauvais cheval, seulement des mauvais cavaliers.

Elle serra son poing et me frappa doucement l'épaule d'un air rieur. Son point s'ouvrir petit à petit pour laisser courir ses doigts le long de mon bras en descendant jusqu'à ma taille. Le silence était lourd et électrique.

Je relevai les yeux vers elle, nos regards restèrent accrochés durant un long moment. Je glissai une main hésitante vers sa joue pour la caresser avec lenteur. Elle frémit et ferma les yeux.

- Putain Sarah ça déborde ! m'exclamai-je soudainement.

Je m'écartai vivement d'elle la faisant sursauter et fermai le robinet en pataugeant dans la flaque qui s'était formée sous nos pieds. Nous nous regardâmes avant de partir dans un même rire gêné en prenant la situation avec recul.

- Purée, pestiférai-je, apporte-moi la serpillière s'il te plaît. Deuxième porte à gauche, dans le placard.

Sarah hocha la tête et sortit de la cuisine.

Les minutes passèrent et elle ne revenait toujours pas.

- Sarah ? appelai-je.

Pas de réponse. Je fronçai les sourcils et m'avançai doucement vers le placard.

- Sarah, t'es là ?

Toujours rien. Je décidai de continuer ma progression, prudente. La porte du placard était grande ouverte mais celui-ci était vide. Aucune trace de mon amie.

Un fracas se fit entendre suivit d'un cri qui était malheureusement le sien.

Le placard étant vide, je me décidai à continuer vers le salon. Mes pieds nus glissaient sur le carrelage dans le silence pesant de la maison. Seul le tic tac de l'horloge faisait écho.

Je poussai un soupir après avoir retenu mon souffle durant tout ce temps et relâchai la pression sur mes mains, de nouveau sereine. Sarag était là, penaude. Elle se triturait les doigts en gardant les yeux rivés au sol.

- Désolée j'ai cassé le vase…

Je lui souris et m'avançai vers elle sans parler. Mes pieds heurtèrent les débris de porcelaine et je dus serrer les dents pour éviter de lui en vouloir. Mon père n'y tenait pas spécialement et ce n'était qu'un bien matériel insignifiant. Tant que ça n'avait pas de valeur sentimentale, elle pouvait retourner la maison si elle le voulait.

Elle sembla troublée et s'excusa une nouvelle fois en reculant. Je me baissai pour amasser les débris en un petit tas et lui demandai de me donner le bol sur la table basse. La jolie brune me le tendit sans un mot. J'entrepris le nettoyage sous son regard.

- Bah aide moi.

- Euh… O-oui bien sûr, balbutia-t-elle.

Elle se baissa et nos mains se heurtèrent. Son regard rencontra le mien. Je grimaçai :

- Je déteste les clichés et là, c'est carrément atroce.

Elle fut prise d'un fou rire contagieux et je dus mettre une main au sol pour éviter de chanceler. Malheureusement celle-ci rencontra un morceau de porcelaine qui pénétra dans la chair de ma main, m'arrachant un gémissement.

- Ah put…

Je me relevai et sautillai sur place un court instant avant de porter mon regard sur la plaie. Superficielle mais douloureuse, la sang s'écoulait lentement, traçant un sillon écarlate sur mon bras. Je serrai ma main indemne et pris une inspiration pour tenter de garder le plus de sang-froid possible. J'écartai les doigts au maximum pour pouvoir exhiber ma paume. Grâce à mes ongles et à un peu de télékinésie, je réussi à ôter le débris. Ma conscience m'interdisait de refermer la plaie sous peine d'éveiller les soupçons de Sarah qui me regardait les dents serrées.

- Ça fait mal, grognai-je.

Elle s'avança et prit ma main dans les sienne pour examiner la coupure. Je la regardais faire sans broncher. Nos yeux se retrouvèrent quelques secondes après. Ses joues virèrent au rouge et je lui déposai un baiser sur le front.

- Eh ! Vous êtes où ? La vaisselle ne va pas se faire seule ! résonna la voix de May depuis la cuisine.

Sarah porta la main à sa bouche. Nous avions complètement oublié la vaisselle…

- Merde, pouffa-t-elle.

Je ris légèrement et retournai à la cuisine, le bol plein de débris dans les mains. Je versai son contenu dans la poubelle en prenant soin de ne pas en mettre à côté pendant que May raccompagnait Elya à l'entrée en la gratifiant d'un accolade et de quelques formules de politesse. Il était temps pour notre amie de rentrer chez-elle.

- Dis Tess, commença Mike, ton père rentre quand déjà ?

- Demain après-midi. Si c'est parce que vous restez dormir ici, ne vous en faites pas, il le sait.

- Non c'est pas ça…

- Quoi alors ?

- Il a bien une Toyota grise ?

Je commençai à bouillir avec ses questions inutiles. Je tapai du plat de la main sur l'évier. May me lança un regard en biais.

- Va droit au but Mike !

Il sursauta et au même moment, Sarah demanda :

- Alors elle est à qui cette voiture noire ?

May et moi nous précipitâmes à la fenêtre comme un seul homme. Je ne pus retenir un hoquet de surprise en voyant l'engin foncé garé dans notre allée. Ma sœur me coula un regard puis chuchota :

- On se casse. Maintenant.

Elle me tira par le bras, entraînant Mike et Sarah par la suite.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? C'est qui ? s'affola Mike.

Je repris mes esprits et tirai d'un coup sec sur le bras de mon ami pour lui intimer le silence.

Nous nous agenouillâmes au sol avant que je prenne la parole d'un air confiant :

- Ok, on va passer par la porte arrière et prendre la Huitième Rue pour se rendre sur le parking où il y a la deuxième voiture.

- Ton père a deux voitures ? s'enquit le garçon.

- Mike, c'est pas le moment là ! gronda ma jumelle.

Je remerciai ma sœur et attendis l'approbation de Sarah pour m'assurer qu'elle suive bien. Cette dernière avait les sourcils froncés et le regard assombri. Elle demanda :

- Pourquoi on s'enfuit ? Tu veux bien m'expliquer ?

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