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Chapitre 4

Je suis entrain d’attendre ma grand-mère. Oncle Abeke a du aller la chercher car elle n’est malheureseument pas véhiculée. Je suis en train de donner à manger à ma petite sœur Chinere qui, à mon plus grand malheur, est assez grincheuse avec moi. Mais que voulez vous ? Je suis la seule personne capable de m’occuper d’elle. La dernière femme de la maison pouvant s’en occuper se trouve être devenue folle. Pauvre Margaret !

Ce jour à la rivière, j’ai du aller chercher oncle Abeke loin dans la foret, afin qu’il prenne une décision pour Margaret. Ils a décidé qu’il était mieux de l’emmener en ville pour la conduire dans un hôpital. Un hôpital pour personne mentalement déséquilibrées ? C’était la première fois de ma vie que j’entendais cela, j’ignorais même si cela existait, mais je n’avais rien à redire car le plus important pour moi était que ma sœur se fasse soigner.

Il l’a donc transportée jusqu’à la capitale et en a profité pour passer chez nos grands parents. Ils se sont dit que c’était beaucoup mieux que nous allions vivre là-bas en attendant que Chinere soit assez grande. J’ignore ce que deviendra la concession de mon père, mais je n’ai pas le choix. Je me vois obligé de demander cet ultime service à mon oncle Abeke : s’en occuper jusqu’à mon retour.

Voyez-vous ma vie est au point mort et je me retrouve avec des responsabilités auxquelles je ne m’attendais pas le moins du monde. Hier encore, j’ai failli faire une attaque en constatant que Chinere n’était pas dans la chambre au milieu de la nuit. Je l’ai retrouvée dans la cuisine en train de grignoter de la banane plantain. Avec tous les décès et les disparitions des membres de ma famille, je deviens un tout petit peu, non disons un peu trop méfiant et craintif à l’image de Love. Mais qui ne le serait pas dans ma situation ?

Je suis en train de lui passer un boubou lorsque La voix de mon oncle retentit dans la salle principale de notre maison. Je finis rapidement ma besogne et nous nous y rendons. Nous trouvons Ekaette (grand-mère paternelle) à ses côtés :

Ekaette émue : Akin, Chinere, mes enfants !

Moi : Bienvenue Ekaette !

Ekaette en ouvrant ses bras : Venez mes enfants !

Chinere : Ekaette, Ekaette !

Ekaette : Tu as grandi hein !

Moi : Comment était ton voyage ?

Ekaette : Ça va, ça va, je suis trop vieille pour tout ceci. Vous avez fait vos bagages ?

Moi : Oui !

Ekaette : Bon nous repartirons dans trois jours, Je dois me reposer. J’ai un client qui passera par ici et pourra nous excorter jusqu’à la maison.

Moi : Ok !

Oncle Abeke en rentrant avec des provisions : Mama, où dois-je mettre tout ça ?

Ekaette : Déposes les là, à côté de la porte !

Oncle Abeke en s’exécutant : Je dois aller chez moi, tu sais que ça fait des jours que me femme ne me voit pas…

Ekaette : Vas-y ! Tu as assez travaillé comme ça.

Il nous laisse à trois dans cette maison qui nous parait désormais trop grande pour deux. J’ai pris la liberté préparer la chambre de Love pour qu’Ekaette puisse se reposer. J’ignorais s’il aurait été bien pensé de lui apprêter la chambre des parents alors j’ai choisi cette chambre. Je l’aide à s’installer, Chinere dans les jambes et nous discutons gaiement de son voyage, oubliant ainsi les turpitudes du moment.

Lorsque le soleil s’enfuit derrière les arbres de notre précieuse forêt, laissant ainsi place à l’obscurité du soir, nous sommes assis devant la maison et je lui explique les derniers événements. Oncle Abeke ne semble pas lui avoir dit grand-chose sur Love et Margaret, préférant peut-être que je m’en charge moi-même. Je me rappelle bien de ce qu’il m’avait dit au décès de mon père : “maintenant c’est toi l’homme de la maison, tu ne dois pas pleurer car tes épaules doivent être la force de la famille. Tu devras prendre les bonnes décisions. Tu n’as pas le temps de pleurer.”

Oui je me rappelle bien de ses paroles réalistes bien qu’un peu dures à mon avis. A vrai dire, je n’ai pas vraiment compris où il voulait en venir, mais je l’ai gardé en tête. C’est donc avec le plus de retenue possible que je relate les derniers événements à ma grande mère paternelle. Elle en a les larme aux yeux et j’en viens à me demander lequel de nous deux devrait consoler l’autre, car moi aussi, au plus profond de moi, je ressens une peine sans pareil. Perdre presque tous les membres de sa famille en si peu de temps, c’est tout simplement abominable.

Ekaette : Il est tard maintenant, il faut que tu ailles te coucher.

Moi : Et toi ?

Ekaette : J’attends ton oncle, il repassera dans peu de temps.

Moi : Mais il sera là demain.

Ekaette : Je sais, mais je veux vraiment le faire ce soir. Vas te coucher mon enfant !

Moi : Bonne nuit Ekaette !

Ekaette : Bonne nuit Akin !

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Ekaette : Attention Akin, tu vas te salir.

Moi : Pardon

Ekaette : Tu devrais montrer le bon exemple à ta sœur.

Moi : …

Ekaette : Déposes ça ici, tu vas être en retard si tu traines trop.

Moi gaiement : Ok a toutes !

Ekaette en souriant : Tu parles déjà comme les jeunes d’ici ?

Moi tout fièrement : Je grandis Ekaette, c’est normal. Chinere qu’est ce que tu fais ?

Chinere : J’arrive.

Moi : Dépêches toi !

Ekaette : Oui dépêchez-vous !

Nous sortons précipitamment de la maison de notre grand-mère paternelle. J’ai la charge d’accompagner et d’aller chercher Chinere à l’école. C’est une tache que j’apprécie car j’aime mon rôle de grand frère.

Quelques temps après notre arrivée ici, et surtout après quelques parerasses pour changer d’école, j’ai obtenu l’admission pour le collège ITEM. C’est là que j’apprends désormais et mes résultats ne sont pas si mauvais que ça. Ekaette vend des légumes et son grand frère avec lequel elle vit ici, Papa Din, fait du commerce non loin d’ici. Ils vend le la viande de brousse, viande bien évidemment chassée par deux hommes plus jeunes. J’ignore comment ils procèdent mais cette activité leur rapporte un peu de sous et c’est suffisant pour nos besoins ici. Nous mangeons au moins une fois dans la journée, allons à l’école et dormons en paix.

La vie a repris son cours d’une drôle de manière mais et je suis satisfait de vivre ici avec Ekaette qui, bien que sévère, est une grand-mère aimante. Mais pour Chinere, c’est une autre histoire. Plus elle grandit, plus elle a du mal à s’accommoder de la situation. Tous ses camarades ont des frères et sœurs, des parents, ce qui n’est pas notre cas. Souvent j’essaie de lui expliquer que ce genre de choses arrivent à beaucoup de personnes et qu’il faut être fort, mais comment demander a une petite fille de s’habituer à l’absence de ses parents ? Même moi je n’arrive pas à m’y faire. Je suis là pour elle, Ekaette aussi, mai c’est difficile, très difficile.

Après avoir déposé Chinere, je me dirige vers mon établissement. Je n’y connais pas grand monde. A vrai dire, je ne connais rien d’Abia, la province dans laquelle je vis, mais petit à petit je commence à découvrir. J’ai perdu de vue tout le monde, Aunty Nadia et Margaret. Tout ceux qui étaient plus ou moins proches de nous se sont volatilisés comme par enchantement, le seul que je vois par moment c’est oncle Abeke qui me rassure toujours sur le fait qu’il s’occupe bien de notre terrain. En vérité, tout ce qui nous arrive me prouve bien que cela ne sert à rien de s’attacher trop profondément à quelqu’un.

_ : Bonjour Akin, comment vas-tu ?

Moi : Je vais bien John merci

John : Tu es encore arrivé très tôt.

Moi : C’est parce que je me lève également très tôt.

John : Mais dis moi, depuis qu’on se connait tu ne m’as jamais dit où tu vivais.

Moi : Pas très loin, c’est à 30minutes d’ici.

John : Ah ! Je vois.

Moi : …

John : Nous prévoyons de manquer le cours de mathématiques, il y a un nouveau bistro pas loin d’ici. Ce serait bien d’y faire un tour.

Moi : Vous pouvez y aller après le cours non ?

John : Non on ne peut pas, c’est a l’heure du cours de maths que c’est intéressant a ce qu’il paraîtrait.

Moi : Ok

John : Tu viens ?

Moi : Non je préfère rester ici.

John : Tu sais que les autres disent que tu es arrogant ?

Moi : Comment ?

John : Tu ne parles avec personne, tu ne fréquentes personne, bon à part moi bien sûr. Tu ne sors jamais avec tout le monde, tu restes dans ton coin. Et tu es comme ça depuis le début.

Moi : …

John : Crois moi tu pourrais t’attirer des ennemis dans l’établissement.

Moi : Mais qu’ai-je fait ?

John : Bon viens avec nous et tu verras.

Moi : non je ne peux pas.

Las d’essayer de me convaincre, il s’en va. Les cours passent lentement et comme prévu, une bonne partie de la classe prend congé à l’heure de mathématiques. La raison est simple, ce professeur revient d’un autre pays, il est arrivé cette année et doit faire ses preuves. Il me fait penser à moi à mon arrivée, essayant de m’adapter à mon nouveau milieu. La proposition de John ne me dit rien du tout, ils ont peut être des raisons d’être aussi si peu soucieux de leur avenir, mais pas moi, moi je dois me battre, la vie n’est pas facile.

Les choses se déroulent assez bien, je me fais de plus en plus de connaissance au fil des mois, même si je ne participe pas forcément à leurs activités. J’ai de très bons résultats à l’école, pour le plus grand plaisir de Ekaette qui m’encourage toujours avec des présents de différentes qualités. Cela n’a rien de très coûteux mais ça a beaucoup de valeur à mes yeux.

Chinere aussi se débrouille bien à l’école même si Ekaette a déjà reçu beaucoup de plaintes sur son côté distrait à l’école. Il semblerait qu’elle ait du mal à suivre son maître pendant plusieurs minutes. Il arrive toujours un moment où elle se met à cœur de perturber le cours. J’ai du la corriger deux fois à cause de cela mais elle ne semble pas vouloir se calmer. Ce serait vraiment dommage qu’elle ait des problèmes avec ses enseignants, surtout maintenant. A part ce petit détail fâcheux, tout va pour le mieux chez nous. J’en viens à espérer à nouveau, à penser que peut-être, enfin, je pourrais m’épanouir. C’est bien mérité après autant d’épreuves…

Alors que je suis en train de nettoyer la cours des feuilles indésirables, je ressens le besoin de me désaltérer. Le regard de mes grands parents pendant que je passe me fait me poser des questions. Depuis un moment ils murmurent beaucoup en ma présence ou lorsqu’ils pensent que je ne les suis pas. Ekaette ne va plus vendre et papa Din reste toute la journée dans la chambre et en sort juste pour prendre de l’air dehors avant de retourner se coucher. Je me dis qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Étant habitué à ce genre de situations, je ressens comme un air de déjà vu. Voilà pourquoi, lorsque Ekaette me fais assoir en face d’eux afin de me parler d’un truc important, cela ne m’étonne pas vraiment. Je pose mon verre non loin de là et dispose mes oreilles pour ce qui va suivre.

Ekaette : Akin !

Moi : Oui Ekaette !

Ekaette : Tu sais, aller doucement n’empêche pas d’arriver mon enfant.

Moi : Je ne comprends pas Ekaette !

Ekaette en soupirant : Tu as sûrement remarqué que ton oncle ne va plus au travail.

Moi : Toi aussi Ekaette tu ne vends plus.

Ekaette : Ah…

Moi : …

Ekaette : Il faut savoir que nous sommes dans une situation difficile. Les hommes qui travaillaient avec lui ont pris tout son argent et se sont enfuis. Tu sais qu’il n’est plus tout jeune. Il ne peut plus aller en foret seul et ne peut donc pas apporter du gibier pour vendre.

Moi : C’est terrible. Mais pourquoi ne voit il pas d’autres jeunes pour ça ?

Ekaette : parce qu’il n’a plus confiance et qu’il est découragé.

Moi : …

Ekaette : Moi j’ai des problèmes avec ma petite plantation, elle ne donne presque plus. Le peu que je recueille est à peine suffisant pour nourrir les gens de cette maison.

Moi : Mais Ekaette, c’est grave.

Ekaette : Oui c’est vrai. Mais il y a plus grave mon enfant. C’est vraiment difficile pour moi de l’avouer aujourd’hui mais tu es fort maintenant et tu sais désormais résister aux attaques de la vie. J’aurais voulu régler ce problème seule mais je ne peux pas et je ne peux plus te cacher ça puisque cela te concerne directement. Tu es assez grand pour savoir et comprendre.

Moi anxieux : Quoi donc Ekaette ?

Ekaette : Tu apprends très bien. Tu as fait trois ans sans faute et tes résultats sont vraiment bons. Mais la situation actuelle ne nous permet plus de suivre tes études.

Moi craintif : Je…Je ne comprends pas.

Ekaette : il va falloir que tu arrêtes les cours à la fin de l’année parce que nous ne pouvons plus payer ça.

Moi : Mais… et Chinere ?

Ekaette : Elle aussi devra arrêter.

Moi : Non, c’est faux. Nooooon c’est faux !

Comment une telle chose peut nous arriver ? Et dire que nous étions déjà sortis du trou… Comment ?

Comment ?

À suivre.

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