Chapitre 5 : Humiliation
— Tu... ! s’offusqua la femme d’une voix tremblante de colère. Pour qui te prends-tu ? Si tu n’étais pas le second fils des Chevotet, je n’aurai jamais jeté mon dévolu sur toi. Tu n’es seulement qu’un handicapé. Et pourtant, tu m’as repoussé, et voire à plusieurs reprises !
Yves, victime de ces injures, devint soudainement froid et extrêmement hostile. Quand la femme voulut l’insulter davantage, elle fut stupéfaite par la mine changée d’Yves, qui devint brutalement plus menaçant. Regardant les yeux de cet homme, elle ne put qu’arranger un peu sa tenue avec colère, et lui lancer avant son départ :
— Tu vas voir ; je te ferai me supplier à genoux tôt ou tard !
A l’entendre, Lisa avait l’impression d’avoir accidentellement flairé un secret. La femme ne remarqua même pas sa présence juste à ses côtés. Avant de partir, elle réitéra à Yves Chevotet :
— Yves ; tu verras ! Je te ferai me supplier à genoux, tôt ou tard.
Ayant fini de prononcer ces mots, elle les délaissa. Après son départ, il ne restait plus que Lisa et Yves, sur les lieux. Lisa Maret, était toujours assise sur le sol froid, et ne sut pas où regarder, par embarras.
— Je t’ai sous-estimée. Déclara Yves quelques instants plus tard.
Il posa son regard froid et perçant sur la tête de Lisa Maret. Cette dernière releva machinalement la tête et bafouilla :
— Je n’ai ...je n’ai rien entendu !
— Comme elle, va-t’en ! balança soudainement Yves.
Lisa fronça les sourcils puis rétorqua :
— A partir d’aujourd’hui, je suis ton assistante, que cela te plaise ou non ! (Elle garde une seconde de silence.) N’est-ce pas toi qui as demandé à ce qu’on m’indique le chemin menant à l’entreprise ? Donc, je suppose que tu vas te faire à ma présence.
Après ces propos, elle se leva du sol, puis se dirigea vers Yves, pour venir se tenir derrière lui. Ensuite, elle posa ses mains sur le dossier du fauteuil roulant de ce dernier.
— Je suis déjà sur place, alors tu dois maintenant respecter tes engagements.
Avant qu’il ne réponde, elle le poussa à l’intérieur, et ajouta :
— Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?
Yves ne lui répondit pas, mais son air devint imposant.
— Il semble que tu ne saches vraiment pas chérir ta vie, toi ! Ricana-t-il.
A sa réflexion, Lisa se pinça les lèvres avant de rétorquer :
— Ce n’est pas par choix que je suis devenue ton assistante. C’est ton grand-père qui me l’a plutôt demandé, et je ne pouvais lui dire, non.
— Donc, tu comptes m’imposer par force ta présence, en utilisant mon grand-père comme prétexte ?
— Puisque je suis aussi une victime, à quoi bon dire cela ?
Elle jeta alors un regard sur le bureau de ce dernier, et remarqua qu’il était un peu en désordre. Même certains documents étaient éparpillés sur le sol.
« Sûrement l’œuvre de la femme qui vient de partir » devina-t-elle par-devers soi.
Pensant à cela, elle s’avança vers le bureau, puis s’agenouilla pour ramasser les dossiers, et ensuite mettre de l’ordre sur la table.
Yves la regarda faire, et ses yeux s’assombrirent. C’est ce moment-là que choisit Bastien, pour faire son entrée dans la pièce.
— Monsieur Chevotet, la réunion commencera dans cinq minutes. L’informa-t-il, avant de se rendre compte de la présence de Lisa.
A la vue de demoiselle, Bastien se figea un peu, car il ne s’attendait pas à ce qu’elle réussisse à arriver à l’entreprise. Yves voulant demander à Bastien de pousser son fauteuil roulant pour partir, se ressaisit, quand une idée lui vint soudainement en tête.
— Tu veux être mon assistante ; alors je te donne la chance d’en faire tes preuves ! annonça-t-il à Lisa.
***
Dans la salle de réunion, quand Lisa entra à la suite d'Yves, son apparence surprit tout le monde. Le petit monde présent dans la salle, savait qu’Yves avait seulement Bastien à ses côtés comme assistant. Alors, le voir maintenant débarquer avec une femme de plus à ses côtés, suscita leur curiosité sur l’identité de cette dernière.
Certes, Lisa avait déjà travaillé par le passé en tant qu’assistante, mais elle n’avait jamais vu tant de monde dans une salle de réunion. Et, il faut reconnaitre que la salle de réunion du groupe Chevotet est tellement grande, qu’elle est à la hauteur de ce dernier en tant que groupe leader de la Cité du Nord. Dès qu’elle y entra, Lisa sentit une pression qui lui fit baisser ses épaules inconsciemment. Elle suivit Yves et Bastien, puis se tenait sous le regard de tout le monde.
— Yves ; qui est-ce ? taquina Brunoi Chevotet, son frère.
Lui aussi participa à la réunion en tant que vice-président du groupe, et il était un peu surpris de voir son frère y venir avec sa femme. Lisa était si nerveuse, qu’elle serra le pan de son vêtement, pour se calmer. Puis quelques secondes plus tard, quand elle releva lentement la tête pour affronter le regard de tout le monde, elle aperçut un regard doux ; celui de Brunoi. Lisa et Brunoi se dévisagèrent un moment, avant que ce dernier ne lui adresse un hochement de tête, accompagné d’un doux sourire. Suite à cela, Lisa sentit qu’elle n’était plus à ce point tendue qu’avant, puis se pinça les lèvres en lui souriant en retour. Elle avait l’impression que Brunoi était vraiment une personne douce et gentille.
Pendant ce temps, Yves ne manqua pas de surprendre toutes leurs interactions. Son regard devint aussitôt froid, et il plissa ses yeux perçant avant de finalement déclarer :
— Une soignante !
— Quoi ? s’étonna Brunoi.
Tout le monde parut confus, et ne savait pas de quoi il parlait, y compris Lisa.
— Yves, qu’est-ce que vous venez de dire la concernant ? demanda l’une des personnes présente dans la salle.
Les yeux d’Yves étaient sombres avec un regard profond. Il haussa légèrement les sourcils et répondit :
— Je dis qu'elle est la soignante que mon grand-père m’a attribuée. Réaffirma-t-il. Elle s’occupe de ma vie quotidienne.
Ces mots durs firent pâlir Lisa, et celle-ci baissa les yeux pour le regarder. Elle se demanda pourquoi il la traita de soignante privée, alors qu’elle est ici présente en tant qu’assistante.
— Café. dit-il froidement à son attention, ce qui l’a ramena à la réalité.
Elle ne bougea pas, jusqu’à ce que Bastien lui fasse un clin d’œil subjectif. Alors, elle comprit où Yves voulait en venir.
« Bon ; préparer un café, fait aussi partie des tâches d’une assistante. » Pensa-t-elle, avant de sortir directement de la salle de réunion, pour aller en préparer un.
Quand elle revint dans la salle avec le café, la réunion avait déjà commencé. Alors, elle se contenta de le placer devant Yves. Ce dernier en prit une grande gorgée, puis fronça les sourcils de suite.
— Veux-tu que je meurs d’une surdose de sucre ? grommela-t-il.
Bastien pâlit immédiatement en entendant cela.
— Yves ne bois jamais du café avec sucre. Informa-t-il Lisa.
— Change ! ordonna Yves.
Lisa n’avait pas d’autre choix que d’obtempérer à sa demande. Alors, elle retourna préparer une autre tasse.
— Il n’a pas de goût ! se plaignit-il quand elle revint avec une autre tasse de café. Change encore !
Puis, elle retourna encore, en faire un autre.
— Il n’y a pas assez d’eau ! l’accusa-t-il cette fois.
Et ce fut ainsi tout le long de la réunion. La salle de réunion est l’endroit choisit par Yves, là où il a décidé de la ridiculiser publiquement. Lisa était morte de honte sous le regard de tout ce monde, braqué sur elle. A un moment, elle fut même tenter de se venger en renversant le café sur la tête d’Yves, tout en lui balançant au visage, qu’elle rendait son tablier. Mais penser à ce qui arriverait à ses parents, si elle osait une telle incartade, la refroidit sur le coup, dans son plan machiavélique. Elle essaya alors de se ressaisir, et ressortit de nouveau pour aller préparer une énième tasse de café.
***
Boum !
Tel est le bruit qui résonna, quand Yves posa avec fracas, son énième tasse de café sur la table. Tout le monde en fut même choqué.
— Tu veux être ma soignante, alors que tu n’es même pas fichu de préparer correctement du café ? la sermonna-t-il.
Lisa resta clouée sur place en pâlissant. Brunoi, assis un peu plus loin, fronça légèrement les sourcils, face à l’attitude de son frère. Après avoir assisté à ce qui s’est passé, il ne put s’empêcher d’intervenir :
— Yves ; tu dépasses les bornes ! lui fit-il le reproche.
Yves tourna son regard dans la direction de Brunoi.
« Alors maintenant, il prend sa défense en me réprimandant devant elle ? Il semble que cette femme soit bien forte et rusée. », pensa Yves.
Le sourire sur ses lèvres à cet instant, devint de plus en plus froid.
— Brunoi, cela t’a-t-il fait mal au cœur ? railla-t-il. Alors, ça te dirait que je te la donne ?
Brunoi ne releva pas le sarcasme de son frère, et se contenta plutôt de garder le silence. Lisa face aux allusions d’Yves, se mordit la lèvre inférieure d’énervement. Elle était tellement colère jusqu’au bout de ses doigts.
« Une attitude pareille de sa part, était inacceptable ! » bouda-t-elle en silence.
Elle comprit enfin pourquoi Yves avait soudainement accepté qu’elle reste. C’était juste pour avoir le plaisir de l’humilier !
« Aux yeux d'Yves, je dois être une femme vénale qui se marie uniquement pour de l’argent, et dans le but d’avoir un statut privilégié ; raison pour laquelle il me déteste tellement. » pensa-t-elle.
— Yves, pourquoi un tel comportement ? voulut savoir Brunoi. Après tout, elle est...
Avant qu’il ne puisse prononcer les mots « ta femme », Yves l’interrompit froidement :
— On demande à ma soignante seulement de préparer un bon café. Ce n’est pas trop demandé ; n’est-ce pas ?
Brunoi sembla vouloir la défendre davantage. Alors, Lisa se pressa d’intervenir, au risque qu’il ne dise quoi que ce soit d’autre.
— Je vais lui en faire un autre ! déclara-t-elle, en prenant la porte, la tasse de café en main.
Un, deux, trois tasses de café ; et c’est ainsi qu’elle fit des va-et-vient durant toute la réunion. Et toujours, Yves était insatisfait des cafés qu’elle lui servit. Elle ne se plaignit pas, et continua de lui apporter encore et encore de nouvelles tasses, jusqu’à la fin de la réunion.
Même Bastien à un moment, eu pitié d’elle. Donc dès que tout le monde quitta la salle de réunion, il se pencha à l’oreille d'Yves puis lui chuchota :
— Maître ; sinon, on peut laisser tomber ? Je pense que ça suffit déjà comme ça pour elle.
Yves ricana avant de déclarer :
— Pour des femmes vaniteuses de son genre, c’est ainsi qu’il faut les traiter, pour pouvoir les chasser.
Il voulait tester la patience de Lisa, et voir jusqu’à quel point, elle pouvait le supporter.