Résumé
CROSSED DESTINIES PROLOGUE Enfant à l’intelligence au-dessus de la moyenne, esprit particulièrement sémillant et à la beauté subliminale, ANTONIA MARIA est l’avant-dernière d’une fratrie de onze : une famille nombreuse comme on en trouve si souvent en Afrique ; la richesse d’un homme se mesurant aussi par la taille de sa progéniture. Son dynamisme et sa vivacité intellectuelle étaient telles qu’elle ne passait pas inaperçue. C'était une identité remarquable. Sa disponibilité, sa joie de vivre, davantage son humilité et sa serviabilité, c’est-à-dire sa propension à porter spontanément secours à autrui, à exécuter de bonne grâce, toute tâche à lui confiée par un aîné quel qu’il soit, étaient des arguments péremptoires, qui avaient permis de dégager le consensus, autour de sa gentillesse et de sociabilité légendaires. Les personnes qui vivaient avec elle et celles qui côtoyaient sa famille au quotidien ou de manière intermittente, étaient unanimes qu’elle était atypique, unique en son genre, une véritable clef de voûte, en comparaison, au comportement désobligeant qui était l’apanage de nombre de jeunes de son époque. En effet, son éducation s’était construite sur des bases saines, fort d'un encadrement et d'un suivi adéquats de ses parents, qui avaient rempli leur office de fort belle manière à cet égard. De par cette exemplarité, elle était très appréciée, pratiquement adulée dans son milieu de vie. Toute chose qui ne lui aliénait pas que des sympathies; des esprits envieux et paumés étant légion dans notre société. Malgré une petite enfance relativement gaie et paisible, elle avait tôt fait d’expérimenter les affres, mieux, les vicissitudes, c’est-à-dire la dure réalité de la vie. Alors qu’elle n’était encore qu’une gamine, alors que ses épaules étaient encore toutes menues, trop frêles, pour en encaisser les coups durs, c’est-à-dire, absorber la pointe des tribulations de l’existence, elle avait subi de plein fouet la cruauté de la vie dans sa dimension la plus implacable. D’abord le décès subit de son père, le nommé Clément Richard. Homme très entreprenant et pieux, il avait réussi à se hisser en véritable catalyseur du développement socio-économique de son terroir ; notamment à travers son fort investissement agro-pastoral, commercial et dans le domaine de la mode. En tout état de cause, les revenus générés par sa panoplie d’activités, étaient largement suffisants, pour faire face sans encombre, aux besoins de sa famille nombreuse, qui, force est de le relever, était bien lotie. Le décès tragique de ce pilier de la famille, son chef en l’occurrence, a contraint la génitrice d’Antonia Maria, la nommée Veronica à revêtir son treillis, pour essayer tant bien que mal de maintenir la famille à flot, de reprendre le flambeau. En dépit de sa grande bravoure et de son courage admirable, il lui sera difficile de maintenir le cap, notamment pour ce qui est de la scolarisation de sa progéniture. Les choses iront même en vrille. Cette situation dramatique, sera accentuée par les décès successifs de deux des frères d’Antonia Maria et de sa jeune sœur dans des circonstances troubles. Funeste destin qui pèsera sur elle comme une chape de plomb tout au long de son anecdotique et tumultueux périple terrestre. Antonia Maria vous conduit dans les méandres de crossed destinies: incursion exploratoire dans les arcanes de sa vie, récit de son histoire.
CHAPITRE I
CROSSED DESTINIES
CHAPITRE I
ANTONIA MARIA: Moulée selon les fondamentaux c'est-à-dire les canons stricts de la tradition africaine, où les valeurs cardinales d'entraide, de solidarité et de respect dû aux aînés ont pignon sur rue, j'ai passé, comme la part belle de mes congénères, le clair de ma tendre enfance, aux côtés de mes parents. Ce, naturellement, au milieu de la fratrie forte de plusieurs âmes, au sein de laquelle, il m'a été donné de naître. Mes parents attachaient du prix à prendre personnellement soin de leurs enfants et à assurer eux-mêmes leur l'éducation. Ils l'avaient sanctuarisée, et avaient en horreur qu'un proche, ou alors que quidam, interfère dans ce volet, ô combien névralgique de la formation d'un homme, de la construction d'une valeur sociale sûre, qui, selon leur aveu, mieux, d'après leurs propres dires, relevait de leur chasse gardée, des missions ''régaliennes'' parentales. Ils avaient donc fait, contrairement aux usages et à la pratique répandue à l'époque, de la garde personnelle de leur progéniture leur cheval de bataille, aucune immixtion ne pouvait y être tolérée. Ils ne concédaient même pas, que nous passâmes nos vacances, en dehors du giron familial, dans son sens le plus strict, c'est-à-dire en dehors de la maison familiale.
Pourtant, des sollicitations de nos oncles et tantes dans ce sens, étaient légion. En tout état de cause, consentir que ses enfants soient pris en vacances par un membre de la famille, était un fait, une pratique coutumière de cette époque-là : les enfants passaient la période de classes avec leurs géniteurs, et pendant les vacances, ils allaient chez des proches parents pour changer d'air, voir d'autres horizons. Ces derniers faisaient également pareil avec leur progéniture. Ça permettait à ceux qui avaient pour lieu de résidence permanente la métropole, de découvrir la campagne, de s'imprégner de son fonctionnement et de ses pratiques et vice-versa. Cela participait de la formation intégrale de l'homme. Généralement, le mode opératoire, était le chassé-croisé, parfois aussi, on s'arrangeait à ce que les enfants aillent chez tel oncle ou tante, avant de se rendre chez tel autre, tous au même moment. Cela, à l'effet de permettre à ces derniers, de mieux se connaître et de resserrer les liens de fraternité, de solidarité et d'amour entre eux. Nos parents préféraient plutôt accueillir leurs nièces et neveux à la maison. Pour ne pas nous laisser partir, ils usaient de subterfuges et d'artifices de tous ordres. Ils étaient particulièrement imaginatifs et astucieux lorsqu'il s'agissait de trouver une bonne excuse à cet égard. La plupart de temps, ils mettaient en avant la capitale nécessité de notre présence à leurs côtés, pour que les travaux dans les exploitations agricoles puissent se dérouler sans encombre. Ils prétextaient toujours que, les travaux champêtres, subiraient le contrecoup de notre absence, si on était appelés à partir. Les membres de la famille demandeurs, le leur concédaient à leur corps défendant. Quand bien même, par extraordinaire, il arrivait, après insistance d'un oncle, que les parents laissent partir l'un de nous, c'était tout au plus pour une semaine. Ce qui sortait fondamentalement des sentiers battus. C'était même, quelque peu erratique, car, il était consacré à cette époque-là que, l'enfant était celui de la communauté, chaque membre de cette dernière devait jouer sa partition, pour que son éducation soit réussie. Il était donc solvable, que les carences éducationnelles d'un enfant, soient compensées par la communauté. Toutefois, cette démarche était inconcevable pour nos parents, elle se situait aux antipodes de leur conception de l'éducation. Ils estimaient être suffisamment outillés, pour accomplir eux-mêmes, selon les règles de l'art, cette mission de premier plan de tout parent. Si d'autres personnes devaient venir à leur rescousse sur ce plan, si on devait leur y prêter main forte, c'est qu'ils avaient échoué. De leur point de vue, les défaillances constatées dans l'éducation d'un enfant, ne pouvaient être que le fait du laisser-aller de ses parents, qui n'avaient pas su prendre le problème à bras-le-corps, c'est-à-dire intégrer la pleine mesure de toute la ressource et l'énergie à déployer pour la réussite de ce pan ô combien sensible de la formation d'un homme. Qui plus est, c'était très avilissant, que cela fut constaté par d'autres personnes, qui, par la force des choses, se sentirent l'obligation d'intervenir, pour colmater les brèches, afin que les choses ne furent pas définitivement allés en vrille.
Pour mon père, le nommé Clément Richard:Il est des domaines réservés, dont celui de l'éducation des enfants. Elle ne doit pas être laissée entre des mains inexpertes. Le seul tandem de mise de mon point de vue, pour mieux affiner ce pan majeur de l'édification de la personnalité d'un homme, c'est celui parents-enseignants, c'est la combinaison consacrée, le seul mélange homogène sur lequel on doive s'appuyer pour les besoins de la cause. Des interférences peu ou prou intempestives dans ledit domaine sont généralement contre-productives.
ANTONIA MARIA: Les parents étaient véritablement à cheval sur cette question, ils estimaient qu'il fallait lui porter toute l'attention nécessaire, pour qu'aucun raté ne s'y invitât. Il en allait de notre avenir. Maman y jouait un rôle central, notamment dans l'éducation de la jeune fille, car, en Afrique, une maxime populaire édicte que: ''Qui éduque une fille, éduque la société.
Enfants de paysans, nos parents étaient eux-mêmes paysans. Le milieu rural a donc été le terreau de construction de mon éducation, d'édification de ma personnalité. Son façonnage résolu s'est fait de façon méthodique et sans anicroche, c'est le cas de le relever. D'abord, en raison de tout le sérieux que mes parents y mettaient, de leurs grandes valeurs morales adossées sur une rigueur exemplaire, et d'autre part, étant entendu que ces derniers étaient issus de la même aire géographique. Ils étaient donc de culture commune. Toutes choses qui leur aliénaient certaines facilités en la matière. En effet, les parents étaient tous deux, originaires d'un Arrondissement de la Région du Centre-Cameroun, Département de la Mefou et Afamba, du nom de ESSE. Lequel était fort connu dans notre pays, en raison de la kyrielle de talents issus de ladite commune, mieux, de cette circonscription administrative (florilège d'esprits brillants), et ayant inscrit leurs noms en lettres d'or dans le macrocosme artistico-footballistique de la nation.
C'est le lieu de s'appesantir sur le catalyseur ci-dessus mentionné de notre éducation. La proximité, mieux, l'identité culturelle de nos deux parents, avait consacré leur idiome maternel commun, comme la langue de communication par excellence au sein de la famille. Pour mon père susnommé :
Clément Richard : La démarche la plus appropriée pour apprendre la langue de l'autre, c'est-à-dire celle d'emprunt, à l'effet d'en avoir la parfaite maîtrise, donc, de pouvoir la manier avec dextérité et grande aisance, repose sur la bonne appropriation préalable de sa langue vernaculaire (véhiculaire), donc son excellente maîtrise. C'est le socle même, la racine pivotante d'une formation bien menée, d'un apprentissage de qualité. Celui qui a a été initié dès sa plus tendre enfance à l'usage de sa langue maternelle comme moyen de communication, ou qui l'a eue pour base, et qui, malgré sa pratique régulière, pour ne s'y être pas investi de façon sérieuse, continue de la baragouiner, aura nécessairement de piètres performances, dans la pratique de la langue venue d'ailleurs. A cet égard, si vous aspirez à être des puristes des langues étrangères, soignez d'abord l'apprentissage de la vôtre. J'y attache du prix. En tous cas et en toutes hypothèses, c'est la voie royale pour être percutant dans les langues étrangères.
ANTONIA MARIA: Fidèles à leurs convictions et dans le droit fil du raisonnement de papa, nos parents s'étaient faits le devoir de nous enseigner dans toute sa profondeur, ses méandres et même ses arcanes, l'idiome maternel qui leur était commun. Nous en avons appris les subtilités et de nombreux dictons, lesquels étaient empreints de riches enseignements, donc sources de sagesse. Ces derniers ont apporté une contribution significative à notre perception du monde et des choses. Ça donc été la langue dans et avec laquelle nous avons grandi. Le moyen de communication attitré de notre milieu de vie. Pour la petite histoire, il arrivait très souvent, à l'effet de simplifier l'explication d'une notion et d'en asseoir la compréhension chez les apprenants, que certains de nos enseignants, qui avaient en partage notre idiome maternel, en firent recours, pour les besoins de la cause. La spécificité de cette époque-là, était que, dans les établissements scolaires, pour la plupart, les élèves étaient du même terroir, la langue du coin leur était donc commune. Et quand bien même, il y avait une portion congrue d'enfants venus d'autres coins du Cameroun, le processus d'assimilation était très aisée. En conséquence, la démarche bien que questionnable, mieux, quoique non conventionnelle, nous arrangeait tous, autant que nous étions. Ce mode opératoire s'était révélé très efficace. Après coup, nous pouvons affirmer sans ambages, qu'il avait permis d'obtenir des résultats fort satisfaisants. En général, Il était mis à contribution, lorsque l'enseignant avait affaire à un ou des sujet (s) à la comprenette difficile. Entre autres effets bénéfiques qu'il procurait, il y avait la facilitation du rapprochement entre les apprenants qui s'estimaient largués, d'avec leurs enseignants. Toute chose qui militait en faveur de la thèse de notre enseignant principal de l'époque selon laquelle : la pédagogie n'est pas linéaire. Dans sa pratique, elle peut nous amener à faire des détours, des crochets, à arpenter des sentiers sinueux. Le fondamental, au demeurant, étant qu'on parvienne au résultat escompté, qui reste et demeure, la compréhension de la leçon par l'apprenant. C'est ce souci, qui nous sert de boussole. Le message doit passer, l'enseignement doit être bien perçu et assimilé par l'élève. C'est d'ailleurs la finalité de la débauche d'énergie de l'enseignant, c'est ce qui justifie l'aéropage d'astuces et d'artifices qu'il est souvent contraint de déployer chemin faisant.
Il convient de relever ici que, la particularité du Cameroun, c'est qu'il a connu la tutelle conjointe de la France et de la Grande Bretagne, après la défaite, lors du second conflit mondial, de l'Allemagne, dont-il était la colonie. Aussi, les langues de ces puissances occidentales, ont été retenues par nos autorités, mieux, nous ont été imposées comme langues officielles d'égale importance (valeur). ''L'authenticité de la citoyenneté camerounaise'' dès lors, se mesurait par la capacité à s'exprimer convenablement dans lesdites langues, mieux, le citoyen camerounais digne de ce nom, ou alors le Camerounais par excellence, était celui qui s'illustrait par son bilinguisme. Toutefois, en raison de la singularité du contexte camerounais, où s'entrechoquent une multitude de cultures, c'est-à-dire un pays qui regorge plusieurs centaines d'ethnies donc autant de dialectes (langues nationales), l'avènement des deux langues d'emprunt issus de la colonisation, que sont le Français et l'Anglais, a permis de couper la poire en deux. Il aurait été bien difficile de dégager le consensus sur la ou les langue (s) de communication à instaurer ou à consacrer à l'échelle nationale, en dépit du partitionnement du pays en grands groupes ethniques et culturels, chaque groupe étant très attaché à son identité. Quelque part, cet avènement a été une bouée de sauvetage, car il a permis d'éluder un problème auquel on aurait pu être confronté, il nous a permis d'atteindre un certain équilibre, de construire une certaine cohésion à l'échelle nationale, notamment dans le domaine de la communication, et puis, de s'ouvrir au monde, qui est devenu un village planétaire, de jouer notre partition dans le concert des nations, le grand rendez-vous du donner et du recevoir. Ç'aurait été difficile de faire porter notre voix, si on était restés confinés dans nos langues nationales.
En raison de cet ''hybridisme culturel'' propre à notre pays, lequel, c'est le cas de le relever, n'entame en rien son unité (nous sommes unis dans la diversité), notre famille était plutôt bien lotie. Nos parents, tel qu'énoncé ci-dessus, avaient en partage les mêmes us et coutumes, avec en trame de fond, le même dialecte. Il ne s'était donc pas posé dans notre éducation, un goulot d'étranglement dû à une coexistence tumultueuse, ou alors à un dualisme ( choc) de cultures. Néanmoins, il est important de souligner que ce brassage culturel camerounais n'est pas nécessairement handicapant, il emporte même de nombreux avantages. A condition qu'un savant dosage d'éléments disparates en apparence soit fait, qu'ils soient bien imbriqués, c'est-à-dire, qu'un point d'honneur soit mis au parfait ajustement de ces derniers, à l'effet d'aboutir à l'équilibre souhaité entre les cultures qui s'affronteraient. Autrement, dans un souci d'équité, de préservation de l'harmonie familiale, donc de la concorde au sein du couple, par le ménagement des sensibilités des uns et des autres, en évitant que la langue maternelle de l'un des membres du couple soit mis au-devant de la scène, au détriment de l'autre, notamment dans les couples interethniques; les langues étrangères prennent généralement le pas sur celles locales. Mieux, on assiste à un effet d'éviction des premières sur les dernières. Toutes choses qui désouchent, mieux, déracinent, c'est-à-dire déconnectent les enfants de leur essence. Ainsi donc, ils restent étrangers à leur culture. En tout état de cause, ils sont généralement déconnectés de la réalité ancestrale, c'est-à-dire de leurs us et coutumes, la transmission de ceux-ci se faisant essentiellement par voix orale, au moyen du canal consacré qu'est la langue locale. Tout bien considéré, l'énonciation d'un concept chez les africains, ne garde tout son sens, c'est-à-dire sa signification profonde, que lorsqu'elle est faite en langue locale. L'interprétation ou la traduction dans une autre langue, en dilue généralement l'essence. Heureusement, les parents au fil du temps, ont su trouver le juste milieu pour préserver les acquis. Ils ont par ailleurs su déceler et réussi à mettre en lumière le bien fondé des mariages interethniques ou multiculturels, qui, force est de le reconnaître, en raison de leur profonde source d'enrichissement à tous égards, sont légion aujourd'hui. C'est d'ailleurs le pilier majeur, sinon l'un des piliers angulaires, de l'intégration nationale, de la promotion du vivre ensemble, donc de la cohésion nationale, indispensables pour l'édification sans nuages de la nation que nous avons en partage.