Chapitre 8 : J’ai mis quelque chose dans le potage

Dès que Xavier est parti avec Roland, Philippe entre.

Il regarde les marques de paume évidentes sur le visage d’Yves, puis il sort la pommade de la trousse médicale pour lui appliquer.

— Philippe, si je dis que je n’ai pas du tout frappé Roland, et que c’est lui qui a gratté toutes les blessures lui-même, le crois-tu ?

En regardant la porte d’où Xavier est parti, Yves demande soudainement.

Philippe ne lui répond pas directement, puis lui rétorque :

— Si je dis que M. Leroy est revenu cette fois pour vous, le croyez-vous ?

Yves secoue la tête :

— Je n’y crois pas.

Aujourd’hui, il n’est plus le garçon qu’il était avant. Alors comment peut-il encore avoir de l’espoir pour Xavier ?

— Ce n’est pas grave si vous ne le croyez pas, l’opération a été fixée et le meilleur chirurgien en prendra en charge. Veuillez-vous rassurer.

Après avoir rangé ses affaires, Philippe est prêt à partir. Toutefois, Yves tire ses manches.

Au lieu de regarder Philippe, Yves fixe ses yeux sur la bague dans sa paume et dit :

— Philippe, aide-moi, s’il te plaît. Je veux prendre un dîner d’adieu avec Xavier, nous deux seuls.

Philippe hoche la tête et l’accepte.

Du fait de l’insistance d’Yves, le dîner se déroule dans la villa.

Quand Xavier y entre, il voit Yves en tablier, travaillant dans la cuisine. Le voyant entrer, Yves lui sourit et crie doucement :

— Chéri...

C’est la première fois que Yves l’appelle ainsi, et c’est aussi la première fois que Xavier le lui permet.

Pendant ces trois ans, avant que Yves ne sache l’existence de Roland, il était comme ça tous les jours, et vivait comme une bonne épouse. Ses mains étaient toujours prêtes à faire des affaires domestiques pour Xavier. C’est dommage que Xavier ne l’ait jamais apprécié.

Aujourd’hui, la même situation.

Xavier s’assoit à la table et regarde le potage du poulet que Yves a mise devant lui. Il fronce les sourcils.

— Prends-en un peu. Nous nous sommes mariés depuis tant d’années, mais tu n’as pas goûté mes plats pour une seule fois.

Bien qu’il ait tout dire clairement à l’hôpital, Yves prend toujours obstinément le mot mariage.

— Ne t’inquiète pas. Après ce soir, j’accepterai la chirurgie, qu’elle réussisse ou échoue.

Quand il parle, il fixe ses regards sur Xavier, ses paroles lui rendent sensible. Xavier prend le potage et le finit d’une seule traite. Mais juste après, le corps souple d’Yves passe par son bras et s’assit sur ses jambes.

Xavier plisse ses yeux :

— Qu’est-ce que tu fais ?

— Cela ne se voit pas ? Je suis en train de te servir.

— Je n’en ai pas besoin.

— Mais j’en ai.

Yves dénoue la ceinture de Xavier et l’embrasse.

— J’ai mis quelque chose dans le potage. Ne t’inquiète pas. Cette fois, la dose est deux fois plus.

— Samson !

Rugit Xavier. Bien que son corps soit enflammé, ses yeux deviennent de plus en plus froids :

— Putain. Tu es tellement méprisable ! Tu me supplies ?

— Oui, ou tu peux me supplier de ne pas faire l’amour avec toi, ainsi tu peux rester fidèle à Roland !

Yves acte comme un hérisson. Ses paroles sont si blessantes que Xavier souhaite le battre.

Il balaye tous les plats et presse Yves sur la table :

— Tu le dois !

Etant complètement irrité par Yves, associé à l’effet médicinal, chaque action de Xavier est tellement violente qu’il le veut conduire à la mort. Yves reste en silence, même s’il se trouve trop mal. Il tend seulement son doigt devant Xavier et lui représente la bague avant de s’évanouir.

— Chéri, il l’appelle comme ça encore en soufflant, dis-moi. Quand tu m’as donné cette bague, tu m’aimais ou pas ? Même un petit peu...

La réponse de Xavier est indifférente :

— Jamais.

— Tant mieux, alors tu n’es plus triste.

Yves prononce soudainement ces paroles creuses.

Xavier fonce les sourcils et s’apprête à lui demander ce que Yves veut dire. Mais du coup il sent sur la paume de sa main, du liquide chaud, qui colle.

Il est surpris et vérifie immédiatement ce que c’est.