L'ombre du passé

**Chapitre 7 : L'Ombre du Passé**

Le mois suivant fut marqué par un enchaînement de petites victoires et de moments de doute. Emma continuait de se reconstruire. Son travail devenait chaque jour plus gratifiant. Elle avait su se faire une place parmi ses collègues, et même si les journées étaient longues, l’adrénaline de la nouveauté et la satisfaction de pouvoir subvenir à ses besoins étaient un baume pour son âme.

Cependant, l’ombre du passé restait accrochée à elle. Emma ne pouvait pas oublier ce qu’elle avait vécu, la violence, l’humiliation, la trahison. Et chaque fois qu’elle se surprenait à rire ou à profiter d’un moment de tranquillité, une petite voix intérieure lui rappelait que son bonheur était fragile. Ses enfants lui manquaient profondément, mais elle savait qu’elle ne pouvait pas les récupérer tant qu’elle n’avait pas une stabilité solide sur laquelle bâtir leur avenir. Pourtant, chaque nuit, son cœur se serrait à l’idée de ne pas savoir où ils étaient, ce qu’ils faisaient, et surtout si leur père continuait de les traiter comme il l’avait fait.

Une partie d’Emma se sentait coupable, toujours, de ne pas avoir su les protéger mieux. Mais l’autre partie, celle qui avait survécu à son mari, se battait avec une rage inouïe pour ne pas laisser le passé la submerger.

Elle repensait souvent à Gabriel. Il avait été d’une aide précieuse, mais elle ne pouvait pas s’empêcher de se demander ce qu’il attendait d’elle. Il était tellement gentil, prévenant, mais il ne semblait pas chercher à aller plus loin. Peut-être était-ce cela, un simple acte de bonté de sa part. Il l’avait poussée à se relever, à accepter ses peurs et à les affronter. Et même s’il ne le lui disait pas explicitement, il était clair qu’il croyait en elle. Mais la question persistait : et elle, croyait-elle encore en elle-même ?

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Un jour, alors qu’elle rentrait du travail, elle aperçut Gabriel dans le parc où elle passait souvent quelques instants pour se détendre. Il était là, assis sur un banc, regardant les enfants jouer au loin. Lorsqu’il la vit, il se leva et s’approcha d’elle, un sourire sur le visage.

« Tu as l’air épuisée, » dit-il, remarquant immédiatement son air fatigué. « Tu veux marcher un peu ? »

Elle hocha la tête, bien que la fatigue pesait lourdement sur ses épaules. Ils commencèrent à marcher ensemble, sans un mot au départ. C’était agréable de ne pas avoir à parler, juste à sentir la présence de l’autre. Mais au bout de quelques minutes, Gabriel s’arrêta, la regarda droit dans les yeux, et dit :

« Emma, il y a quelque chose que tu dois savoir. »

Elle tourna son regard vers lui, son cœur se resserrant légèrement. Il semblait sérieux, presque inquiet. Elle savait que la vie ne pouvait pas lui offrir seulement des moments de calme et de répit. La souffrance était toujours là, prête à surgir, à se rappeler à elle dans les endroits les plus inattendus.

« Quoi ? » demanda-t-elle, son ton un peu plus ferme.

Gabriel sembla hésiter, comme s’il pesait ses mots. Puis il se lança, d’un ton calme mais direct :

« Je ne veux pas être celui qui te met dans une position inconfortable, mais je crois qu’il est important que tu saches une chose : je ne suis pas simplement là pour t’écouter. Je ne suis pas seulement un soutien. Je… » Il marqua une pause, cherchant ses mots, « je tiens à toi. »

Les mots durs d'Emma se figèrent dans sa gorge, et un silence lourd s’installa entre eux. Elle ne savait pas comment réagir. Il ne s’agissait pas d’un simple geste de gentillesse. Il lui avouait, en toute simplicité, qu’il était attiré par elle. Que ce n’était pas juste de la compassion. Mais pourquoi, après tout ce qu’elle avait vécu, en aurait-elle voulu plus ? Elle n’était pas prête pour cela. Son cœur était encore trop brisé, trop abîmé par tout ce qu’elle avait perdu.

« Gabriel… » Elle se força à parler, mais sa voix tremblait. « Je… je ne suis pas prête pour ça. »

Il hocha lentement la tête, comme s’il savait déjà la réponse. « Je comprends. » Puis il la regarda de façon presque paternelle. « Je ne veux pas te précipiter. Je crois que tu as besoin de temps. Mais je serai là, peu importe le temps que ça prendra. »

Ces mots, simples mais remplis de sens, réchauffèrent le cœur d’Emma. Elle n’était pas prête à accepter l’amour, pas prête à redevenir vulnérable. Mais elle n’avait pas non plus envie de tout fermer, de faire semblant que son cœur était de pierre. Gabriel, avec sa sincérité et sa patience, ne la forçait pas, et c’était exactement ce dont elle avait besoin.

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Quelques jours plus tard, alors qu’Emma se rendait à son travail, elle reçut un appel qu’elle n’attendait pas. C’était une avocate spécialisée en droit de la famille, qu’elle avait contactée quelques mois auparavant. Elle avait presque oublié qu’elle avait laissé ses coordonnées dans l’espoir d’obtenir un conseil juridique, mais voilà que l’appel venait de déboucher sur une vraie conversation.

« Bonjour, Emma, je suis Maître Lefevre. Je voulais vous informer que j’ai trouvé une occasion de faire avancer la situation concernant la garde de vos enfants. »

Le cœur d’Emma s’emballa. Elle avait attendu ce moment pendant des mois, et maintenant que cela semblait enfin se concrétiser, la peur s’empara d’elle. Et si tout échouait ? Et si son ex-mari avait trouvé un moyen de la rendre indigne de garder ses enfants ?

« Que signifie cela exactement ? » demanda-t-elle, sa voix légèrement tremblante.

« Je crois que nous avons suffisamment d’éléments pour demander une audience devant le tribunal. Je vous propose de prendre rendez-vous pour en discuter plus en détail. »

Emma sentit un souffle de soulagement, mais elle savait que cela ne serait pas facile. Se battre pour ses enfants, récupérer la garde après tout ce qu’elle avait vécu… Cela allait être un défi qu’elle n’était pas sûre de pouvoir relever seule. Mais elle n’était pas seule, en vérité. Gabriel était là, et même si elle n’était pas prête à envisager une relation amoureuse, elle sentait qu’il pourrait lui apporter le soutien dont elle avait besoin.

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Le jour du rendez-vous avec l’avocate arriva rapidement. Elle se rendit au cabinet, où Maître Lefevre lui expliqua les démarches à suivre et les possibilités d’obtenir une audience plus rapide. Mais au fond d’elle, une inquiétude grandissait. Si la procédure prenait trop de temps, comment allait-elle continuer à avancer dans cette situation instable ? Chaque jour semblait être un combat, et Emma savait que le vrai défi serait de réussir à offrir un foyer stable à ses enfants.

De retour à son appartement, elle se laissa tomber sur le canapé, le téléphone serré dans ses mains. Elle pensa à tout ce qu’elle avait traversé, à l’homme qu’elle était devenue. La route était encore longue, mais elle n’était plus seule à la parcourir. Peu à peu, elle se rendait compte qu’elle avait commencé à retrouver une certaine forme de confiance en elle.

Pour la première fois depuis longtemps, elle sentit qu’elle avait une chance de reconstruire sa vie.