Chapitre 03
Chapitre III :
J’ouvrai le placard de gauche, à la recherche de pain de mie, que je trouvai en première ligne, m’en emparai puis ouvrai le pot de confiture et celui de beurre de cacahuètes pour me faire un sandwich.
« T’en veux ? proposai-je à Maddie.
- Non merci. Mais je te rappelle qu’il y a encore une semaine, tu souffrais d’une intoxication alimentaire.
- ça vois-tu, c’est parce que j’avais respiré la nourriture de l’autre idiote en puissance. Non mais quelle bouffonne ! ajoutai-je avant d’éclater de rire. D’accord, une femme a chanté que les hommes s’étaient le ventre et le bas-ventre mais là. Faire tout ce cinéma et simplement pour être raccompagnée en moins d’une demi-heure, c’était quand même digne d’un comportement de bouffonne.
- C’est la énième fois que tu le dis. On a compris que t’aimais pas Charlotte. Mais tu devrais faire des efforts parce qu’elle s’intéresse sérieusement à Roland et qu’elle au moins le fait sur des plates-bandes vierges ! »
Je souris et mordis dans mon sandwich en prenant tout mon temps pour lui répondre. Il y avait dans sa phrase deux piques, l’une soi-disant tournées vers ma tendance à sortir avec les hommes mariés et l’autre vers ma pseudo jalousie injustifiée dans la mesure où je refusais catégoriquement d’être en couple avec Roland.
« Premièrement, dis-je après avoir posé mon sandwich, Tes sous-entendus quant au fait que je sois jalouse n’ont pas lieu d’être. La binocle à beau m’insupporter et me sortir par les trous de nez, je veux son bien. »
Après tout, c’est lui qui a commencé en émettant des commentaires sur les hommes que je cotoyais. J’estimais donc que je pouvais en faire autant pour lui. Puis c’était une évidence, même si ça me coûtait de le dire; on allait encore devoir se supporter pendant quelques décennies alors il était préférable pour lui comme pour moi que je m’entende avec celle qui jouerait le rôle de mère par intérim pour Sophia.
Et en regardant bien, excepté moi, ces goûts en matière de femmes sont limités.
« T’es sûr que c’est seulement parce que tu veux son bien ?
- Et celui de Sophia, ça va de soi, dis-je, en faisant semblant de ne pas comprendre l’orientation de la question.
- C’est ça. Si tu le dis. »
Ça me rappelait qu’il fallait sérieusement que je pense à briefer Roland sur ses potentielles copines afin qu’il ne nous ramène pas tout et n’importe quoi.
« Et ton deuxièmement ? reprit-elle.
- Deuxièmement, quand je sors avec des hommes mariés, c’est pour aider leur femme et rien d’autres. C’est plus un acte solidaire.
- Un acte solidaire ? répéta-t-elle en prenant une meilleure position sur la chaise haute autour de l’ilot.
- Oui ! Si tu remarques bien, les hommes que je côtoie on pour la plupart un peu plus de sept ans de mariage et va savoir pourquoi, les femmes aiment se négliger plus que de raison lorsqu’elles arrivent à cette période. Puis niveau sexe, elles se disent que leur libido n’est soi-disant plus la même qu’au début. Moi je dis que c’est une question de perception et que c’est la routine qu’on décide d’installer qui va jouer mais qu’à cela ne tienne. Paraît qu’on ne peut pas parler tant qu’on ne connait pas la vie de madame. Sachant que je ne gère pas tout ça ! Je ne fais que récupérer des hommes qui ont envie d’avoir une charmante compagnie, plutôt cultivée et capable des les baisers comme des rois ! En plus elles en sortent gagnantes parce qu’on leur apprend des bottes qui tuent et ils vont les reproduire chez leurs femmes ! Et ça, c'est mon troisièmement !
- Tonya !
- Bah quoi c’est vrai ! Une fois j’ai utilisé un anneau glacé avec Matt et il avait tellement aimé qu’il a reproduit avec sa femme qui a trouvé ça terrible. Je le sais parce qu’elle la dit à sa copine qui en parlait, sans citer les contemporains, au salon de coiffure.
- Tu peux arrêter de parler aussi facilement de sexe ?
- Euuh..Non ! Franchement, j’espère que t’es le genre à en dire le moins pour en faire le plus parce David pourrait finir par aller voir une comme moi dans pas longtemps.
- Je ne veux pas parler de ça avec toi !
- Est-ce qu’il t’a déjà pris en levrette et labouré sur le rythme d’une chanson hot ? dis-je en me tournant vers elle.
- Tonya ! »
Je voulais rire tellement son visage à l’instant T était la personnification du verbe être gênée.
Heureusement pour elle que nous étions noires sinon son teint aurait tourné au rouge pivoine. C’était drôle à voir et j’étais d’humeur taquine alors je continuais sur ma lancée.
« J’en déduis que non. Et sinon toi, tu prends le temps de bien masser ses testicules avant de lui tailler une pipe ?
- Tonya, si tu continues je m’en vais, annonça-t-elle sèchement. »
- ça aussi on dirait que tu ne le fais pas et bien la prochaine fois qu’il est sous la douche…
- Ok, je m’en vais ! Bonne après-midi, dit-elle sèchement en se levant de sa chaise. »
J’étais morte de rire face à sa réaction. Elle était si prude ! Mais je voulais passer du temps avec elle. Après tout, ça faisait un petit moment que je ne l’avais pas vu et sa présence me manquait même si nous restions constamment en contact via les messageries internet et applications.
« Ok, ok, j’arrête, dis-je en essayant de me calmer. Madison ! J’arrête ! Allez !
- T’arrêtes vraiment ?
- Oui.
- Si tu recommences je m’en vais et là, pas moyen de m’arrêter !
- Okay. »
Elle reprit place sur sa chaise et je me retins de rire en pensant à quelque chose de moins drôle. C’est à ce moment que l’image envoyé par Enzo me revint en tête et qu’un sourire en coin vint étirer mes lèvres.
« Tonya…
- Je souris pas à cause de toi mais à cause de cette Tabatha, l'informai-je. On aurait pu être de bonne amie.
- Qui est Tabatha ?
- La femme de Simon. C’est elle qui m’a frappée avec ses copines.
- Son acte est inqualifiable mais je pense qu’elle était totalement désespérée.
- Désespérée ou pas aujourd’hui elle sait qu’il faut s’assurer de ne pas être en face d’un chien plus féroce.
- Pourquoi tu dis ça ? demanda-t-elle avant d’ajouter. Qu’est-ce que tu lui as fait ?
- En plus, à cause de cette idiote et ses copines, je peux plus me faire de tissage pendant un certain temps. J’ai le cuir chevelu hyper sensible.
- Parce que ce son tes cheveux peut-être actuellement ?
- Non une perruque. Je l’ai mise pour faire une petite course. Dis-je en préparant les ingrédients pour le repas.
- Ok. Sinon, tu n’as pas répondu à ma question. Qu’est-ce que tu lui as fait ? »
Moi ? je ne lui avais rien fait, du moins rien après ma sortie d’hôpital. Je prévoyais d’aller la rencontrer personnellement et de constater si elle avait toujours autant de force sans ses copines, mais j’avais découvert sur les réseaux sociaux qu’elles se ventaient de son acte, tout en restant dans la parabole, au lieu de se taire et son imbécile de mari rajoutait de l’huile sur le feu en n’arrêtant pas de m’harceler pour me rencontrer.
J’avais donc décidé de les traités durement l’un comme l’autre.
J’avais une connaissance, ancien Cobra, qui se faisait un plaisir de me rendre service, que j’avais mandaté pour réunir la bande de copines et leur infliger les mêmes sévices qu’elles m’avaient infligée avec les ustensiles de cuisine, dont un pilon puis j’avais informé Simon, qui entre temps avaient mis sa femme dehors, qu’il subirait le même sort s’il continuait à me contacter.
Depuis la semaine dernière, je ne voyais ou entendais plus de commentaires en parabole me concernant et mon téléphone n’avait cessé de sonner à tout va.
Je savais que dire cela de façon aussi abrupte à Maddie allait la choquer alors je lui racontais toute l’histoire en évitant certains détails, mais à sa réaction, il semblait que c’était déjà trop pour elle.
« T’es complètement folle.
- Non, j’aime qu’on me respecte. C’est différent. Je fais des choix de vie, on peut ne pas être d’accord avec ça mais y’a des limites pour exprimer son désaccord. Puis qu’elle se soit retrouvée dépassée en me voyant dans la rue et serait venue m’agresser seule, j’aurais pu laisser passer mais de la façon dont c’était prémédité ? Naaaan, je pouvais pas laisser passer.
- Qu’est-ce que tu ne pouvais pas laisser passer ? »
Nos regards se tournaient vers la porte d’entrée de la cuisine où Roland se tenait dans embrasure de la porte.
Il fallait avouer qu’il était assez séduisant dans son costume et que cet air fâché, augmentait son sex-appeal.
« Rien qui ne te concerne, répondis-je avec le sourire en prenant appui sur l’îlot.
- Hey ! Moi t’as pas de raison d’être fâché contre moi, chantonna Maddie en se levant de sa chaise. »
Elle alla se blottir dans ses bras, le salua puis échangea des mots qu’ils étaient les seuls en mesure d’entendre.
A croire que ça pouvait me blesser alors que je m’en contrefichais.
« Je voudrais parler à Tonya, ça te dérange pas ?
- Non, j’ai quelques courses à faire avant de rentrer. Toni, on s’appelle.
- Si j’ai du temps, lançai-je sans plus faire attention à elle. »
Je me remis à préparer les condiments pour le plat de ce soir en attendant que Roland prenne la parole. Au silence qui régnait, il devait probablement attendre que je l’invite à parler, mais je n’étais pas disposée à rentrer dans son jeu alors j’attendais aussi.
« T’as pas une idée de ce dont je voudrais parler avec toi là ? dit-il enfin après cinq minutes.
- Non, aucune.
- J’étais à l’école de Sophia aujourd’hui. J’avais une réunion avec sa maitresse. Je t’en avais parlé. Tu t’en souviens ?
- Humm ouais vaguement, vaguement. Et donc ?
- Donc elle voulait qu’on s’entretienne sur les efforts d’inclusion que Sophia avait faits et qui avait été observés, appréciés et félicités.
- Ok-ay ! Et c’est la raison pour laquelle tu es fâché ?
- Non. Ce qui m’a fâché comme tu dis, c’est qu’elle a tenu à me faire part d’un comportement qu’adoptait Sophia depuis un certain temps et qu’ils ont remarqué hier.
- Tu peux arrêter ton suspens à deux balles et aller droit au but ?
- Comme tous les lundis, Sophia à un cours de sport le matin et une activité l’après-midi. Il s’avère qu’elle a eu un souci avec sa tenue de sport et que l’école lui a prêté une tenue de rechange contenant un polo et une jupe, mais voilà, Sophia n’avait pas de culotte. »
Ouh.
Je priai intérieurement pour qu’elle n’ait pas donné mon nom là-bas mais c’était illusoire ; dans la phrase qui suivit, il m’informa que Sophia s’était justifiée auprès de sa maitresse en lui expliquant que sa culotte laissait des traces et elle n’en voulait pas. Elle n’avait donné le nom de personne auprès de la direction lorsqu’on lui avait demandé d’où elle tirait cette information, mais lorsqu’il était parti la voir après sa réunion, il avait obtenu d’elle un nom : le mien.
« Oh ça ! Ah-ah ! J’ai une explication et tu vas trouver ça drôle. »
Il fronça nettement ses sourcils et croisa ses bras en prenant appui l’air de dire qu’il avait hâte d’entendre cette explication si drôle.
« Voilà ; je lui donnais quelques conseils pour se faire des amis et dans notre discussion je lui ai dit comment je faisais, à savoir, rien de ringard. Et je lui ai donné un exemple avec mon jogging et la façon dont je le mettais pour être cool ! Tu vois que c’est drôle !
- …
- Après tout ça a marché pour moi ! J’ai eu plein d’amis !
- Elle a huit ans !
- Je ne pensais pas qu’elle allait m’écouter !
- Elle boit tes paroles ! Ils font office de paroles d’évangile ! Elle ne jure que par toi ! Comment tu pouvais espérer qu’elle ne t’écoute pas ?! cria-t-il avant de quitter la pièce. »
Je reconnaissais que ce n’était pas les propos les plus pertinents que j’avais pus avoir mais j’allais arranger ça. Il n’avait pas besoin d’en faire toute une montagne, encore moins de le prendre ainsi.
Je le suivis jusqu’à son bureau pour lui assurer que je prendrai le temps avec Sophia de lui parler et de lui faire comprendre que ce n’était pas à faire, du moins pas à son âge mais il ne décoléra pas pour autant et je tentais de comprendre pourquoi.
« Elle a huit ans !
- Et j’ai dit que je rectifierai le tir !
- T’as pas l’air de te rendre compte de ce qu’il s’est passé !
- Mais si ! ça renvoie une mauvaise image d’elle et de l’éducation qu’elle reçoit ! Je suis désolée d’être venue ternir le travail remarquable que tu as fait pratiquement seul jusqu’ici ! »
Il tapait nerveusement sur sa tempe droit signe qu’il essayait de s’exprimer avec calme sans y parvenir.
« Crie si t’as besoin de crier mais…
- Et si elle n’avait pas une maitresse mais un maitre ? lança-t-il sèchement entre ses dents. Et si ce maître était un délinquant sexuel non répertorié ? Et si ce maître avait tenté de faire ce que Barry avait voulu te faire ? »
Je vacillai. Ces phrases faisaient l’effet d’une pluie d’uppercut plus retentissant et douloureux les uns que les autres. Je commençai à être prise de violents maux de tête alors sans plus un mot, je quittai le bureau de Roland pour rejoindre ma chambre. J’y pénétrai péniblement.
Je tombai presque et bien vite, mon esprit repartit quelques années en arrière.
J’étais à peine plus âgée que Sophia, de deux ou trois ans et tout le monde s’accordait à dire que j’avais un tempérament volcanique. J’aimais sautiller partout et me rendre là où on ne m’attendait pas. Je suivais les gens simplement parce que j’aimais savoir où il allait. A certains moments, j’en arrivais à ne plus faire attention à l’heure. Cela avait été le cas, le soir où, en suivant une jeune femme que je n’avais jamais rencontré avant et dont la démarche gracieuse m’avait subjuguée, je m’étais retrouvé dans une ruelle, en face de Barry. Un « yaya » que l’on croisait souvent en sortant de l’école et qui passait son temps à roder dans le quartier et dormir dans les bars. Lorsque j’avais le malheur de passer près de lui, il s’amusait à chuchoter en riant, qu’il jouerait avec moi et me ferait du bien un soir, dans le noir.
Ce soir-là, dans la ruelle, je me souvins avoir marché à reculons, espérant rencontrer des passants, des voisins, de la lumière, un signe de vie. Mais c’est un mur que je croisai. Un mur sur lequel Barry m’immobilisa par son poids. Un mur qui me permit de mesurer combien ma force était veine face à lui. Un mur que Barry utilisa pour frapper violemment ma tête et m’étourdir.
Je me souvins de sa main posée tellement grande qu’elle emprisonnait mon nez et ma bouche m’empêchant de respirer. Lorsque j’arrivai à inspirer, mes poumons se remplissaient de l’odeur nauséabonde qui émanait de lui. Un mélange d’alcool et de transpiration et de moisi.
Son autre main remontait le long de la jupe qui me servait d’uniforme et venait d’attendre ma culotte.
Je ne sus comment, je ne sus avec quelle force, mais je parvins à crier de toutes mes forces, puis c’était le trou noir. Et je m’étais réveillée quelques temps plus tard avec un terrible mal de tête.
Les passants m’ayant déposé chez mes parents les informaient que je venais échapper de justesse à un viol mais que mon agresseur n’avait pas pu être retrouvé.
Je me souvins du nombre de cauchemars que faits, des nuits à veiller dans ma chambre de peur qu’il ne trouve le moyen d’y entrer malgré la présence de mes parents, de toutes ces fois où je me rendais à l’école la peur au corps. J’en devenais folle. Puis un matin, j’avais décidé que cela suffisait. J’avais récupéré un jerricane d’essence, celle que papa utilisait ainsi que son briquet et je l’ai immolé. Le feu n’avait pas pris très longtemps, les personnes présentes près de l’école l’avait éteint aussi vite qu’il s’était allumé.
Je me souvins de la claque que papa m’avait mise avant de me demander pourquoi j’avais fait ça.
« Parce que je ne voulais plus qu’il m’agresse encore une fois, avais-je simplement répondu. »
Et j’étais prête à infliger ça à Sophia.
Je n’en revenais pas.
Je m’effondrai, littéralement. Prenant pleinement conscience des risques que je venais de lui faire subir.
Je ne voulais pas qu’elle souffre, pas une nouvelle fois. Et encore moins à cause de moi. J’étais néfaste pour elle. Il fallait que je m’en aille. Le plus tôt serait le mieux. Je laisserai le temps à Roland de s’organiser afin qu’il ne soit pas trop pris de court.
Aussitôt pensé, je réunis mes affaires des valises que j’avais et attendis Sophia dans sa chambre à son retour d’école.
En la voyant, l’image de la petite fille apeurée et craintive qu’elle était et qu’elle aurait pu continuer à être par ma bêtise m’apparut et je fondis en larme.
« Maman ça va ?
- Oui, snif, oui, arrivai-je à articuler.
- Alors pourquoi tu pleures ?
- Parce que tu sais, des fois, nous les adultes ont fait aussi des bêtises dont on n’est pas fiers.
- Mais demande pardon et ça va aller, me répondit-elle comme s’il s’agissait d’une évidence. »
J’eue un éclat de rire, qui fut très vite suivi de larmes lorsque Sophia passa ses petites mains sur mes joues.
« Tu as raison, finis-je par dire après m’être ressaisie. Et je te demande pardon.
- Mais pourquoi ? »
Je m’assis sur son lit et l’invitai à me rejoindre avant de la prendre dans mes bras.
« Tu te souviens quand on a parlé toi et moi et que je t’ai dit qu’il était important d’avoir des amis ?
- Oui. T’as dit que même s’ils pouvaient être embêtants, ils pouvaient aussi être là pour nous remonter le moral quand on ne va pas bien.
- Oui c’est ça. Et tu te souviens de ce que je t’ai dit pour les culottes ?
- C’est à cause de ça que tu pleures ? s’empressa-t-elle de me demander apeurée. C’est à cause de moi ? J’ai fait une bêtise !
- Non ma puce ! Ce n’est pas à cause de toi. Toi tu es parfaite et tu n’as rien. C’est moi qui t’ai induit en erreur. Et je te demande pardon parce qu’il aurait pu t’arriver quelque chose de grave par ma faute.
- Moi je te pardonne. Mais tu peux arrêter de pleurer s’il te plaît ? »
Je ne m’étais même pas rendue compte que mes larmes avaient repris et avec plus de force au point où elle semblait avoir peur. Mais c’était plus fort que moi.
« D’accord, mais toi, ne laisse jamais personne te toucher sous ta jupe ou sous ton pantalon. Et si une personne réussissait à le faire, promets-moi que tu viendrais me trouver et me dire qui elle est sans peur. D’accord ?
- D’accord, je promets.
- Tu sais que je t’aime ? lui rappelai-je en la serrant fermement dans mes bras. »
Nous sommes restées ainsi pendant une vingtaine de minutes avant que je ne lui propose mon aide pour se laver.
Je venais de finir de frotter son buste puis lui demandais de se retourner et je fis fasse à ses trois longues cicatrices légèrement boursoufflées. Des cicatrices qu’elle garderait à vie et qui témoignaient de ce qu’elle avait vécu.
Et j’étais prête à lui en rajouter d’autres, bien plus longues, bien plus profondes.
Non. Non.
Je refusai d’être cette personne et pris la ferme décision de partir dès le lendemain.
Je terminai de la doucher puis la laissai s’habiller pendant que je retournais en cuisine finir le repas.
« Tonya je te demande pardon ! lança Roland en entrant dans la cuisine.
- Surtout pas !
- J’aurais jamais du te parler comme je l’ai fait encore moins te parler de Blaise.
- Si, si tu avais raison. Tu as bien fait !
- Y’a rien qui justifie ce que j’ai fait. Je te demande sincèrement pardon.
- Je vais partir demain, dis-je en même temps que lui.
- Tonya…
- Tu as eu totalement raison et la meilleure chose à faire pour Sophia c’est de lui permettre d’évoluer dans un environnement sain.
- Tonya arrête ça…
- J’ai pas voulu lui faire du mal, lui rappelai-je les larmes aux yeux. Je pensais pas à mal. Je voulais… Je sais pas. La faire rire, passer du temps avec elle, partager des confidences … Je sais pas. Je voulais tout sauf lui faire du mal. Je te promets… Je te promets. »
Il fit un pas vers moi, je reculai de trois et essuyai négligemment mon visage.
« Tonya, fais pas ça… Tu sais que je suis sincèrement désolé.
- Je sais. »
Je savais qu’il était désolé et je ne lui en voulais pas, mais je savais aussi que je n’avais pas ma place ici. Qu’il fallait que je parte. Et si je voulais réellement partir, je ne devais certainement pas aller pleurer dans ses bras.
« Il faut que je finisse de préparer à manger, dis-je, pour lui demander implicitement de quitter la pièce. »
Ce qu’il fit sans discuter.
Je fermai la porte derrière lui, puis pris le temps de pleurer une dernière fois avant de me ressaisir et planifier les prochains jours tout en finissant de préparer le repas.