Chapitre 5
Le soir même, j’avais besoin de m'éclaircir un peu les idées en sortant avec mes amis. Comme à notre habitude lorsqu’un des membres de la fratrie à un petit coup de blues, on le console en achetant le champagne le plus cher, puis on boit toute la soirée. On pense que se bourrer la gueule nous aide à nous libérer. Mais ça va faire des années qu’on le fait et je ne sais pas qui est-ce que ça a aidé.
Rodrigue, Rudy, Jacob et moi, les inséparables. Nous sommes amis depuis qu’on est enfant. On a grandi ensemble, ils me connaissent par cœur et je les connais comme si je les avais mis au monde. En plus d’être mes frères, ce sont les seules personnes qui connaissent le vrai Espoir. Avec eux j’ai pas besoin d’être Al Pacino. D’ailleurs, c’est en partie grâce à eux que je suis devenu ce que je suis aujourd’hui.
Jacob : Qu'est-ce que tu as ? Dit-il en me poussant. Tu m’as l’air pensif.
-Non. Je suis juste fatigué.
Jacob : Comment ça s’est passé, la petite fête avec ta famille ? Demande-t-il avec un sourire au coin.
Rudy : Oui, c’est vrai, tu nous a pas raconté. Dit-il en s’incrustant dans notre discussion.
-Il ne s'est rien passé. Je dis en finissant mon verre de champagne.
Rodrigue : C’est pas ce que Sandra m’a dit pourtant. Lance-t-il d’un regard diabolique.
Jacob : Quoi ? Crie-t-il en se levant de sa chaise. Sandra était là ?
Rodrigue : Mais c’est pas ça le pire. Dit-il en sirotant son verre de champagne. Sa copine était aussi présente.
Jacob et Rudy se jettent par terre en explosant de rire. Je roule des yeux en essayant de les ignorer. Mais impossible, ils rigolent tellement fort, et leur rire est tellement communicatif que je suis à deux doigts de les rejoindre dans leur fou rire. C’est pour ça que j’ai préféré ne rien dire, juste pour éviter ce genre de réaction. Ils ne vont pas s’arrêter de rire maintenant, et toute la semaine ça va être comme ça. Quand ils auront des dossiers sur toi, ils ne lâcheront pas ta veste. Jusqu’à ce que tu pleures, ou que tu t’énerves.
-Sérieux...pourquoi tu continues à parler avec elle ? Je dis déjà blasé par la situation.
Rodrigue : Tu vas quand même pas m’interdire de parler avec ma cousine, Espoir. rit-il.
Jacob : Non, plus sérieusement. Reprend-il en essuyant ses larmes. Comment as-tu fait ?
-J’ai rien fait. Thomas a juste fait exprès de l’inviter à la fête, de base, j’étais même pas au courant que c’était une fête.
Rudy : Décidément tu n'es jamais au courant de rien.
-Vas te faire foutre. Je dis en lui lançant un coussin sur le visage. J’essaie de vous parler sérieusement.
Jacob : Ok, c’est bon, on se concentre maintenant. Dit-il en se mordant la lèvre pour stopper ses gloussements.
- En fait, je pense que je vais aller la voir.
Rodrigue : Qui ?
-Sandra. J’ai pas vraiment eu le temps de discuter avec elle.
Jacob : D’accord, mais tu sais très bien comment ça va se terminer ?
-Je ne compte pas retomber cette fois-ci. Je dis en me levant pour enfiler ma veste.
Rudy : AH...Parce qu'il y a eu d’autres occasions de chute ?
Je hoche la tête en m'avançant vers la sortie.
Rodrigue : Réfléchis bien à ce que tu vas faire, Espoir.
Jacob : N’oublie pas que la sainte, Méchy t’attend calmement à la maison.
-Les garçons, je pensais que sur ce coup-là vous me soutiendrez ?
Rudy : Non...La dernière fois qu’on t’a soutenu, elle nous a menacé avec un couteau.
Jacob : Elle a réussi à nous faire peur jusqu'à ce que le pauvre Rodrigue ait failli perdre sa dignité.
Rodrigue : Jacob, commence pas avec tes mensonges.
Jacob : D’accord. Dit-il le sourire aux lèvres. C’est juste pour te dire que si elle appelle l’un d’entre nous, on ne sera pas de ton côté.
Quand je pense qu’il y a à peine quelques minutes, je faisais un éloge sur le fait que j’avais des amis extraordinaires et que j’étais chanceux d’avoir des frères comme eux. Et voilà qu’ils me montrent leur vrai visage de monstre. C’est décevant, c’est très décevant.
-Je pensais qu’on était une famille ?
Rudy : C’est bon, vas rejoindre ta dulcinée... on te couvre comme d’habitude. Dit-il en roulant des yeux.
Jacob : Moi, je compte dire la vérité. Dit-il en tirant la langue comme un enfant.
-De toute façon, ça ne m’étonne pas de toi. Je dis en lui faisant un doigt d’honneur avant de quitter la maison.