Chapitre 16 : Hirohisa Timote
Ren allait sûrement partir.
Un an nous séparait déjà, si je redoublais cette année, je n’en verrais jamais le bout.
« De toute façon à quoi bon ? Ruminais-je. Ce garçon est déjà tellement loin de moi, que ce soit physiquement ou intellectuellement. Je devrais me faire une raison. »
Puis, je repensais à ce soir-là. Ses gestes, sa douceur...
Et puis non. Ren était, certes, inaccessible à l’heure actuelle, mais en faisant des efforts, beaucoup d’efforts, je finirais par avoir une chance. Infime, mais une chance quand-même.
- Ok, me résolus-je à dire, je vais m’y mettre plus sérieusement.
- Super ! M’encouragea Yoko en voyant la lueur qui brillait dans mes yeux. Et j’ai quelque chose qui pourrait t’y aider…
- Hein ?! Heu non… je ne suis pas du genre médocs ou autres trucs, je vais passer mon tour.
- De quoi tu parles ? S’indigna Yoko devant mon interprétation erronée, J’allais te proposer un café et une petite douceur de ma confection pour te redonner des forces. Mais je vois que tu me prends pour une dealeuse.
- Oh ! Désolée ! M’excusais-je, je ne sais pas à quoi je pensais.
- Bon… après, si l’on considère le sucre et le café comme une drogue…
- Je suis vraiment confuse, m’aplatissais-je carrément. Et pour la douceur, je suis partante.
- Vas pour le shoot de glucose alors.
La « douceur » en question n’était un vulgaire gâteau à la crème ou autres choux sans saveurs qu’on trouvait un peu partout.
Non.
En face de moi, venait d’être déposée, une œuvre d’art digne des plus grandes maisons de pâtisserie du pays.
J’avais vraiment du mal à croire que ce chef-d’œuvre était réalisé par Yoko.
Je la regardais sans voix,. Puis mes yeux revinrent se poser sur cette adorable mignardise.
J'osais à peine y toucher, de peur de saccager le délicat travail qui y avait été fait.
C’était un petit Cheese-cake individuel aux fruits rouges, surmonté d’éclats de pralins et d’une superbe sculpture en chocolat.
Tout l’amour que je portais à la nourriture, surtout au sucré, se reflétait dans mon regard à cet instant.
Armée de ma jolie petite cuillère en argent, je pris délicatement l’assiette, l’approchait de ma bouche et y fit glisser la petite pâtisserie pour l’engloutir d’un trait.
- Eh le glouton ! S’indigna mon amie. Tu ne sais pas que ce genre de chose se déguste ? Respecte au moins le travail des autres.
- Mais ça tient en une bouchée, marmonnais-je la bouche pleine et les yeux plissés de bonheur.
- Je vois que l’on ne m’a pas attendu pour les festivités, nous coupa une voix masculine juste derrière moi.
- Tim ! Fit Yoko ravie de voir son ami.
- Salut ! Lança-t-il en levant la main. La gouvernante m’a dit que vous étiez dans la cuisine, alors je suis entrée directement.
- Pourquoi tu te justifies ? Lui demanda son amie, fais comme d’habitude.
Yoko avait raison, ce garçon était décidément très beau.
Bien plus beau que le souvenir que j’en avais, il fallait dire que ce jour-là, je l’avais à peine regardé. Mon esprit était trop occupé avec ma sortie romantique pour apprécier les traits harmonieux de Hirohisa Timote.
Néanmoins, j’avais remarqué la fossette qui se dessinait sur sa joue lorsqu’il souriait.
Un peu comme à cet instant…
- Alors vous vous en sortez ? Fit-il à mon intention et en prenant place près de moi.
- Euh… c’est que…
« Pourquoi je bafouille ? Ce type n’est pas Ren. Je dois me reprendre. »
Certes, il n’était pas Ren, mais il n’en restait pas moins charismatique et intimidant. Surtout à cette distance.
- Nous avons à peine commencé, lui répondit-elle en posant près de lui la même collation.
- Merci. Fit le jeune homme. Bon et bien la matinée s’annonce chargée. Continua-t-il en prenant une gorgée de son café.
- Oui. Enfin si on arrive à motiver cette paresseuse.
- Quoi ? La coupais-je d’un air offusqué. Je n’ai jamais dit que je ne voulais pas réviser.
- Ah non ? Insista Yoko sous le regard amusé de Hirohisa.
- Non ! Répétais-je avec une mauvaise foi évidente.
- Je ne pense pas que vous m’ayez fait venir pour arbitrer vos querelles, nous arrêta notre professeur improvisé. Je vous propose de commencer, et si vous rencontrez la moindre difficulté, vous me le dites, ok.
Si je devais décrire Hirohisa, je dirais qu’il avait tout du garçon parfait.
Sa gentillesse et sa patience le différenciaient grandement de Ren, avec qui il partageait beaucoup de points communs.
Il ressemblait à ces acteurs de séries, qui en plus d’être beaux, étaient toujours courtois et prévenants.
Sa complicité étroite avec Yoko me laissait penser qu’ils se connaissaient depuis longtemps.
Seulement, je n’arrivais pas à clairement déterminer la nature de leur relation.
Je les trouvais bien trop proches pour de simples amis même si je ne voyais aucun signe qui trahissait une quelconque intimité.