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L'illusion du bonheur

Toronto, Ontario, Canada

Myléna Scott Fenty

Aujourd'hui c'est l'anniversaire de ma belle mère. Ma plus belle robe sera portée afin de m'y rendre. Arrivée là bas, on va se traîter de tous les noms d'oiseaux, s'insulter même dans nos têtes. Mais on va se sourire chaleureusement face à tous comme si on était la plus heureuse et la plus soudées des familles. C'est ainsi depuis si longtemps que c'est devenu la norme entre nous. Plus hypocrite que la famille de Reynaldo, tu meurs. Rien que d'y penser j'ai un haut le cœur. Si je pouvais, je n'aurais même pas mis un pied là bas. Malheureusement, je n'ai pas ce luxe.

Je rejoins mon mari qui s'impatientait déjà de trop attendre au parking alors que j'étais censée avoir simplement oublié mon téléphone à l'intérieur. Il était sur son trente et un comme toujours. Malgré ses 52 ans, Reynaldo a toujours su prendre soins de lui même. Il est très bien conservé hormis son... Bref. C'est un autre sujet.

Alice se tenait à côté de lui à m'attendre elle aussi. Sa bouche était allongée, on dirait qu'on lui a fait une traction dessus tant elle était énervée.

- La reine mère se ramène enfin, commente Alice en me regardant de travers. On peut maintenant s'en aller ? Tchrrrrrr ! Les fausses princesses comme ça.

- Tu te tais Alice, le gronde mon mari. Tu ne vas pas commencer tes conneries de si tôt. On s'apprête à se rendre chez ta grand mère pour son anniversaire. C'est un jour important pour elle... pour la famille. Il y aura du monde... des gens importants seront présents. Ce n'est vraiment pas le moment de foutre la honte sur ta famille. Tu as 17 ans, pas 5 comme tu le répètes tant de fois. Grandis un peu.

Il la sermona tout en grimpant dans le véhicule. Puis il démarra en trombe. Reynaldo ne crie pas quand il parle. Mais, le message est tout autant clair. Et quiconque le connait, sait qu'il ne faut pas le pousser à bout. Bon tout le monde, sauf sa fille on dirait. Cette petite est une vraie plaie.

- Mais bien sûr. Tout va de travers depuis que cette femme est entrée dans nos vies. Mais on n'a pas le droit de le dire. Nooon, tooooout va bien. On doit feindre le bonheur parfait pour se sauver la face.

- Tu as tout compris. Maintenant comporte toi bien. Et met ta ceinture jeune fille, ordonne Rey.

- Excuse moi de ne pas être aussi hyppocrite que vous tous papa. Vous jouez le jeu à la perfection pendant que moi...

- Si tu ne te tais pas Alice, je te fais descendre de la voiture et te rendre en taxi chez ta grand mère. Ne me tente surtout pas. Myléna est plus âgée que toi. C'est aussi ma femme. Tu la respectes. Tu n'as guère le choix.

- ...

- Quand es tu devenue cette fille si insolente ?

- Si cela me disculpe de la présence de ta femme...

Elle roule des yeux.

- Crois moi père, je préférerais vraiment m'y rendre en taxi.

- Laisse la Reynaldo. Ta fille ne va pas grandir rien qu'en un jour. A force, j'y suis habituée maintenant. Alors, ne t'inquiète pas pour moi.

Certaines fois je me dis que j'aurais dû rester loin de cette famille. Epouser un homme avec 3 enfants alors que moi même je n'en ai pas, n'était pas du tout l'idée du siècle. A leurs yeux, je serai toujours l'intruse. Celle qui a usurpée la place d'Alice, la défunte femme de Reynaldo.

Depuis le père de Rey passant par sa mère, pour arriver à ses enfants, tout le monde me voit en ennemis dans cette famille. Avec Noah et Logan c'est plus soft. Et là encore, soft, c'est une trop belle façon de dire les choses. Disons de préférence qu'ils connaissent leur limite. On s'arrête juste au politiquement correct.

J'ai si souvent l'envie de partir quelques part, seule, sans avoir à me coltiner l'un des membres de cette putain de famille de snobes. J'y réfléchis sérieusement ces jours-ci. Le problème est que, je ne pourrais pas y rester longtemps si j'y vais seule. Et je serai obligé d'appeler la maison de temps à autre pour prendre des nouvelles. Alors que, tout ce dont moi je veux c'est de faire un break. J'ai 30 ans. Cette famille c'est beaucoup trop de stress pour moi. Bientôt, j'aurai l'air d'une petite vieille.

On arrive chez ma belle mère. Sourire de circonstance plaqué au visage, je descends la première de la voiture. Suivie de mon mari qui en ressort avec un paquet cadeau en main. Moi même, je n'ai rien apporté pour l'occasion. Comme, je savais que mon mari allait lui prendre quelques choses pour ce jour, j'ai un peu traîner des pieds. De toute façon, lorsqu'il lui offrira le cadeau, il le fera en notre nom à tous les deux, je n'avais pas à me démener pour trouver quelque chose à cette vieille chouette qui m'insuporte autant. De plus, que peut on offrir à une femme qui a déjà tout ?

La maison grouille de monde en ce moment. Et ce n'est pas n'importe quelle catégorie de personne. C'est la crème de la crème. Il y a plein de personnalités publiques. Avant, j'aimais bien participer à ces genres d'événements. Cela a toujours été mon terrain de chasse. On y trouve de bons pigeons.

On est acceuilli par ma belle mère qui, malgré le fait qu'elle tente de sauver les apparences se retient de ne pas me prendre dans ses bras. La vérité est que, quoique je joue le jeu à fond, je m'impose certaines limites. Et faire la bise de Judas aux autres, c'est trop pour moi. Alors à chaque fois, je prétend ne pas aimer les contacts physiques.

On se sourit mutuellement et elle prend son fils dans les bras. Elle nous traine ensuite vers ses vieux amis de longues dates qui se sont déplacés pour l'occasion et qui souhaitaient renouer avec son fils. Cette femme ne rate jamais une occasion de se montrer aux côtés de Rey et faire l'intéressante. Je n'avais vraiment pas la tête à ça. Mais pour mon mari, je supporte simplement.

On a fait le tour des invités. Et à chaque fois, mon mari s'est arrêté pour discuter avec des connaissances. Ce fut d'une ennuie mortelle. je me retrouve dans des conversations insipides avec des gens qui ne parlent que boulot, ou qui, pire encore, tentent de nous vendre leurs enfants comme on le ferait pour une marchandise précieuse. C'est épuisant et, franchement, très peu amusant.

Il y en a qui oublie ce que pourrait bien signifier le mot festivité. Entre ceux qui exposent leurs portefeuilles et ceux qui supplient mon mari qu'il accorde du travail à leurs enfants, je ne sais pas qui sont les pires. Cela enlève tout goût à la fête. Ce jour est censée être un moment de célébration, mais à chaque fois que Reynaldo s'arrête pour discuter avec quelqu'un,

Les fils de Reynaldo arrivent finalement avec leurs cadeaux luxueux, un défilé de marques et de prix vertigineux. Ils entourent leur grand-mère avec des expressions d'amour exagérées. Chaque fois que je tente de me rapprocher pour engager une conversation, je me heurte à leur indifférence polie, dissimulée derrière des sourires mielleux. Leurs regards glacent, et leur manière de me parler, même si elle est masquée par des formules de politesse, est à peine massée. Il est clair qu'ils me tolèrent à peine.

Reynaldo est trop occupé à discuter avec ses contacts pour remarquer ce qui se passe autour de lui. Je me contente de sourire et de faire bonne figure, me persuadant que c'est pour le mieux. Après tout, ce genre d'événement est une opportunité pour moi aussi, même si ce n'est pas de la manière dont je l'aurais souhaité. Tant que Reynaldo est heureux, c'est tout ce qui compte. Quant à moi, je prends sur moi, en espérant que la soirée se termine bientôt et que je puisse retrouver un peu de tranquillité.

A la fin j'avais les chevilles œdematiées pour avoir suivi Reynaldo partout où il allait perché sur mon 15 cm. C'est toujours ainsi avec lui pour nos sorties mondaines. A croire que s'il me lache un tout petit peu, je vais m'échapper. Quand enfin il me proposa de rentrer, je le remercie intérieurement car il en était temps.

J'en avais plus que marre d'être au milieu de tous ces snobinards qui ne parle que portefeuilles et actions. Une fois chez moi, j'enlève ces talons qui me torturent les pieds et me jette dans le lit telle une acte de délibération.

- Il faut que je trouve un moyen de foutre le camp d'ici sans mettre à mal mon mariage, je bougonne. Cela commence à peser lourd sur mon état d'esprit. Il me faut me libérer de tout ça. Je dois prendre du temps pour moi. Respirer un autre air et revenir quand je me sentirais mieux.

- Tu as dit quoi ?

- Rien chéri. Je réfléchissais à voix haute.

- A quoi ?

- Rien. L'anniversaire de ta mère était beaucoup mieux l'an dernier par contre. Il n'y avait pas tout ce monde qui l'y avait transformé en espace travail et de chasse.

- Qu'est-ce que tu veux Myléna ? On ne se voit pas souvent. C'est normal que certains en profitent.

- Qu'ils prennent rendez vous comme tout le monde. Ce ne serait que plus normal.

Je m'effondre sur le canapé. La frustration doit se lire sur mon visage. J'étais sur les nerfs. Mais j'essayais de faire bonne figure. Je suis autant épuisée que contrariée. Reynaldo compris que je n'étais pas dans mon assiette. Il me propose de faire l'amour pour décompresser. J'accepte, espérant que ça nous soulagera tous les deux. Il me prend la main et l'on se dirige vers notre chambre. Étant donné qu'Alice vit ici, on ne peut se permettre de faire l'amour où on voudrait.

On se déshabille et on s'allonge sur le lit. Je prends son engin en main et le caresse doucement. Cependant, alors que je tente de l'exciter, je constate avec amertume que son service trois pièces n'est pas réceptif. Malgré tous mes efforts pour stimuler ses sens, rien ne se passe. La frustration monte en moi. Ce genre de chose est monnaie courante chez lui. J'espérais que cette fois ce serait différent.

Je le regarde avec colère, incapable de cacher mon mécontentement.

- Reynaldo, c'est la combientième fois que ça arrive ? Tu m'as promis que ça irait mieux pourtant. Tu ne prends plus tes médicaments, c'est ça ?

Il me regarde, visiblement gêné.

- Mylé, je ne peux pas tojours contrôler ce genre de choses. C'est le stress, tu sais. Je suis fatigué, et ce n'était sûrement pas le moment de te faire l'amour.

- Ce n'est pas qu'une question de moment, Reynaldo. C'est chaque fois la même histoire. J'en aiassez de tes excuses. Ça me frustre. Tu me fais languir, pour au final... Tu n'es même pas foutu de...

Je m'éloigne de lui, incapable de continuer à faire semblant.

- Peut-être que tu devrais chercher une solution à ce problème plutôt que de toujours me promettre que ça ira mieux.

Parce que moi, je suis fatiguée de tout ça.

Il semble abattu, ses épaules se voûtent sous le poids de la conversation.

- Je comprends, Myléna. Mais, il faut que tu me comprennes. Mais bon, je vais voir un spécialiste, d'accord ? Je ne veux pas que notre vie sexuelle soit une source de conflits entre nous.

Je souffle profondément, essayant de calmer ma colère.

- Bien. Peut-être que ce sera fait. Mais ce n'est pas tout Rey. Si ça continue commne ça, je ne sais pas combien de temps je pourrais encore supporter cette situation.

Je me tourne et quitte la chambre, laissant Reynaldo seul avec ses pensées. Je sais que cette dispute est le début de quelque

chose de plus profond qu'on devra régler ensemble. Pour l'instant, je me réfugie dans un coin de la maison, essayant de

trouver un peu de calme dans ce tourbillon émotionnel.

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