Chapitre 4
Il est 10h et nous attendons le prochain train pour Paris sur le quai de la gare ferroviaire d'Alençon. Christopher est engoncé dans l'un des costumes que mon frère lui a prêté pour l'occasion. Il est bien plus musclé que lui, mais son uniforme étant immettable, il a dû se contraindre à porter ce qu'on lui a donné.
Alex est comme à son habitude, en habit de ville mais avec cette note d'élégance dont lui seul à le secret... Mes parents ont insisté pour que nous partions avec un sac de pomme de terre, de peur que nous ne mourrions de faim arrivés à paris. C'est vrai que sur la capitale, il est plus difficile de se nourrir en comparaison à la campagne... et puis les tickets de rationnement sont une denrée rare en ces jours troublés.
Anna: " Si vous voulez, lorsque nous arriverons, nous déposerons nos affaires à l'appartement et nous entreprendrons les recherches immédiatement pour savoir où les forces anglaises se sont établit. " dis-je pour le rassurer.
Christopher : " Rien ne presse... Je ne vais pas à Paris tout les jours, une petite promenade ne serait pas pour me déplaire. Surtout que j'ai passé les derniers jours enfermé dans une chambre... bien que celle-ci fut très confortable. J'ai besoin d'air frais... " dit-il en me souriant.
Vient-il de me proposer à demi-mots que nous nous promenions lui et moi?
Alexandre : " Vous allez voir... Il y a de quoi faire là-bas, c'est pas comme ici! Où on s'emmerde comme des rats morts!"
Anna : " Ce n'est pas parce-que maman n'est pas là que tu dois te relâcher ! " dis-je agacée.
Alexandre : " Empêche-moi... " dit-il, en me défiant. " Les femmes là-bas sont bien plus belles que toutes les anglaises que vous avez pu voir... " dit-il, continuant son discours.
Christopher : " Vous en avez rencontrés beaucoup... des anglaises? " dit-il, amusé.
Alexandre : " Jamais! Mais si elles en valaient la peine ça se saurait... alors que les françaises... sont au-delà de toute comparaison. " dit-il en faisant un clin d'oeil à Christopher.
Je le frappe violemment sur le bras devant son sous-entendu tendancieux. Qu'il peut être bête parfois!
Anna : " Je suis là, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué! Et je suis l'une de ces françaises dont tu parles, donc tais-toi! "
Christopher éclate de rire en nous voyant nous chamailler et c'est à se moment que le train se gare enfin à notre hauteur. Nous montons à bord et prenons place. J'ai hâte de retrouver ma ville et mon appartement. La vie parisienne m'a énormément manqué, bien qu'à Alençon nous avions prit nos habitudes, mais ce n'est rien comparé à Paris! J'espère que certains de nos amis sont encore là...
...
Nous traversons la gare d'Austerlitz et prenons le métro jusqu'à Duroc. C'est notre arrêt. Nous émergeons du souterrain et respirons un bon coup l'air de Paris. Il y a des barricade ici et là mais rien de très alarmant, l'essentiel des combats de rue ont eux lieu dans d'autres quartiers, le notre à été étrangement épargné. Comme j'aurai aimé être là lorsque le général Leclerc est entrer dans la capitale...
Quand nous arrivons devant notre immeuble, nous sommes accueillit par l'une de nos voisines qui nous tombe presque dans les bras. Elle nous demande où nous étions et si nos parents vont bien. Elle nous raconte la Bataille de Paris et le triste spectacle qui jalonne la ville depuis quelques temps: la tonte des femmes. Celles qui ont osées aimer l'occupant. Accusées d'avoir trahies leur pays. J'espère ne jamais avoir à voir ça!
Nous atteignons notre bon vieux cinquième étage et lorsque je sors ma clé pour ouvrir notre porte, j'en ai presque la larme à l'oeil. Quand je pousse la porte, rien n'a bougé, tout est là où nous l'avions laissé.
Alexandre : " Bienvenue dans le château des Marchands! " s'écrit-il, en écartant les bras. "Je vous laisse ma chambre Christopher, je prendrai celle de mes parents. "
Anna : " Ben voyons! Et si on faisait le contraire? Je prends la chambre des parents et on le met dans la mienne? "
Alexandre : " C'est moi le plus vieux. Je suis responsable de vous quand papa et maman ne sont pas là. "
Anna : " Christopher a 25 ans et tu en a 24. C'est lui le plus vieux! "
Alexandre : " Oui, mais il ne connait pas la ville, donc ça reste moi le plus responsable. "
Christopher : " C'est bon, je vais prendre votre chambre Alexandre. " dit-il, pour mettre fin à notre dispute. " De toute façon, je ne reste pas longtemps."
Alexandre : " Tu vois... " dit-il, en se dirigeant dans la chambre de mes parents.
Anna : " Je suis désolée que vous ayez à assister à nos querelles... vous devez être dépité. "
Christopher : " Çe me rappelle la maison. C'est un peu comme ça chez moi... un tantinet plus dramatique, mais c'est tout aussi amusant. "
Anna : " Venez. Je vais vous montrer la chambre d'Alexandre... " dis-je en le guidant dans l'appartement. Elle juste à côté de la mienne, alors que celle de mes parents est à l'autre bout. Ce qui arrange bien mon frère, lorsqu'il fait le mur... " Je vais déposer mes affaires et quand vous serez prêt, nous sortirons pour voir où se trouve votre contingent. "
Christopher : " D'accord. Je vous attends. "
Je le quitte pour aller défaire ma valise et aérer un peu les pièces rester trop longtemps fermées. Il fait une chaleur à mourir en cette fin de mois d'Août et cela ne semble pas vouloir s'apaiser dans les prochains jours...
Alexandre : " Je vais voir si Jean est toujours chez lui. " dit-il en apparaissant dans le salon. " Il avait des connexions au marché noir, il pourrait nous avoir de la viande. Je refuse de continuer à manger encore une seule pomme de terre! " dit-il, déterminé.
Anna : " Je croyais que tu viendrais avec nous?"
Alexandre : " Vous n'avez pas besoin de moi! Il y a des américains à chaque coin de rue, alors que Jean, il n'y en a qu'un! "
Anna: " Il est anglais et non américain! Combien de fois faut-il te le répéter!"
Alexandre : " C'est la même langue donc j'ai tendance à faire l'amalgame... Allez... À toute à l'heure Nana." dit-il, avant de partir.
Anna : " Et arrête de m'appeler comme ça! " répondis-je, alors que la porte d'entrée claque déjà.
Christopher sort de la chambre, certainement attiré par le bruit.
Christopher : " Alors? On y va? "
Je lui fait un signe de la tête, et nous sortons à notre tour de l'appartement.
...
Je décide de tout faire à pied, pour que Christopher puisse profiter des charmes de la ville et du beau temps. Il est souriant et détendu, il n'a pas l'air d'un soldat désespéré à la recherche de son unité.
Anna : " Ici, c'est St Germain des Près. Il y a beaucoup de cafés et de petits restaurants, les allemands ne venaient pas ici. Ils préféraient les endroits plus touristiques. "
Christopher : " C'est très joli. On dirait un vrai livre d'Hemingway. "
Anna : " Vous avez lu Hemingway? " dis-je extatique.
Christopher : " Oui. J'aime beaucoup. "
Anna : " Moi aussi. Vous écriviez quoi, quand vous étiez journaliste? "
Christopher : " J'étais spécialisé dans la politique. J'ai commencé à 19 ans, la guerre d'Espagne venait de se finir. J'y suis allé, pour me rendre compte de la répression des Républicains par les Franquistes et puis je suis aussi parti en Turquie. C'est à ce moment que la guerre à éclatée et j'ai été mobilisé tout de suite, j'ai participé au rapatriement de Dunkerque où j'occupais le poste de photographe pour l'armée. Il y a eu énormément de bombardements et plusieurs assauts ont été donnés pour que nous quittions la plage. Nous nous en sommes sortit grâce à la Royal Air Force. Je me suis juré que si je m'en sortais, je piloterais un de ces avions la prochaine fois. J'avais appris l'aviation sur les conseils de mon père. Donc quand je suis retourné à Londres, c'est ce que j'ai fait. "
Anna : " Vous aviez déjà effectuer des missions comme celle-ci avant? " Il me regarde en fronçant les sourcils. " Je sais... vous ne pouvez pas répondre... désolé. "
Christopher : " Oui, Anna... Je l'avais déjà fait avant. C'est mon rôle de militaire, d'effectuer des vols de reconnaissance. "
Anna : " Vous avez déjà rencontré le général? De Gaulle, je veux dire? "
Christopher : " Non. " dit-il, en riant. " Mais mon oncle à fait un article sur Churchill et il l'a rencontré. "
Anna : " C'est prodigieux! " dis-je éblouie.
Nous passons devant l'Opéra où se trouve le quartier général américain. Je propose à Christopher de nous y rendre pour savoir si ils sauraient où nous diriger. Quand j'y pénètre, j'ai l'impression d'avoir fait un bond aux États-Unis sans avoir pris l'avion! Tout le monde parle anglais et de grosses Jeep sont garées fièrement devant le bâtiment. J'alpague un officier qui passe et lui demande si il sait où se trouve le quartier anglais. Il m'explique que c'est le général Redman qui est au commande des troupes anglaises. Ce nom semble parler à Christopher, qui prend tout de suite les commandes de la discussion. De ce que je comprends, il faut que nous nous rendions au Grand Palais.
Je comprends donc qu'il faut que nous nous dirigions vers le Grand Palais mais Christopher me retient le bras.
Christopher : " Non. Je me disais... et si nous profitions de cette journée? Je sais où me rendre à présent, mais je ne suis pas obligé d'y aller tout de suite? " dit-il, plein d'espoir.
Anna : " Vous en êtes sûr? Je ne veux pas vous attirer d'ennuis. "
Christopher : " Le moment de se séparer arrivera un jour... je veux juste ne pas avoir de regrets, vous me comprenez? "
Anna : " Je vous comprends parfaitement. " dis-je en le regardant dans les yeux. " Que diriez-vous d'aller dans mon endroit préféré dans Paris : les jardins du Luxembourg ? "
Christopher : " J'adorerai ça... "
Je lui sourit une nouvelle fois, avant de l'entrainer dans une nouvelle promenade...