V.
Ma robe m'a été mise il y a quelques minutes, et je suis fin prête pour traverser le couloir qui me mènera dehors pour me rendre à la cathédrale. Je n'arrive pas à croire que c'est en train d'arriver! Que je vais épouser Johann, dans quelques heures. Je ne m'y suis toujours pas résignée. Une partie de moi espère un événement de dernière minutes qui me fera sortir de ce pétrin, mais plus le temps s'écoule et plus je comprends que ça n'arrivera pas. Je suis seule et personne ne viendra à mon secours.
La gouvernante : " Votre voiture vous attend. " dit-elle, solennellement.
Je marche, encadrée de quatre gardes, jusqu'à l'extérieur. Quand je rentre dans la calèche, il y a du monde qui s'est pressé devant les grilles, et une clameur surgit quand ils m'aperçoivent. Je donnerai n'importe quoi pour être dans cette foule et non à ma place... Les chevaux commencent à se déplacer et nous quittons le château. Lorsque je traverse les rues. Il y a des personnes sur tout les trottoirs qui me saluent et crient des choses que je n'entends pas. J'ai l'impression de vivre la scène en dehors de mon corps, comme-ci ce n'était pas moi. Du moins c'est ce que je voudrais. Très vite, trop vite, nous atteignons la cathédrale et je dois quittée le cocon temporaire qui me protégeais de mon sort. La foule est plus dense aux abords de ce lieu saint. Je pénètre l'enceinte du dôme et suis surprise d'y voir mon père qui m'attend.
Adélaïde : " Papa! " dis-je soulagée de le voir. " Tu vas bien? "
George : " Oui, ma chérie. Je suis si heureux de t'accompagner à l'autel, je croyais que ce jour n'arriverai jamais. "
Adélaïde : " Quoi? Mais vous n'étiez pas au cachots? "
George : " Non! " dit-il, en esquissant un rire. " Nous avons un appartement rien que pour nous. Ton futur époux à fait en sorte que nous ne manquions de rien. "
Adélaïde : " Il n'y a pas eu de représailles? "
George : " Mais de quoi parles-tu? Il va falloir y aller, tout le monde attend... " dit-il, en posant ma main sur son bras.
Il commence à marcher droit devant lui, et quand je pénètre l'intérieur de la bâtisse, je reste interdite devant le parterre de monde qui y est présent. Je déglutis en voyant tout ces regards posé sur moi. Johann m'observe avec un petit sourire, plongeant ses yeux dans les miens. Arrivée à sa hauteur, il remercie mon père qui m'invite à prendre le bras de celui qui se définit comme mon fiancé. J'hésite une fraction de seconde, puis pose ma main sur son avant-bras. Il semble satisfait quand j'accepte ce contact.
La cérémonie se déroule comme dans ne sorte de léthargie pour ma part. Ce n'est qu'à l'échange des voeux, que je comprends que je ne peux plus être passive.
Prêtre : " Adélaïde Christine Isabelle Hemberg. Voulez-vous prendre pour époux Johann Carl Ludovic Von Amsberg des Pays-Bas, ici présent? "
Je me tourne vers Johann et le regarde un instant. Il m'observe avec un air menaçant.
Adélaïde : " Oui. Je le veux. " dis-je, d'une voix éteinte.
À partir de ce moment, tout va vite. Il prononce ses voeux à son tour et nous procédons à l'échange des anneaux, avant que mon couronnement ne se fasse, car en plus d'épouser un prince, je deviens à mon tour princesse. Je m'agenouille devant le cardinal qui prononce des paroles en latin, avant de poser sur ma tête une tiare bien trop lourde pour mon cou...
...
Quand nous sortons de la cathédrale, des cris jaillissent de la foule qui nous acclament avec passion, nous rentrons dans le carrosse paré pour l'occasion. Johann salut la foule avec enthousiasme. Je le regarde silencieusement, essayant de faire le deuil de ma liberté.
Johann : " Saluez-les. Ils n'attendent que ça. "
Adélaïde :" Vous me demandez de feindre le bonheur? " dis-je avec dédain.
Johann : " Exactement. À moins que vous ne vouliez que je vous y oblige? " Je lève ma main et adresse un geste discret aux gens que je vois à peine. " Mieux que ça! " dit-il, froidement. Je ferme les yeux et prend sur moi pour leur offrir un sourire. " Voilà, c'est mieux. "
...
La salle de réception grouille de monde. Je marche lentement à la rencontre de mes beaux-parents que je n'ai toujours pas rencontrée : le Roi Pieter et la Reine Béatrice. Johann me tient par la taille et lorsque nous nous trouvons devant eux, nous faisons la révérence en même temps. La gouvernante m'a appris comment la faire tout ces jours-ci.
Béatrice : " J'ai été ravie de constater que mon fils avais fait un choix judicieux en vous faisant princesse. Comme quoi les ultimatums ont du bons... " dit-elle, en souriant. " Bienvenue dans la famille, Princesse Adélaïde Von Armsberg des Pays-Bas... "
Pieter : " Nous sommes en effet rassurés de savoir qu'un choix a été fait, mais nous le serons encore plus quand un hériter sera annoncé... "
Johann : " Nous espérons vous faire ce cadeau rapidement... " dit-il, affable.
Béatrice : " Adélaïde... on ne vous entend pas? Vous êtes ici chez vous à présent, j'espère que les appartements qui vont été accordés vous conviennent parfaitement? "
Adélaïde : " Oui... merci. " dis-je, timidement.
Johann : " Elle est impressionnée par vous, mais avec le temps, je pense que vous pourrez avoir une discussion plus légère... " dit-il, constatant ma fébrilité.
Pieter : " Allez vous amuser... c'est votre mariage après tout... nous aurons le temps de discuter des devoirs que vous devez au royaume. " dit-il, sérieusement.
Nous nous éloignons d'eux, et alors que je crois pouvoir aller m'asseoir, une valse retentit et je comprends que l'on attend que nous ouvrions le bal. Cela aussi, la gouvernante me l'a appris. Je savais la danser avant, mais il y a des codes particuliers à la cour du château... Johann et moi entamons donc notre première danse. Je me concentre sur mes pas pour ne commettre aucun impair, car le Roi et la Reine nous regardent consciencieusement. C'est à présent que je dois prendre possession de mon rang. C'est ce que m'a expliqué tante Sylvia. Si j'espère jouer un rôle important dans cette hiérarchie et apporter un vent de changement, comme je le souhaite, je dois avancer masquée. Je lève donc la tête et croise les yeux de mon époux. Il m'observe, amusé par ma concentration, et serre sa prise autour de ma taille. Je le regarde silencieusement, refusant de me cacher.
...
Alors que le banquet bas son plein, je me décide à trouver Sylvia, pour lui demander quelques informations. Je me lève et Johann m'attrape par le bras.
Johann : " Où vas-tu, comme ça? "
Adélaïde : " Je voulais aller saluer ma tante, je ne l'ai pas vu depuis longtemps... " mentais-je.
Johann : " Après tout, tu peux aller et venir maintenant, puisque tout le monde sait que tu es la princesse. Vas-y, mais ne t'éternise pas... "
Je ne lui répond pas, trouvant inutile de commencer un conflit tout de suite, mais je sais, que je ne comptes pas lui demander la permission pour aller où que ce soit!
Je fais signe à ma tante pour qu'elle me rejoigne dans un coin de la salle. Elle me rejoint rapidement.
Sylvia : " Que ce passe-t-il? "
Adélaïde : " J'ai bien réfléchit à ce que tu m'as dit... tu as raison, autant utiliser les atouts que nous avons, pour changer une situation désagréable en quelque chose d'utile... Cependant, après avoir lu et relu l'ouvrage que tu m'as donné, plusieurs fois... il y a quelques zones d'ombres que j'aimerais éclaircir... "
Sylvia : " Je t'écoute... " dit-elle, intriguée.
Adélaïde : " Comme tu as pu le constater, Johann est un homme qu'on manipule assez difficilement... "
Sylvia : " Ne crois pas ça ma chérie... tu serais étonnée de voir qu'un homme ne réfléchit pas avec l'organe que tu crois... Il faut que tu ai confiance. En réalité, tu dois le valoriser, en lui faisant croire qu'il est irrésistible, et que l'intimité que vous partager te fait autant plaisir à toi, qu'à lui... Je sais que tu es dans une positon difficile... Je l'ai été... mais personne ne m'a aidé à ce moment là, j'ai dû apprendre ce que je sais en étant livrée à moi-même... "
Adélaïde : " Je t'aime tante Sylvia. " dis-je, en la prenant dans mes bras. " Sache que je te suis reconnaissante... J'ai quelque chose à te demander, encore... "
Sylvia : " Tout ce que tu veux ma chérie. "
Adélaïde : " Ne repars pas tout de suite pour Paris. J'ai encore besoin de toi. "
Sylvia : " Je n'irai nulle part! " dit-elle avec détermination.
Je tourne mon attention dans la direction de mon mari et l'observe un instant. Il discute avec quelques convives, mais quand il sent mon regard sur lui, il lève la tête et me sourit. Si tu savais Johann... tu penses avoir fait un choix judicieux? Mais il est fort probable que sans le vouloir tu ai entamé un changement qui te dépasseras... me dis-je, rassemblant tout le courage dont je suis capable, pour faire face à la nuit qui m'attend.