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Chapitre 5

 

Le visage que Lucia affichait semblait impassible de prime abord, mais de l’intérieur, elle était envahie par une peur panique.

Le risque qu’elle prenait, en se promenant dans un endroit pareil était complètement insensé.   

Ils étaient tout de même dans le lieu de rendez-vous des gens aisés. Le port de plaisance, rien que ça.

Il lui suffisait de tomber nez à nez avec une des connaissances de Vincenzo pour que tous ses efforts soient anéantis.

Si un tel malheur se produisait, elle pouvait à coup sûr, dire adieu à son fils.

Mais qu’est-ce qu’il lui avait pris ?

Pourquoi avait-elle accepter de venir ici ?

Dans un regain de conscience, elle se baissa à la hauteur de Leo et lui dit :

_ Mon cœur, on devrait y aller. Il commence à faire froid.

_ Nan ! J’ai pas froid, protesta l’enfant qui n’avait aucune envie de quitter le ponton, duquel il admirait les embarcations amarrées face à lui. Peut-être que papa, il passera par-là ?

_ Leo, je t'ai déjà dit que papa voyageait loin d'ici, fit Lucia qui comprenait mieux l'intérêt de don fils pour les bateaux.

Que n’avait-elle pas été lui raconter ? Au lieu de lui dire les choses franchement, elle s'était lancée dans un mensonge stupide.

_ Aller, on rentre maintenant.

_ Je veux pas ! Contesta Leo avec force. Je veux attendre encore un petit peu...

_ Leo, on ne peut pas rester ici indéfiniment. On doit y aller, tu m'entends.

Siv aurait voulut intervenir et dire quelque chose, mais il voyait bien que Lucia avait fait de gros efforts sur elle-même, et qu’elle arrivait au bout de ce qu’elle pouvait supporter.

Il la voyait régulièrement s'angoisser lors de leurs sorties, mais à ce point, c'était une première.

_ Leo maman à raison, le temps s'est refroidit le mieux serait de rentrer à l’hôtel.

_ Je veux pas, rechigna l’enfant en croisant ses petits bras de mécontentement. Je reste ici ! Et c’est tout.

_ On ne va quand-même pas te laisser ici tout seul ? Lui dit L’ami de sa mère en faisant appel à son bon sens. Et puis si tu es sage, on pourra revenir une prochaine fois.

Leo ne voulait rien entendre et refusait catégoriquement de décoller de là où il se trouvait.

Lucia qui était trop fatiguée pour négocier avec son fils, le prit dans ses bras pour mettre fin à toute protestation.

La colère de l’enfant fut sans précédant et c’est dans les pleurs et les cris qu’ils quittèrent le port.

A mi-chemin, le petit se calma enfin, puis se blottit contre Lucia l'air résigné.

_ Tu veux que je le prenne un peu, proposa Siv alors qu’ils allaient traverser la place bondée du marché.

_ T’embête pas, on est presque arrivé à la voiture. Et puis il est apaisé maintenant, je pense qu’il va marcher sans faire d’histoires.

Pensant que l'incident était clos, elle posa Leo au sol et lui tendis la main afin qu’il la saisisse.

Loin d’obtempérer, il leva ses grands yeux bleus vers elle et dit non de la tête.

En arborant cet air ombrageux, il lui rappelait en tout point son père.

Et puis il n’y avait pas que physiquement, qu’il tenait de Vincenzo. Leurs caractères aussi, étaient similaires.

_ Tu me donnes la main s’il te plaît, lui ordonna Lucia en soupirant devant la récalcitrance du garnement.

Et alors qu’elle allait le saisir de force, le petit bonhomme se mit à courir au milieu de la foule qui s’était densifiée autour d’eux.

_ Leo ! Reviens ici tout de suite !

Siv qui marchait devant, se retourna en entendant Lucia crier après son fils.

Paniquée comme jamais, la jeune femme fendait la foule tout en essayant de le rattraper.

Ce dernier, en plus d’être vif pour son âge, se faufilait plus facilement entre les gens.

Si bien qu’en un battement de cil, on ne le voyait plus…

 

La houle soulevait à intervalles réguliers, les petits bateaux à moteur que de fines cordes retenaient au ponton.

Les pas de Vincenzo se faisaient lents pour permettre à son regard de contempler la topologie inhabituelle qu’offrait ce grand bassin.

Il commençait à sérieusement envisager d’y venir avec son voilier. Cela le changerait de la méditerranée et ajouterait une destination à son carnet de bord. Enfin pour ça, il lui fallait encore trouver un peu de temps pour lui, ce qui n’était pas gagné dans l’immédiat.

Le téléphone de l’homme retentit ce qui le sortit de ses pensées. Il hésita à décrocher en voyant qu’il s’agissait de Selena. C’était comme s’il savait d'avance ce qu’elle comptait lui proposer.

Vincenzo réfléchit un instant à ce qu’il avait envie de faire ce soir-là.

Rester seul lui aurait fait du bien, mais cela faisait un moment qu’il n’était pas sorti juste pour se détendre.

D’ailleurs la dernière fois qu’il s’était octroyé un petit break, c’était justement en compagnie de cette femme. 

Alors que la dernière sonnerie avait retentit, il se décida à décrocher.

_ Où êtes-vous ? Lui demanda sa future employée d’une voix doucereuse.

_ Je visite votre charmante ville, répondit Vincenzo sans quitter l’horizon des yeux.

Comme il l’avait prédit, la jeune femme voulait le convier à manger.

Seulement, vu comment elle tournait autour du pot, il compris qu’il ne s’agissait pas d’une simple invitation, dans un restaurant quelconque.

_ Ecoutez, on pourrait se faire ça dans un endroit un peu plus intime, qu’en pensez-vous ?

_ Plus intime ? Fit-il mine de demander. Dois-je comprendre que vous voulez que l’on dîne chez vous ?

_ Ou dans votre suite, lui laissa-t-elle le choix. Ainsi on pourrait parler à notre aise de tout les aspects qui concernent la nouvelle direction…

Entendre parler de travail était la dernière chose qui voulait pour sa soirée, et il savait que Selena ne voulait pas le voir pour ça, non plus.

_ Je vous l’ai déjà dit, ce n’est plus moi qui m’occuperait de Navy-Tech dorénavant ? Eclaircit-il à nouveau. Alors en parler ne m’intéresse pas.

_ Très bien, dans ce cas, on discutera de la pluie, du beau temps, ou de ce que vous voudrez. Puis après un long soupir résigné, elle continua avec franchise, la vérité est que vous me plaisez, Monsieur Caruso. Et je comptais sur ce dîner pour me permettre de mieux vous connaitre.

_ Je suis navré, mais je ne sors ni avec mes employées, ni mes collaboratrices.

_ Ça tombe très bien, fit la jeune femme d’une voix affranchie de tout embarras, je ne suis encore ni l’une, ni l’autre, alors rien ne nous empêche d’en profiter…

Selena Lafond avait un bon argument pour le coup.

_ Très bien. Envoyez-moi votre adresse par message.

_ Super, lâcha-t-elle avec enthousiasme. Je vous dis dix-neuf heures chez-moi, dans ce cas.

Vincenzo raccrocha et sourit en recevant le message dans la foulée.

Cette femme avait l’air bien impatiente, songea-t-il avec amusement.

Enfin, s’il voulait vraiment profiter de sa soirée, il devait rentrer se reposer un peu, le vol du matin-même l’avait bien fatigué.

Il venait de franchir la moitié du ponton quand un autre appel retentit.

C’était Natale cette fois. Ne s’attendant pas à ce qu’il allait lui annoncer, il répondit d’une voix détachée :

_ Oui Natale qu’y a-t-il ?

_ Monsieur, vous avez eu mon message ?

_ Désolé, je ne l’ai pas encore ouvert.

_ Je me disais aussi que vous deviez encore être occupé, c’est pour cela que j’ai attendu avant de vous contacter.

_ Que se passe-t-il ?

_ Monsieur, on a retrouvé votre fils, balança de but en blanc le secrétaire qui semblait lui-même ne pas en revenir. On sait où il se trouve…

Vincenzo eut du mal à parler.

Il attendait ce jour depuis tellement longtemps.

Il en avait rêvé un nombre incalculable de fois.

Et enfin… Enfin, il allait pouvoir serrer son fils dans ses bras.

_ Monsieur vous êtes toujours là ?

_ Oui Natale, je t’écoute…

_ Je vais vous envoyer les coordonnées qui ont été fournies lors de l’inscription à l’école. Lorsque vous les consulterez, vous n’en croirez pas vos yeux.

_ Explique-toi ? S'impatienta son employeur qui était au comble de l’anxiété.

_ Vous êtes à moins de deux heures du lieu de résidence de votre femme…

N’en croyant pas ses oreilles, Vincenzo eut besoin de s’accroupir un instant.

Comme le monde est petit, songea-t-il en louant le ciel pour cette nouvelle inespérée.

_ Peux-tu dire à Laure de…

_ C’est déjà fait, Monsieur. Elle arrivera demain matin à la première heure.

_ On se retrouve enfin, Lucia, dit-il pour lui-même après avoir raccroché.

En proie à un déferlement de sentiments et de pensées, il tenta de se calmer.

Récupérer son fils était sa priorité, le reste, il y songerait plus tard. Il avait tout le temps pour faire payer sa femme.

Il avait attendu presque quatre ans, alors quelques jours de plus, ce n’était pas la mer à boire…

  Alors qu’il allait s’en aller, son attention fut attirée par un gamin qui se tenait immobile sur le ponton, le regard au loin.

« Il semble bien petit pour être là tout seul, songea Vincenzo qui balaya les alentours à la recherche de son accompagnateur. »

Personne à l’horizon. Cet enfant e baladait au bord de l’eau sans la moindre surveillance.

Dépassé par la négligence de certains parents, il l’approcha doucement et se mit à sa hauteur.

_ Dis-moi gamin ? Tu es tout seul ici ?

L’enfant se tourna vers l’homme et plongea son regard bleu dans le sien.

_ Oui, je regarde les bateaux…

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