Chapitre 2
Liath avançait lentement sur la route glacée qui menait au village de Morsgrove. Le vent mordant de l'hiver soufflait à travers ses vêtements, mais elle n'y prêta guère attention. La détermination qui l'habitait réchauffait son esprit, malgré le froid. Les arbres autour d'elle, couverts de neige, semblaient observer son arrivée avec une curiosité silencieuse.
Elle aperçut enfin les premières maisons du village. Les toits de chaume étaient lourdement chargés de neige, et des cheminées s'échappaient des volutes de fumée. L'endroit semblait figé dans le temps, épargné par les tumultes du monde extérieur. Pourtant, Liath savait que sous cette apparente tranquillité se cachait une terreur latente.
En entrant dans le village, elle ressentit immédiatement les regards des habitants posés sur elle. Des visages méfiants apparaissaient aux fenêtres, et quelques passants s'arrêtaient pour la dévisager, avant de détourner rapidement le regard. Elle ajusta son sac sur son épaule et continua son chemin, ignorant les murmures qui se propageaient dans son sillage.
Elle arriva enfin devant la taverne du village, une bâtisse robuste faite de pierres et de bois. La pancarte au-dessus de la porte oscillait doucement sous le vent, indiquant "La Taverne de la Lune Rousse". Elle poussa la porte, et une bouffée d'air chaud et de conversations animées l'accueillit.
L'intérieur de la taverne était chaleureux et accueillant, un contraste frappant avec le froid extérieur. Les murs étaient décorés de trophées de chasse et de peintures représentant des scènes de la vie quotidienne à Morsgrove. Des tables en bois lourd étaient disposées autour de la grande cheminée où crépitait un feu réconfortant. Les villageois, assis autour de leurs pintes de bière et de leurs repas, se tournèrent tous pour regarder la nouvelle venue.
Liath se dirigea vers le comptoir, où un homme à l'air bourru et aux cheveux gris servait des boissons. Il leva les yeux vers elle, ses sourcils se haussant légèrement en signe de curiosité.
— Bonjour, lança-t-elle en essayant de paraître aussi détendue que possible. Je cherche une chambre pour la nuit.
L'aubergiste hocha la tête et posa son torchon sur le comptoir.
— Bien sûr, mademoiselle. Vous êtes nouvelle dans le coin, on dirait. D'où venez-vous ?
— De la ville, répondit Liath en évitant de trop en dire. Je suis ici pour... des affaires familiales.
L'homme lui jeta un regard scrutateur, mais ne posa pas plus de questions. Il prit une clé accrochée au mur derrière lui et la tendit à Liath.
— Chambre numéro trois, à l'étage. Le dîner est servi jusqu'à neuf heures, et le petit-déjeuner à partir de sept heures. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez-moi. Je m'appelle Garret.
— Merci, Garret, répondit Liath avec un sourire reconnaissant.
Elle monta l'escalier en bois, qui craquait sous ses pas, et trouva sa chambre. C'était une petite pièce simple mais propre, avec un lit confortable et une fenêtre donnant sur la rue principale du village. Elle déposa son sac et s'assit sur le lit, laissant échapper un soupir de soulagement. Elle était enfin arrivée à Morsgrove.
La fatigue de son voyage commençait à se faire sentir, mais Liath savait qu'elle ne pouvait pas se permettre de perdre du temps. Elle avait une mission à accomplir et chaque minute comptait. Elle sortit les notes de son père de son sac et les relut attentivement. Les pages étaient remplies de descriptions détaillées des légendes locales, de symboles étranges et de références à une mystérieuse amulette d'argent.
Son père, un chercheur en mythologie passionné, avait toujours été fasciné par les histoires de créatures surnaturelles. Lorsqu'il avait entendu parler de la malédiction de Morsgrove, il n'avait pas pu résister à l'envie de venir enquêter. Mais depuis sa disparition, Liath n'avait plus eu de nouvelles de lui. Les autorités locales avaient conclu qu'il s'était perdu dans la forêt ou avait été victime d'un accident, mais Liath ne pouvait pas se résoudre à accepter cette version des faits.
Elle rangea les notes et descendit à la taverne pour dîner. L'endroit était moins animé maintenant, mais il restait encore quelques clients. Elle s'assit à une table près de la cheminée et commanda un ragoût de bœuf et une bière. Alors qu'elle attendait son repas, une femme d'âge moyen, aux cheveux bruns et au sourire chaleureux, s'approcha de sa table.
— Bonsoir, je m'appelle Martha, dit-elle en s'asseyant sans y être invitée. Je suis la femme de Garret. Vous êtes nouvelle ici, n'est-ce pas ?
— Oui, je suis Liath, répondit-elle en souriant poliment. Enchantée de vous rencontrer, Martha.
— Que faites-vous à Morsgrove, si je puis me permettre de demander ?
Liath hésita un instant avant de répondre. Elle savait qu'elle devait être prudente avec les informations qu'elle partageait.
— Je cherche des réponses sur la disparition de mon père. Il était ici pour des recherches sur les légendes locales.
Le visage de Martha s'assombrit légèrement.
— Ah, je vois. Votre père était ce chercheur qui est venu il y a quelques mois. Je suis désolée pour ce qui lui est arrivé. C'est une histoire bien triste.
— Vous le connaissiez ? demanda Liath, son intérêt éveillé.
— Pas personnellement, mais tout le monde ici a entendu parler de lui. Il a passé beaucoup de temps à parler aux anciens du village, à explorer la forêt. Il semblait déterminé à découvrir quelque chose.
— Et vous savez ce qu'il cherchait précisément ? insista Liath.
Martha jeta un coup d'œil autour d'elle, comme pour s'assurer que personne ne les écoutait, puis se pencha légèrement en avant.
— On dit qu'il cherchait une ancienne amulette d'argent, quelque chose qui pourrait lever la malédiction qui pèse sur notre village. Mais personne ne sait vraiment où elle se trouve, ni même si elle existe vraiment.
Le cœur de Liath battait plus fort. C'était exactement ce dont parlaient les notes de son père.
— Merci, Martha. Votre aide m'est précieuse.
— Soyez prudente, Liath, murmura Martha en se levant. La forêt est dangereuse, surtout la nuit. Et méfiez-vous de ceux qui ne veulent pas que vous découvriez la vérité.
Liath hocha la tête, absorbant les paroles de Martha. Elle avait l'impression d'être enfin sur la bonne voie, mais elle savait que le chemin serait semé d'embûches. Son repas arriva, et elle mangea en silence, réfléchissant à ce qu'elle venait d'apprendre.
Après avoir terminé son dîner, Liath décida de se promener un peu dans le village avant de retourner à sa chambre. L'air froid de la nuit était vivifiant, et elle espérait que cela l'aiderait à clarifier ses pensées. Elle marchait dans les rues pavées, observant les maisons éclairées par la lueur vacillante des bougies et des lampes à huile.
Elle s'arrêta devant une petite boutique dont la vitrine était remplie d'objets curieux : des livres anciens, des amulettes, des herbes séchées. Une pancarte indiquait "Boutique d'antiquités de Morsgrove". La porte était fermée, mais une lumière à l'intérieur indiquait que quelqu'un était encore là.
Liath frappa doucement à la porte, espérant que le propriétaire serait disposé à parler. Quelques instants plus tard, la porte s'ouvrit et un vieil homme aux cheveux blancs et à la barbe soignée apparut.
— Bonsoir, jeune dame. Que puis-je pour vous à cette heure tardive ?
— Bonsoir, monsieur. Je m'appelle Liath. Je cherche des informations sur les légendes locales et la malédiction du loup-garou. On m'a dit que vous pourriez m'aider.
Le vieil homme la regarda avec des yeux perçants, semblant évaluer sa sincérité.
— Entrez, entrez. Je m'appelle Edgar. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait vous intéresser.
Liath entra dans la boutique, émerveillée par la quantité d'objets anciens et mystérieux qui l'entouraient. Edgar la conduisit à l'arrière de la boutique, où une petite bibliothèque était remplie de livres poussiéreux et de parchemins anciens.
— Votre père est venu ici il y a quelque temps, dit Edgar en cherchant un livre sur l'une des étagères. Il était très intéressé par nos légendes. Il a acheté plusieurs de ces livres.
Il tendit à Liath un volume épais et relié de cuir.
— Ceci pourrait vous être utile. C'est un recueil de contes et de légendes de Morsgrove. Certaines histoires parlent de l'amulette d'argent.
Liath prit le livre avec gratitude.
— Merci beaucoup, Edgar. Vous avez été d'une grande aide.
— Faites attention, jeune dame, avertit Edgar en la raccompagnant vers la sortie.
La quête de la vérité peut être dangereuse. Certaines choses devraient peut-être rester dans l'ombre.
Liath hocha la tête, consciente des risques mais résolue à continuer. Elle retourna à la taverne, le livre serré contre elle comme un trésor précieux. En arrivant dans sa chambre, elle alluma la lampe à huile et s'installa à la table pour commencer sa lecture.
Les heures passèrent alors qu'elle dévorait les pages du livre. Les histoires parlaient de créatures mythiques, de héros et de malédictions. Mais ce qui retint particulièrement son attention, c'était une légende concernant une amulette d'argent, censée avoir été forgée par un ancien mage pour enfermer l'esprit d'un loup-garou et lever la malédiction. Selon la légende, l'amulette était cachée dans une cabane abandonnée au cœur de la forêt.
Les premiers rayons du soleil commençaient à percer à travers la fenêtre lorsque Liath referma le livre, épuisée mais déterminée. Elle savait maintenant où elle devait aller. La cabane dans la forêt. Mais elle devait être prudente et bien préparée. Les dangers étaient réels, et elle ne pouvait pas se permettre d'échouer.
Elle se coucha enfin, laissant son esprit vagabonder vers les mystères qui l'attendaient. La cabane dans la forêt, l'amulette d'argent, et la malédiction du loup-garou. Tout était lié, et elle était déterminée à découvrir la vérité, quelle qu'en soit la conséquence.