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Chapitre 3

De couleur blanche et noire, elles sont particulièrement élégantes. Je pourrais presque les qualifier de pittoresques avec cette ravissante petite cour qui permet d'accéder au perron. Agathe et Karl habitent au 1807 Seymour Street, un grand pavillon divisé en plusieurs logements, trois pour être exacte. Le leur est situé au deuxième étage et si je me réfère à la seule porte du palier, je dirais que non seulement il est très grand, mais qu'en réalité, c'est l'étage entier qui leur appartient. De l'extérieur, la maison était déjà, de par son architecture typiquement anglaise, très jolie, pourtant c'est une fois à l'intérieur que je prends la mesure des proportions, stupéfaite par le style et l'agencement. L'extrême luminosité de l'appartement est sublimée par la décoration raffinée et colorée. L'espace s'ouvre sur une cuisine moderne, fonctionnelle qui allie subtilement l'acier et le bois. Elle est habilement séparée du salon par un îlot gigantesque. Je dirais que le salon est, quant à lui, deux fois plus grand et mon regard est aussitôt happé par une immense bibliothèque en chêne clair à laquelle viennent s'ajouter des canapés moelleux de couleur crème qui structurent la pièce. De vastes et hautes fenêtres nous entourent et de très nombreux tapis sont disposés au sol pour donner encore un peu plus de cachet à l'ensemble. Le tout confère une ambiance chaleureuse et cocooning. Je peux dire que l'on s'y sent tout de suite très bien. La visite se poursuit sur le même ton : je découvre en plus du reste deux belles chambres là encore soigneusement décorées. - Waouh... Agathe, c'est tout simplement fabuleux ! Je pense que c'est la troisième fois que je lui dis, mais je ne peux pas m'en empêcher, il est réellement somptueux. Merci, ça me touche, me répond-elle en rigolant. Tu sais j'ai dépensé beaucoup d'énergie, je voulais à la fois garder l'âme du lieu tout en le modernisant. Ce qui crois-moi, n'a pas été facile surtout avec nos horaires tardifs, ajoute-t-elle. - C'est top, j'adore, je lui répète encore. Je sais qu'ils ont des emplois du temps fort chargés et c'est ce qui rend le résultat encore plus méritant. Agathe m'épatera toujours. - Tu veux boire quelque chose ? me demande-t-elle une fois la visite terminée. - Non, je t'invite prendre un petit-déjeuner à l'extérieur. Et puis, c'est mieux de se diriger vers les boutiques pour ne pas perdre de temps, tu ne penses pas ? Autant en profiter un maximum, je lui lance en enfilant mon manteau. - Oui, tu as tout à fait raison, c'est parti, conclut-elle en m'emboîtant le pas vers la sortie. Sur ce, nous débutons notre journée, entre sœurs, comme je les aime. La veinarde... Les magasins se trouvent à seulement quelques rues de son quartier. En chemin, nous nous arrêtons prendre un café à emporter au Starbucks, puis nous nous engouffrons dans le métro afin de rejoindre Oxford Street et ses commerces. Il y en a vraiment pour tous les goûts et avec les décorations de Noël installées, la rue qui s'ouvre devant nous a quelque chose d'incroyablement magique. Tout y est : les guirlandes illuminées, les sapins gigantesques, les chants de saison... Même les effluves de cannelle et de pain d'épices flottent dans l'air ! Nous enchaînons donc les boutiques en remontant l'avenue avant de nous arrêter déjeuner chez Selfridges, un club sandwich au saumon et un thé. L'après-midi est tout aussi sympathique, nous papotons de tout et de rien, nous avançons sur les cadeaux, et je déniche même quelques idées pour mes futures créations. J'échange beaucoup avec Agathe, ce qui me permet de me libérer un peu. En tout début de soirée, nous nous occupons d'acheter le dîner - au menu, sushis et cupcakes - avant de rentrer tout préparer en attendant l'arrivée de Karl. A son air, je comprends qu'elle se fait du souci à mon sujet et plusieurs fois durant la journée, je la surprends en train de me détailler. J'échappe sur l'instant à son interrogatoire, mais je sais que le n'y couperai pas bien longtemps. Karl rentre peu avant vingt heures. S'ensuit après une excellente soirée où nous dinons en nous délectant d'un bon vin tout en établissant la journée du lendemain. Et si j'en crois le programme qui commence à se ficeler, ce sera un après-midi touristique puisque Agathe et Karl travaillent le samedi matin. Epuisées, Agathe et moi nous couchons aux alentours de vingt-trois heures après avoir tout nettoye. Karl, quant a lui, s'enferme dans son bureau et se remet au boulot. Il faut savoir qu'il travaille énormément et il n'est pas rare que ma sœur se retrouve seule le soir. Mais comme elle me l'a dit un jour : « il ne m'a rien caché et je le respecte trop pour lui demander de choisir. » Ce jour-là, j'ai su qu'elle était profondément mordue ! Lorsque je me réveille le lendemain vers neuf heures, je suis joyeuse et particulièrement de bonne humeur. Je décide, une fois n'est pas coutume, de prendre mon temps. Je paresse longtemps dans le lit avant d'aller petit-déjeuner. Quelle n'est pas ma surprise lorsque je m'apercois qu'il est déjà prêt sur la table ! Tout y est : pancakes, brioche, confiture, beurre... J'en ai l'eau à la bouche. Je me dirige vers la machine à café où je n'ai plus, là encore, qu'à appuyer sur le bouton. À l'instant où je m'empare de mon portable afin de remercier ma frangine pour sa délicate attention, il se met au même moment à sonner : c'est justement elle. - Salut, Agathe, j'allais justement t'appeler. Merci d'avoir dressé le petit-déj ! je lui lance, amusee parla situation. Oh, ce n'est rien, c'est normal. Dis-moi, Karl a oublié un dossier très important à la maison, sur son bureau. II en a besoin pour une réunion ce midi, et je ne peux pas me libérer. Est-ce que par hasard tu accepterais de le lui apporter ? Je suis navrée de te déranger avec ça... s'excuse ma soeur gênee. Pas de problème. Je n'avais rien prévu de toute façon, mis à part réviser et cela me donne une bonne raison de ne pas le faire. - Merci, tu me sauves vraiment, là, Ema, insiste-t-elle avant d'ajouter : Karl m'a affirmé qu'il les lui fallait assez rapidement alors désolée de te presser, mais... - Je file sous la douche et je pars, je lui réponds en me dirigeant illico dans la salle de bain Si tu veux bien m'envoyer l'adresse de son boulot ainsi qu'un numéro de téléphone des taxis par message, tu serais un amour, je la taquine. Elle m'explique de quel document il s'agit, et je décide de prendre tous ceux qui s'y trouvent par mesure de sûrete. On n'est jamais trop prudent... enfin, je ne suis jamais trop prudente! Bon, c'est vai que j'avais prévu un tout autre programme - à savoir buller à la maison - dans lequel je me serais préparée à la dernière minute avant qu'ils ne rentrent tous les deux. Ce n'est pas plus mal, parce qu'au moins, j'en profiterai pour aller me balader, sortie pour sortie! - Je te commande ta voiture, tu n'auras plus qu'à descendre dans disons quarante-cinq minutes, c'est bon pour toi ? me questionne-t-elle. - Parfait, préviens Karl de mon arrivée. Tchao, à tout à l'heure, je lui réponds pressée. Je raccroche et fonce me préparer. Je file sous la douche, me lave les cheveux en un temps record et tant pis s'ils restent mouillés. J'enfile un jean noir moulant qui, sur ma peau encore humide, me donne quelques difficultés avan de passe ou beice a co roue e de chausser mes potes cavalleres. ve me macule tres légèrement, j'applique ma BB crème, un peu de mascara et une touche de baume à lèvres, puis je traverse l'appartement quasiment en petites foulées. Je mets ma veste en cuir et me pare de mon attirail grand froid tout en dévalant l'escalier. J'indique l'adresse au taxi qui m'attend déjà sur le trottoir. Le trajet dure une quinzaine de minutes et, en un peu plus d'une heure montre en main, je me trouve devant l'immeuble où Karl travaille. Une tour immense faite d'acier et de verre. Lorsque j'entre, je me retrouve dans un vaste hall moderne, j'irais même jusqu'à dire aseptisé, où de nombreuses personnes déambulent et se croisent sans se voir ; sans me voir. J'ai comme l'impression d'être dans une ruche tant cela grouille de monde. Je m'approche de l'accueil où l'une des jeunes réceptionnistes me toise du regard en guise de salut et de bienvenue. II est vai que je ne porte pas vraiment la tenue visiblement de rigueur, puisqu'aussi bien les hommes que les femmes sont vêtues de costumes et de tailleurs. Oui, je détonne quelque peu dans le décor. Sans s'attarder sur moi, elle m'oriente prestement vers le dernier étage avant de vaquer à autre chose comme si je n'étais plus là. OK, le ton est donné. Je me dirige vers 'ascenseur qui s'ouvre sous mes yeux alors que je suis encore a quelques mètres de lui. Je me rue à l'intérieur tandis que les portes se referment, coinçant au passage le porte- documents entre elles. Inutile de m'interroger sur comment j'ai réussi une prouesse pareille, c'est simplement inné chez moi. Je ne sais pas si la fée Maladresse s'est penchée sur mon berceau à ma naissance, mais toujours est-il qu'il n'y a que moi pour être aussi empotée! Je tire de toutes mes forces sur le porte-document pour le faire entrer avec le reste de mon corps dans la cabine et dans l'élan, je m'affale sur les fesses tandis que les papiers s'éparpillent tout autour de moi . Comble du comble, je ne suis pas seule. Pensez-vous que les quelques personnes présentes m'aideraient à me sortir de ce mauvais pas ? Non, bien sûr que non, voyons, ce serait trop leur demander, ils finiraient par froisser leurs chemises ! Ma dignite pietinee, je ne peux m'empêcher de murmurer une insulte dont moi seule ai le secret : « Non, ne vous dérangez surtout pas, bande de mollusques mononeuronaux. » Je tente en vain de les ramasser lorsque, dans la précipitation, j'en perds à nouveau la moitié. Je m'énerve une fois de plus contre mon inhabileté et l'inaction de mes congénères. Rouge de rage, je finis de rassembler mes affaires, bafouille un vague « sorry » qui m'arrache presque la langue et me relève en jetant un rapide coup d'œil sur les personnes qui m'entourent. Elles mériteraient toutes de s'affaler tête la première en sortant, et toc ! J'apercois cinq personnes. La plupart d'entre elles ne me prêtent aucune attention, pourtant mon regard est aussitôt happé par un bruit étouffé qui parvient de derrière moi. Au fond, adossé à la paroi, je distingue vaguement un type qui lui me scrute. Je n'arrive pas à bien le voir tant la place où il se tient est sombre. En temps normal, je n'aurais pas insisté, mais là, je ne sais dire pourquoi il m'intrique.

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