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1 - Le désespoir d'Alexandra

Alexandra Bernsberg est allongée sur l'herbe. Elle observe le ciel avec beaucoup d’émotions. L’astre brille de milles feux. Un horizon bleu, parsemé de nuages d'une blancheur immaculée s'offre à elle, telle une magnifique peinture romantique. D’habitude cet agréable tableau, lui procure beaucoup de bonheur. Or aujourd’hui, il évoque la tristesse, et surtout l’impuissance. L’âme en peine, elle prend conscience qu’elle ne pourra plus s'émerveiller devant ce fabuleux spectacle qui l’épaule quotidiennement depuis son enfance. Elle doit rejoindre la famille du prince qu’elle doit épouser, les aînés en ont décidé ainsi.

Elle ne peut même pas en débattre avec ses parents. Bien que son père soit très sensible au bien-être de sa fille, il reste intransigeant quant au mariage. Il n’a pas tenu compte des protestations de la jeune femme. Un engagement avec un ami ne peut être rompu sans l’accord des deux parties. Elle devine qu’il n’en discutera pas du tout, parce que ce mariage l’arrange. Ses propres désirs n’ont aucune valeur dans ce genre d’union planifiée. Elle s’y oppose, mais n'a pas réellement le choix. « Quand on naît princesse, on doit se conformer aux exigences liées à son rang ». Cette phrase, elle l’a entendue une multitude de fois depuis des années tout au long de son éducation.

Plus elle regarde le ciel, plus elle a l'impression que ce dernier veut l'enlacer pour la réconforter. Son chagrin ne s'en accentue que plus. Une larme coule le long de sa joue, elle a peur de son avenir et de l’inconnu qui le caractérise. Elle a un mauvais pressentiment, un pincement au cœur qu’elle doit prendre comme un avertissement. Elle a décidé d'être courageuse et d'affronter cette position avec la meilleure attitude possible, pour l’instant. Mais cela ne l'empêche pas d'être anxieuse. En quelque sorte, c'est comme si on lui volait son existence.  A peine 17 ans, et elle doit se comporter comme une femme adulte. Ce n’est pas vraiment ce qu’elle attendait de la vie.

Son futur mari, comment est-il ? Elle chasse cette question de son esprit, elle ne recherche pas à lui accorder plus d'attention que nécessaire. Peu importe, elle espère trouver un moyen pour pouvoir le faire réagir en sa faveur. Elle serre les lèvres, elle évitera d’être proche de lui. Sa décision est prise. Elle fera tout pour persuader ce prince de ne pas l’épouser, même si elle doit mal se comporter et faire honte à sa famille. Après tout, on ne tient pas compte de sa volonté, elle n’aura aucun scrupule à ridiculiser ses parents. Enfin, si elle peut dissuader le prince sans en arriver à ce point, ce serait, évidemment, bien mieux pour tout le monde.

Elle pose à nouveau ses yeux sur le paysage environnant, ce splendide jardin qui lui inspirait tant de chansons. Elle chante à gorge déployée, et sa voix magnifique résonne dans la vallée. Elle chante plutôt bien, les jolies notes ravissent les badauds de la citadelle, quotidiennement. Comme un rituel, la mélodie se répercute en écho jusque la basse ville, et, émerveille les oreilles indiscrètes. Son talent pour le chant, n’est plus un secret pour tout habitant du royaume.

En cette veille de départ, son chant se fait, pourtant, mélancolique, contrairement à d’habitude. Toute sa tristesse et son désespoir s'entendent dans les intonations. Elle cache difficilement son chagrin. Sa voix s’éteint à la fin des phrases parce qu’elle retient ses larmes. Elle fait ses adieux à cet endroit magique, remplis d’inoubliables souvenirs d’enfance. Un goût d’amertume remplit sa bouche, lui donnant la nausée. Elle inspire fortement pour chasser l’angoisse qui resserre son estomac. Les attentions de son père, et la complicité de sa mère vont lui manquer, bien qu’elle soit en colère contre eux. Elle laisse, à regret tous ses repères dans la vie derrière elle. Elle se sent totalement démunie, comme quelqu’un qui doit affronter une trahison. Et si cette famille qui va l’accueillir est trop autoritaire ! Elle ferme les yeux, ses larmes contenues avec difficulté s’éparpillent sur ses joues. « C’est trop dur ! Comment je dois affronter cette situation préoccupante, et ne rien laisser deviner aux autres ? Je ne suis qu’une jeune fille fraîchement élevée, et qui ne connaît rien à la vie et surtout aux hommes. Quand je pense à ma vie avec ces nouvelles têtes, j’en frissonne. « Pourquoi je me retrouve dans cette situation ? » Elle a envie de hurler ! Elle se révolte intérieurement.

Comme s'il avait entendu son appel au secours, le soleil se manifeste en étalant ses rayons en corolle autour d’elle pour lui réchauffer le cœur. Elle se sent si proche de la nature, qu'elle pense parfois que les éléments évoluent au gré de ses humeurs. Elle sourit à cette pensée. Ce serait tellement bien ! L'abandonner, lui donne l'impression de quitter un ami très cher. Un nouveau pincement au cœur lui rappelle à quelle point sa situation est dramatique. Elle respire avec difficulté, elle manque d’air, elle suffoque.

Elle est ramenée à la réalité lorsqu'elle entend son valet l'appeler. Elle doit rentrer au château, il y a du nouveau concernant son départ. C’est le coup de grâce, ses jambes tremblent. Elle essuie rapidement ses larmes, et respire à pleins poumons pour se donner du courage. Désormais, elle ne peut plus faire marche arrière. Lorsque son valet la rejoint, elle se rend compte qu'elle ne peut plus échapper à son destin, elle doit, au contraire, l’affronter.

Elle suit Melquior à contre cœur. Arrivée aux abords de la cité basse, elle se refait un visage serein et fier, celui de la princesse qu'elle est, et, qui assume son rôle, ainsi que les contraintes qui s'y rattachent. On lui a enseigné la dignité en toutes circonstances, même dans les plus déplorables. Elle doit montrer l'exemple, ses responsabilités sont extrêmement lourdes pour ses frêles épaules. Elle supporte cette vie depuis son enfance. Elle chasse ses idées noires de son esprit pour se concentrer sur son arrivée dans la citadelle.

Les chevaux arrivent dans la cour du château. Leurs sabots foulent le sol dans un fracas qui brise le silence et force les sujets présents à tourner la tête vers eux. Ils la saluent tous avec respect. Son père l'accueille à bras ouverts et l'informe que des chevaliers du prince Edmund Dambourg sont arrivés pour escorter sa future princesse et sa famille jusque son château. Il lui confirme que le départ est prévu pour demain, et lui conseille de se hâter de dîner et de se préparer pour la nuit. Elle doit se reposer le voyage sera long et épuisant. Elle écoute son père et ses recommandations. Elle ne dit mot, argumenter serait vain. De bonne grâce et en fille obéissante, elle s'exécute, totalement résignée et anéantie en même temps. Du moins, en apparence, cela ne servirait à rien de faire un scandale, maintenant.

Alexandra :

Je suis inquiète pour demain, et j'ai une impression désagréable concernant notre voyage. Je n'arrive pas à m'endormir. J’ai plutôt envie de pleurer sur mon triste sort. Comment est le prince ? Est-ce qu'il est contre ce mariage, lui aussi ? J’espère ! Et s’il ne partage pas mon désaccord ? Je ne veux pas lui accorder plus d'importance, mais je ne peux pas m'empêcher de penser à mon avenir avec lui. Je souffle, c'est tellement injuste ! Je me sens trop impuissante, incapable de parler davantage.

J'essaie de calmer mon esprit et de faire le vide dans ma tête. Je suis préoccupée, et je peine à m'endormir. Je ferme les yeux à plusieurs reprises, pour oublier mes malheurs, jusqu'à ce que je finisse par m'endormir.

Un murmure dans mes oreilles me force à ouvrir les yeux. C'est mon serviteur, il me réveille aux premières lueurs du jour. J’ai mal dans mon cœur ! Je revêt mon vêtement de voyage, et avant de quitter définitivement ma chambre, je l'observe. C'est la première fois que je quitte mon cocon, et j'avoue que cela me perturbe énormément. On m’arrache de force à mes habitudes.

Je m'encourage en me persuadant que je vais parvenir à convaincre le prince de refuser ce mariage. En tous les cas, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’il partage mon opinion et ma réticence quant à notre union. Nous nous sommes vus la dernière fois quand nous étions enfants. Je souris. Je me souviens de ce garçon blond, courageux et un peu imbu de sa personne. Il ne m’a pas vraiment fait bonne impression, bien que je me souvienne qu’il était séduisant. Puis, me reviennent en mémoire les paroles de mes dames de compagnie à savoir, je dois me comporter comme une épouse modèle. Tel est le rôle d'une demoiselle de la noblesse. Je serre les lèvres. Désolée, je n’ai pas envie de me comporter comme une demoiselle de la noblesse. S’il pouvait déjà aimer quelqu’un et être contre ce mariage !

Je ne suis pas dupe. Je sais comment cela se passe au château, surtout pour les princes. Toutes les femmes de la cour doivent le courtiser, et il n'a que l'embarras du choix. C'est avec ses idées préconçues que je me dirige vers mon avenir. Ce serait une bonne aubaine pour moi. Enfin, j’imagine que même si c’était le cas, on m’obligerait à me marier avec le prince. Ce genre d’argument n’entre pas en compte pour annuler un mariage, et, je n’ai franchement pas envie d’être l’épouse d’un homme qui cumule les maîtresses.

Le cortège se dirige vers le royaume du roi Gaubert Dambourg, l'ami de toujours de mon père. Ils ont mené tellement de batailles ensemble pour défendre leurs territoires respectifs des attaques extérieures. Jusqu'à ce que leurs ennemis comprennent qu'il était vain d'essayer de les conquérir. C'est à cette époque qu'une alliance entre nos familles a été conclue. En unissant leurs forces, ils pourraient maintenir notre sécurité et notre sérénité. Je vais faire en sorte que cette alliance ne se réalise pas, et peu importe si je dois décevoir mon père. Je ferais tout ce qui sera en mon pouvoir pour annuler cet engagement unilatéral et non consenti.

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