Dos Para Una

Regard rivé sur son ordinateur posé sur ses jambes, William tape avec ses doigts sur son clavier. L'estomac noué, j'observe en silence mon beau mari. Bientôt, il débarrassera sa tasse, la placera dans le lave-vaisselle tout en chantonnant sa meilleure chanson en espagnol, puis il filera après avoir déposé un baiser mentholé et rapide sur mes lèvres. Je commence à m’habituer à lui depuis quatre ans maintenant, donc ça m'amuse de lancer des paris pour distraire mes pensées. Puis, ça m’arrange, ça fait passer le temps que j’attends pour que mon fils se réveille.

William : Pourquoi tu me regardes comme ça ? Lâche-t-il en souriant.

-Je ne sais pas. Réponds-je en imitant son sourire.

William : Je vois, Querida...

-J’y vais. Je dis rapidement avant de me lever pour sortir de là pièce.

William est un homme d'habitude, il aime sa routine, c'est sans doute la raison pour laquelle ça fonctionne entre nous. On s’est habitué à notre petite routine et je suis plutôt satisfaite. Du moment que je partage ces merveilleux moments avec l’homme que j’aime. De plus, une journée qui démarre de façon ordinaire on ne peut qu'être garanti que tout se passera bien, non ? Mais, pourquoi ai-je ce nœud persistant à l'estomac ?

Peut-être parce qu'aujourd'hui, après cinq ans en tant qu'assistante de Pétrus Salom, mon père. Je vais enfin pouvoir prendre les rênes de notre entreprise. Je sais que le calme et l'expérience de mon ancien Boss me permettront d'agir en toute efficacité.Toujours maître de la situation ; des ordres précis, des demandes claires ; professionnel jusqu'au bout des ongles. Il ne laissait transparaître à personne que j'étais sa fille.

Cette capacité d'être aussi distant et glacial avec moi me met froid dans le dos.

Je monte à l'étage pour réveiller mon fils. En ouvrant la porte de sa chambre, je le retrouve allongé sur son lit profondément endormi. Je souris. Voir cette merveille devant moi chaque jour m'émeut. Il y a quelques années seulement il arrivait à peine à marcher et le voilà tout grand. 6 ans et toutes ses dents.

Je m'assieds sur son lit et caresse ses cheveux pour l'aider à se réveiller. Je m'approche de lui pour glisser un bisou sur son front, en chuchotant Despierta cariñito, (Réveille-toi, mon petit bébé ). Son père adore le réveiller en disant cette phrase, alors depuis c'est tous les matins comme ça.

Jolan : Hum...Dit-il en s'étirant.

-On doit se préparer. Moi pour le travail et toi pour ta nouvelle école.

Il sourit en ouvrant les yeux.

Jolan : Après j’irai au foot avec papa ?

Je hoche la tête en souriant.

-Bien sûr que oui, mon amour. Mais d’abord on se réveille pour aller à l’école.

Jolan : J’ai droit à un câlin ? Dit-il en me tendant ses bras

Je le souris en le serrant fort contre moi, j’aime cet enfant.

Jolan : Maman ? Dit-il en se détachant de moi.

-Oui ?

Jolan : Maman ? Insiste-t-il une seconde fois en se redressant.

Je fronce les sourcils en lui répondant :

-Oui, que ce qu’il y a ?

Jolan : Réveille-toi, on va être en retard ! Il continue un peu plus fort. Maman ?

Il me secoue jusqu’à ce que je me rende compte que ce n’était qu’un rêve. J’ouvre les yeux en regardant mon fils posé à côté de moi. Je me redresse en passant mes mains sur mon visage. C’était encore un rêve.

Jolan : Maman, on va être en retard. Il dit en enlevant la couette qui est sur moi.

-Quel heure est-il ? Je dis un peu dans les vapes en attrapant mon téléphone sur la table de chevet.

Je l’allume et ferme les yeux. Il n’était que sept heures du matin, heureusement mon fils est venu à temps pour me réveiller parce que je pense qu’on aurait pu rater son premier jour dans sa nouvelle école.

-Jolan. Je dis en soufflant. Il n’est que sept heures du matin, on a tout le temps, ok ? Alors vas t’habiller, je te rejoins dans 20 minutes. Je dis en sortant de mon lit.

Jolan : D’accord. Il finit par dire avant de sortir de ma chambre.

J’enfile mon peignoir, les larmes aux yeux. Me revoilà, encore en train de rêver de lui, de nous, de notre famille quand tout allait bien. Ce n’est pas la première fois que je fais ce genre de rêve. Cet homme a fait partie de ma vie, c’est le père de mon enfant et j’ai l’impression que j’arrive pas à me faire à l’idée qu’il soit parti. J’essuie mes larmes avec mes mains en m’observant sur le miroir de ma salle de bain.

J’ai essayé plusieurs fois de le contacter pour connaître ses raisons, cette décision qui l’a prise sans même m’en faire part. Mais je n’ai eu aucune nouvelle de lui, les membres de sa famille vivent tous au Mexique. Je ne me sens pas bien. Je pensais qu’on était heureux ensemble ; on s’est marié, on a eu un enfant tout ça pour qu’il finisse par nous... abandonner ?

Je me sens coupable d’être encore amoureuse de lui...