03
****Nathalie MOUKOURY****
Je raccroche n’étant pas sûre d’avoir bien entendu. Déjà qu’ici au bureau c’est de plus en plus tendu. M. AMBASSA cherche la moindre faille pour me crier dessus ! Je vais faire comment maintenant pour sortir d’ici ? Je me lève et vais voir la jeune stagiaire Michèle des ressources humaines. Une fillette sans histoire dans la jeune vingtaine à tout casser qui est assise dans le bureau dédié aux ressources humaines
- (Limite chuchotant) Hey ! Michèle ! Michèle !!!
- (Me regardant enfin) Oui ?
- Stp couvre-moi à mon poste. Une urgence
- Ok ok…..
Je suis sortie des locaux sans demander mon reste et j’ai pris une moto en course pour la maison. Dans ce genre de cas on ne calcule pas trop. Je lui ai jeté son billet de 1000frs en courant vers ma chambre. Quand j’y entre, Rose et Ken sont penchés sur quelque chose… ou quelqu’un
- Maman toi-même regarde ! Ils ont abandonné l’enfant là ici !
Je prends le papier qu’il me tend et le parcours. Je sens ma tension monter, mon sang devenir chaud dans mes veines !
- Ken porte l’enfant-là et suis-moi !
- Tu l’emmènes où ? Me demande Rose
- Je le ramène d’où il vient
- Tu sais d’où il vient ?
- (Je regarde Ken) Réponds à la question !
- (Penaud) Non... On se voyait toujours ici…
- (J’essaie de réguler ma respiration qui s’accélère) : Ok mais vous avez bien quelqu’un en commun norrrr ! Quelqu’un qui peut nous indiquer où elle vit !
- Je pense que oui…
- MOUKOURY pardon fais mieux que penser ! Fais mieux que ça ! Appelle cette personne tout de suite et demande-lui leur domicile !
Il sort son téléphone de sa poche et lance l’appel
- Oui je ne t’appelle pas par rapport à tout à l’heure. Dis-moi tu saurais où habite Sydney ?
………
- Je t’expliquerai plus tard stp c’est urgent !
……..
- Oui oui
……….
- Oui je vois !
…………….
- D’accord. Portail peint en bleu. Merci je te revaudrai ça
Il raccroche et me regarde
- Je sais où c’est !
- Bien. Allons-y !
Je me penche pour prendre l’enfant dans mes mains mais Rose m’en empêche
- Qu’est-ce que tu fais Nathalie ? Me demande Rose
- Ça ne se voit pas ? Je ramène cet enfant d’où il vient !
- Toi-même tu ne vois pas qu’il est trop petit pour être balloté de gauche à droite ? Vas où tu veux partir quand tu es fixée sur la suite tu reviens le prendre et tu le ramènes là-bas. Tu ne vas pas trimballer un nourrisson !
- Quand eux ils sont venus l’abandonner ici ils comptaient sur quoi ?!
- Toute action posée dans la colère n’attire que des conséquences. Rien d’avantageux. Va calmement chercher à comprendre ce qui se passe ensuite tu reviens Nathalie !
Ce qu’elle a dit a eu le don de m’apaiser. J’ai pris l’autre de MOUKOURY avec moi et nous sommes sortis direction le fameux domicile. On a un peu trimé en route. De temps en temps il se renseignait par ci par là. Il a même dû rappeler son informateur qui ne décrochait plus. Ils ont procédé par sms et fin des fins nous avons trouvé le domicile. J’ai sonné à ce portail là avec rage
- (Je peste) Jusqu’à dire « Tu ne me reverras plus Tu ne me reverras plus » ! Elle comptait se suicider ?! Quand elle écartait ses pieds elle n’a pas pensé aux conséquences ?
- …..
- (J’appuie de nouveau avec toute mon énergie sur la sonnerie) : Mais c’est comment ici là ?! Il n’y a personne dedans ?! Ils se cachent ?! Ils pensaient qu’on n’allait pas les trouver ?!
- Maman stp vas-y molloh…
- Toi fous moi la paix !
Cette fois-ci je tambourinais au portail. Déversant la frustration de ma vie, de mon quotidien sous le regard impuissant de mon fils. Le portail d’à côté s’ouvre sur une dame d’âge mûr
- Vous cherchez quelqu’un ?
Je suis trop en colère pour m’exprimer. Par chance Ken s’en rend compte
- Bonjour Madame. On nous a indiqué ce domicile comme étant celui des ANDELA...
- C’est bien ici mais vous aurez beau frapper même avec une massue personne ne viendra vous ouvrir
- Comment ça ? Demande Ken
- C’est ce matin même qu’ils ont pris la route de l’aéroport. Ils ont immigré pour le Canada
- (Je sens les larmes monter) Non… NON ! NOOONNN !!!!
Je me suis écroulée tandis que Ken essayait de me maintenir debout
- Y’a-t-il un souci ? Demande la dame
- (Murmurant) Je suis foutue…. On va faire quoi maintenant ?
- (Kendrick à la dame) Vous ne savez pas s’ils ont de la famille qu’on pourrait contacter ?
- Malheureusement je ne peux vous le dire. Nous entretenions des rapports cordiaux sans plus
- Ok. Merci Madame
- (Elle nous regarde encore méfiante) Ok…. Bonne fin de journée
Elle est rentrée dans son portail tandis que mon fils m’a rejoint sur le sol plein de sable
- Ils nous ont abandonné un enfant (haussant les épaules) juste comme ça !
Soudain je me suis mise à rire dépassée. J’ai ris mais alors tellement que je n’arrêtais plus.
(Ken se lève et m’enjoignant à en faire autant) Maman, partons d’ici
Ma crise de rire a frisé la démence
- Maman, Viens !
J’ai tellement rit que j’ai fini par en pleurer. Aidé par mon fils qui me levait j’ai pleuré un bon coup. Il m’a laissé me soulager ainsi ensuite nous avons pris une autre moto sur laquelle nous sommes montés tous les deux et nous sommes rentrés à la maison. C’est lorsque Ken m’a secoué que j’ai sursauté
- Maman ! Nous sommes arrivés.
- Hein ? Que quoi ?
- Tu t’es endormie : Nous sommes arrivés
- Ok. On lui doit combien ?
- 1000frs
J’ai payé puis nous sommes rentrés à la maison. Quand nous sommes entrés, Rose portait le bébé. Elle s’est aussitôt levée
- Il a pleuré après vous. Par chance ils ont eu la décence de mettre un biberon dans son sac. J’ai réchauffé et je lui ai donné. Il a mangé et il a dormi. Alors ? Ça s’est passé comment ? Demande Rose
J’ai essuyé mes larmes et je suis allée prendre cet enfant des mains de Rose et je me suis assise sur le lit sans plus un regard pour personne dans la pièce
- (Ken lui répond) Ils ont quitté le Cameroun ce matin
- (Elle pose les mains sur la tête) On vous a vraiment abandonné avec un nourrisson !
- Oui maman Rose
- Et vous allez faire comment maintenant ?
- (J’interviens alors) Nous devons y réfléchir. (Je me lève) Rose vraiment merci pour tout. Je vais te demander de nous laisser maintenant. On doit s’organiser.
- Ok ok pas de soucis. En tout cas je suis là si jamais vous avez besoin de quoique ce soit
- (J’ai un sourire las) Je sais. C’est vraiment très gentil à toi. Tu es la grande sœur que j’ai toujours rêvé avoir. Quand on sera posé on te dira. Pour le moment comme tu peux le voir nous cherchons encore nos repères.
- (Tout en sortant) Bien sûr, je comprends
Elle est sortie et j’ai tout de suite tendu l’enfant à Ken
- Je vais le faire tomber Maman ! Je vais le casser. Je ne sais pas comment on fait
- Tu vas t’en sortir. Tu dois t’en sortir. Tiens le bien… non ! Pas comme ça ! Pose sa tête dans le creux de ton avant-bras…voilà tu soutiens ainsi sa tête… oui ! Comme ça ! Bien !
J’ai soulevé le matelas
- Tu cherches quoi ?
- (Je sors 2 billets violets d’une cachette que moi seule connaît) : ça ! Je reviens
- (Alarmé) Et tu vas où maman ?!
- Lui chercher à manger. On va pas le laisser mourir. Ou bien ?!
- Mais il vient de manger norrr
- (Je lui parle comme si je s’adresse à un enfant de 3ans) Oui mon fils il vient de manger mais dans 3h max il aura de nouveau faim. Il faut du lait de l’eau minérale des biberons bref, il faut qu’on prenne soin de lui. Reste avec lui, je reviens.
***Kendrick MOUKOURY***
Je suis tétanisé, je suis glacé, je ne sens plus mon pouls. Je porte ce petit être dans mes mains et je réalise à cet instant précis que j’ai quelqu’un sous ma responsabilité. Il ne s’agit plus juste de maman et de moi contre le reste du monde. Non. Il s’agit de maman, de moi et de lui… Ange… contre le reste du monde. Ça fait beaucoup de personnes de qui il faut se soucier. Bon sang je n’ai que 16ans ! Comment je peux être père à cet âge ? J’ai déjà beaucoup de peine à prendre soin de moi. Je ne me voyais pas infliger la même peine à quelqu’un d’autre. A quelqu’un d’aussi fragile, de si innocent !
- Oh Seigneur je n’avais pas prévu ça pour mon enfant !
Le petit me sourit. Je le pose délicatement sur le lit et le regarde dormir. Mon téléphone sonne c’est encore Ornella
- Allô ?
- C’est bon vous avez trouvé la maison ?
- Oui oui
- Tu m’expliques alors ?
- Quand on se verra.
- J’ai fini les cours. Peut-on se voir donc ?
- Je ne peux pas sortir là.
- Indique-moi la maison et moi je viens
Je la lui indique. Maman revient quelques instants après les bras chargés de tout genre d’artilleries pour bébé. Elle parle elle parle elle bouge dans tous les sens dans la pièce je vais finir par avoir le tournis.
- Ah oui parce qu’il faut bien qu’on le lave ! Je vais même mettre sa nouvelle bassine ci où eee ? Et les habits ! Il lui en faut des habits ! Je n’en ai pas pris ! Merde ! J’espère que les tétines des biberons ci c’est bien pour le 1er âge hein
- (Je hurle presque) : Maman arrête !
Elle a sursauté et le bébé s’est aussitôt mis à pleurer. Elle a accouru pour le porter
- Mais pourquoi tu cries ? Voilà tu l’as fait pleurer… Là…là mon bébé. On va même t’appeler comment ?
- (J’ai toujours le visage froissé) Ange
- (Elle le regarde tout sourire) Ange… joli choix de prénom. Il a l’air d’un ange en effet
- C’est sa mère qui l’a choisi
- (Elle fronce les sourcils tout à coup) Elle va passer sa vie à nous donner des ordres ?! Elle nous l’abandonne et nous impose encore des prénoms ?
- J’aime bien Ange Nathanaël
- Moui, Nathanaël aussi c’est mignon. Il faut qu’on lui fasse établir un acte
- Maman on ne peut pas le garder
- On le donne donc à qui ?!
- Je ne sais pas moi ! Un orphelinat !
- Parce que tu réussirais à dormir toi sachant que ta chair est quelque part dans la même ville ? Ne sachant pas s’il est décemment nourri ? S’il a des vêtements sur son corps ? Tu arriverais à te regarder dans la glace ?
- Parce qu’en le gardant on peut lui garantir tout ça ?!
- J’ai galéré avec toi alors tu vas assumer avec lui. Tu as la chance que je sois encore en vie. Tu as tes petits boulots. On s’en sortira tous les trois tu verras (regardant de nouveau Ange Nathanaël le sourire aux lèvres) Tu verras qu’on s’en sortira
Elle le garde dans ses mains tandis que je les regarde tous les deux. J’ai l’impression qu’elle n’est plus sur cette terre avec moi. J’ai l’impression qu’elle est déconnectée
- (Adossé contre le mur la main sur ma bouche un pied contre le mur) : Nous ne savons déjà pas ce que nous mangerons demain
- (Elle toujours son regard heureux rivé sur lui) : Nous non mais lui à coup sûr son repas est là
- On ne va pas s’en sortir
- (Cette fois-ci elle me regarde) Arrête de dire ça ! Arrête ! Si tu cesses d’être positif on ne va vraiment pas s’en sortir. Tu dois rester fort et courageux comme tu l’as toujours été. La vie ne nous a pas souri mais tu ne sais pas quelle chance elle nous emmène avec ce petit
- Tu ne disais pas ça il y’a un an
- Il y’a un an il n’était pas là ! Il y’a même un jour il n’était pas là ! Maintenant si. Alors on fait avec et on reste positif. S’il faille subir la vie et encore voir tout en noir autant mieux se donner la mort. Mais avec ce petit être, je reste convaincue que ni lui ni toi ne souffrirez comme j’ai souffert. Tu n’as pas eu l’enfance que j’ai toujours rêvé de donner à mon enfant. Je vais tout faire pour me rattraper avec lui
Mon téléphone s’est mis à sonner.
- C’est qui ?
- Une amie
- Aux yeux du monde ce n’est pas ton fils tu comprends ?
- ….
- Si elle ne sait rien de nous et qu’elle cherche à savoir présente le comme ton petit frère
- Ok…
Je suis sorti pour la route où je suis allé trouver Ornella. Elle m’a fait 2 bisous bien sonores sur les 2 joues
- Ça va ? Enfin tu me présentes le chez toi !
- (Je me gratte la tête) On ne peut pas entrer à la maison
- Oh mais pourquoi ?
Moi : En fait ma mère vient d’accoucher. Il y’a du monde à la maison
- (Elle ouvre grand les yeux) Ta mère était enceinte ? Elle a quel âge ???
- 36
- Eh ben Dis donc ! Elle t’a eu relativement tôt hein !
- Yeah…
- Mais tu cherchais le domicile de Sydney pourquoi ?
- On peut s’asseoir quelque part ? Viens de ce côté
Je l’ai emmené sur un banc public en ciment sur lequel parfois les voyous du quartier viennent s’installer. Mais comme on est encore en fin d’après-midi-là c’est safe
- Il était impératif que je lui rende un document qu’elle m’avait laissé depuis l’année dernière
- Moi ça fait un an que je n’ai pas de ses nouvelles. Sa ligne a subitement cessé de passer aussitôt qu’elle est tombée malade l’année dernière. Les rumeurs ont parlé de grossesse mais même la voir avec les yeux pour savoir rien. On est même parti chez eux avec deux autres amies là toujours l’année dernière pour la saluer sa mère nous a dit qu’elle n’était plus à douala. Tu l’as alors trouvé chez eux ?
- Non non. J’ai sonné fatigué finalement j’ai ramené le document à la maison
- Ah ! C’est dommage dis donc !
- Dis-moi un truc stp Ornella ?
- Oui ?
- Tu sais que je dispense des cours et je fais le ménage chez l’ami de ta mère le weekend ; Mais ça ne me donne pas grand-chose. Juste 20.000 le mois. J’ai besoin de plus maintenant que j’ai un petit frère. Ma mère ne gagne pas grand-chose… On est en location… Bref je pense que tu comprends un peu ce que je veux dire…
- Je comprends très bien. Je vais voir ce que je peux faire je te reviens
- Mais je t’en prie ne fais rien d’illicite hein. Si tu ne peux vraiment pas m’aider je comprendrai
- Ne t’en fais pas. On trouvera bien quelque chose. Finalement ça te dirait qu’on sorte samedi soir ?
- Ornella mes finances actuelles ne me le permettent pas
- (Elle lève les yeux au ciel) Tu es toujours sur la défensive toi ! Je t’invite !
- Je ne peux pas accepter
- Tu as ton orgueil d’homme je comprends. Tu penses que moi je me sens comment à chaque fois que tu me repousses ???
- …..
- Tu n’as rien aujourd’hui mais on ne sait pas de quoi demain est fait. Je ne mettrai jamais l’argent entre nous. Tout ce que je te demande c’est d’essayer de me voir autrement que comme une amie. Bref penses-y ! Tu seras au collège demain ?
- Non je ne peux pas y être demain. Je reprendrai certainement lundi.
- (le sourire aux lèvres) Si tu veux je passe demain te montrer comment prendre soin de bébé
- (Je réponds à son sourire) Tu as cours demain
- Le prof d’Allemand ne viendra pas. Je peux disparaître à 14h
- Et je dis non. Tu reprends certes ta classe mais si tu veux qu’on se côtoie vraiment il va falloir que tu t’y mettes pour de vrai.
- Tu pourrais être mon répétiteur particulier….
- Je ne pense pas qu’un parent accepterait qu’un élève dispense des cours à un autre élève
- Les miens si ! Je suis nulle en maths ça pourrait passer ça….
Elle se rapproche de moi et pose sa main sur ma cuisse
- Ainsi on se verrait plus souvent….
- Ornella je dispense déjà des cours à 2 écoliers pour 10.000frans
- Mes parents accepteraient de te payer le triple si tu venais me donner cours à la maison
- (Le regard brillant) Le triple ?
- Et j’ai même ma petite sœur en 5ème. Pour nous deux tu pourrais avoir 60.000francs.
- Jusqu’à 60.000 ???
- Oui. Penses-y….
- C’est oui tout de suite !
- (elle est aux anges) Alors on commence lundi soir
- Tu n’en parles pas d’abord à tes parents ?
- Ils ne me refusent rien. Considère-toi déjà comme mon répétiteur
- Je te remercie du fond du cœur pour ce que tu fais
- Ne me remercie pas Kendrick. Sois juste à la hauteur de ce que j’attends de toi
****Nathalie MOUKOURY****
Ken est revenu de sa visite avec une excellente nouvelle !
- Tu vois ?! Je te l’avais dit que Nathanaël nous ouvrirait les portes !
- 60.000 francs maman ?! Tu imagines tout ce qu’on peut faire avec ?
- Oui. Je m’en doute bien. Mais n’oublie pas que nous ne devons pas faire de folies. Un bébé ça coûte beaucoup d’argent. Et tu es en classe d’examen. Concentre-toi et obtiens-nous ce diplôme
- J’y compte bien maman ; j’y compte bien. Nous n’allons pas misérer éternellement !
Les autres membres de la mini cité sont tous passés saluer le petit. Entre les commentaires et les prises en pitié nous avons fini par nous retrouver enfin en toute intimité. J’ai donné le bain à Nathanaël qui hurlait à plein poumons sous le regard de son père puis je lui ai fait un biberon
- (Je le tends à son père) Tiens ! Donne-lui le biberon
- (Paniqué) Je ne sais pas comment ça se passe ! Et s’il avale de travers ?
- (Je lui réponds posément) Je suis là pour te guider dans cette tâche. S’il y’a un souci j’interviendrai
J’ai calé le petit contre le torse de son père et je lui ai passé le biberon chaud
- Mais il bouge beaucoup ! Regarde comment il crie !
- Il n’est pas différent de toi au même âge. Il a faim Ken. Mets le biberon dans sa bouche
Aussitôt qu’il l’a fait Nathanaël s’est calmé et a tiré goulument dessus. Ce qui a eu le don de rassurer son père qui semble commencer à être à l’aise avec lui dans ses bras. Nathanaël a complètement fini son biberon et j’ai ensuite montré à son père comment lui faire faire son rot. Mon fils est père…. Je suis grand-mère. Ce cycle va s’arrêter quand ?! J’espère que Nathanaël ne va pas nous ramener le sien de bébé à 12ans. C’est ma faute aussi ! Si j’avais été plus attentive et plus regardante sur l’éducation de mon fils on n’en serait pas là. J’ai été plus concentrée sur la gestion de notre quotidien.
- Ken ?
- (Il tient son fils serré contre lui et lui caressant la joue) Oui ?
- Raconte-moi un peu bien cette histoire avec cette fille-là
- (Il se gratte la tête) Te raconter ?
- Je n’ai pas besoin de détails. Juste pour comprendre votre histoire-là a duré combien de temps ?
- Quelques mois…
- Et vous avez eu des rapports sans protection seulement en quelques mois ?
- Juste une fois maman… Elle voulait qu’on essaie aussi une fois
- Mais Ken en classe on ne vous parle pas des MST des IST et consort ?
- (Rouge comme une pivoine) Si… On s’était dit qu’après ça nous serons sages…
- Voici le résultat de la sagesse… En tout cas je pense que tu devrais te faire dépister pour des éventuelles IST. Après elle tu as eu une autre copine ?
- Noooooo !
- Ok. Si jamais tu en as une de grâce protège-toi ! On ne doit pas dépasser le cap de 3 ici-là. Du moins pas tant que tu ne gagnes pas encore bien ta vie. Bon il dort. On va le mettre au milieu de nous. Toi aussi tu devrais dormir il y’a classe demain
- Je n’irai pas. Qui va le garder. Toi tu dois aller bosser
- C’est vrai en plus. Demain c’est vendredi ça peut se faire. Mais d’ici le weekend on devra trouver une solution pour le faire garder.
- J’ai pensé que Maman Rose pourrait nous y aider contre un petit salaire ?
- J’avoue que ça m’a aussi traversé l’esprit mais ce n’est pas une solution stable. On ne sait pas vraiment ce qu’elle fait dans la vie et parfois elle voyage. Quand elle ne sera pas là on fera comment ? Bref dormons. Je dois encore justifier mon absence de cet aprem demain au bureau.
Et comme je l’avais prédit, une demande d’explication m’attendait déjà sur mon poste à peine arrivée le lendemain matin. Je l’ai prise sans la remplir et je suis allée cogner à la porte du DRH
- Oui ?
- C’est Mme MOUKOURY Monsieur
- Entrez !
Je suis entrée tenant le document entre mes deux mains devant ma poitrine comme si ma vie en dépendait
- (Il me regarde de la tête aux pieds) Oui ?
- J’ai quelques conditions à poser
- (Perplexe) Pardon ?
- (Je suis toute tremblotante) Pour un début je voudrais un appartement de 2 chambres, payé sur une année et un salaire de 300.000Frs
Il pose son index sur sa bouche et me regarde longuement. Le silence est plutôt lourd, gênant, profond. Il va me virer ? Il va me virer. Il va me virer !!!
- (Je tente le tout pour le tout) Et je voudrais aussi avoir accès aux formations du personnel comme tous les autres. Si possible orienter ma carrière vers autre chose que le secrétariat.
- (Il ouvre enfin la bouche en s’adossant élégamment contre le siège de son fauteuil) Je suis d’accord pour tout à l’exception du salaire. Si je t’augmente ça se saura. Nous en parlerons ce soir
- (Surprise) Ce soir ?
- Oui ! Je t’invite au restaurant. Je ne suis pas en même temps un salaud de la pire espèce tu sais ? J’aime savoir avec qui je fais affaire.
- ….
- Ça sera tout pour le moment, tu peux retourner à ton poste
- Et…. Et la demande d’explication ?
- (Souriant espiègle) Quelle demande d’explication ?
Il m’a fallu quelques secondes pour le comprendre
- (Se répétant) Tu peux retourner à ton poste
Je suis sortie de là cherchant encore à réaliser ce qui venait de se passer. Une fois à mon poste j’ai déchiré la demande d’explication et l’ai jeté dans ma corbeille. Seigneur pardonne-moi pour ce que je m’apprête à faire.