On est libre !
Il fait une chaleur à tomber aujourd'hui. Nous sommes en plein mois de Juillet, le soleil est brûlant, les rues sont désertes, la plupart des gens sont enfermés chez eux devant la clim ou à profiter de leur piscine. Il fait 32 degrés à l'ombre et en ce moment même, je suis en train de travailler au magasin accompagné de Salim et Medhi.
On a chaud, on se ventile comme on peut mais on a tellement de boulot qu'on subit la chaleur plus qu'autre chose. Nous faisons partie de l'équipe du matin, nous arrivons à 6h et nous finissons à 13h ce qui nous permet de nous consacrer au club après ça.
Notre patron, Éduardo PEREZ, est un mexicain d'une cinquantaine d'années, pas très grand mais très intimidant ( dit la meuf qui n'a peur de rien ! ). Malgré ça, c'est un ange surtout avec moi. Décidément, tous les hommes qui m'entourent dépasse largement mon propre père... c'est bien triste.
Éduardo : " Ana ! Ana ! " crie t-il alors qu'il se trouve à l'entrée du magasin.
Moi : " J'arrive amigo, j'arrive ! " Je cours limite en l'entendant. À ce moment-là, je me trouve au rayon surgelé qui est le rayon le plus éloigné des caisses. Quand j'aperçois Éduardo, il est en pleine discussion animée avec un client. Je regarde une des caissières en passant, elle a l'air paniquée. Je lui fais signe de se détendre et lui dis d'appeler Salim et Medhi discrètement. J'arrive donc aux côtés d'Éduardo et du client.
Client : " Arrête de me prendre pour un con Pépito. Je veux que tu me rembourses ma bouteille illico presto avant que je retourne dans ton magasin de bouffeur de tacos ! " le menace t-il.
Pépito ?! Bouffeur de tacos ?! Waouuh !! Là je tiens une vedette !
Moi : " Qu'est-ce qu'il se passe ici ? " demandais-je en fronçant les sourcils. Je déteste ce genre de personnages qui se croient intouchables.
Éduardo : " Monsieur politesse ici présent veux que je lui rembourse une bouteille de whisky qu'il a déjà ENTAMÉE et qu'il a CASSÉE par la suite, " dit-il en insistant bien sur certains mots. " Cependant, en tant qu'homme civilisé, je lui explique donc que tous produits payés et consommés ne sont pas remboursables. Mais il fait visiblement la sourde oreille vu qu'il ne comprend pas ce que je dis. " me répond t-il en le regardant avec mépris.
À peine ai-je le temps d'ouvrir la bouche pour prononcer un mot que le client me coupe dans ma lancée.
Client : " Oh je vois que monsieur a fait appel à son petit pitbull, dit-il en ricanant et en me regardant de la tête aux pieds. J'avoue qu'elle est bonne telle la petite chienne qu'elle est mais malheureusement, ta salope ne pourra rien pour toi. "
Soudain, il agrippe Éduardo par le col et commence à le bousculer.
Je le regarde avec mon visage de poker, aucune émotion détectable. Je rêve ou il vient de me traiter de salope ?! Éduardo me regarde, un léger sourire en coin. Il sait déjà que dans à peine deux minutes, le mec va se retrouver au sol.
Les clients présents sont figés, certains reculent de quelques pas de peur de se retrouver mêlés à tout ça. Parmis eux, il y a des habitués, ils nous connaissent bien et savent que la situation est entre de bonnes mains.
J'avance vers le client, j'attrape sa main droite qui tient mon boss, en une seconde il lâche prise. De là, je lui tord le bras derrière son dos, il a à peine le temps de réfléchir à ce qui lui arrive que je lui fais une béquille derrière les jambes et il tombe à genoux devant Éduardo.
Moi : " Ed, si t'as envie d'une bonne pipe bien baveuse, c'est le moment. " lui dis-je en poussant légèrement le client face à son entrejambe.
Ouais, je sais, pas très glamour pour une femme mais c'est ma façon d'être. Je suis crue, sans filtre et sans gènes. Parfois ça plaît et parfois non.
Éduardo éclate de rire et certains clients aussi. Alors que Salim et Medhi approchent après avoir entendu des cris, le client qui s'est senti humilié me hurle dessus.
Client : " Lâche-moi, sale pute ! Je jure sur ma vie que je vais te faire la peau ! "
BOUM !
Salim vient de lui envoyer une patate de forain si forte que j'ai dû lâcher le mec pour ne pas être entraîné avec lui par l'onde de choc.
Moi : " Ouuuuh j'aurai pas aimé la manger celle-là ! " dis-je en secouant la main. Le client a la bouche en sang et je crois même avoir vu une dent volée.
Medhi : " Il ne faut pas insulter le petit trésor de Salim au risque de manger de la soupe pour toujours. " me répond t-il avec un rire satanique. Il s'approche du client qui tente tant bien que mal de se relever et lui tape sur l'épaule : " Hey mon pote ça va ? T'as pas l'air bien. "
MDR ! Ce mec me fascine ! Il ne peut pas s'empêcher de faire de l'humour même dans ce genre de situation.
Le client lève les yeux, s'essuie grossièrement les lèvres et crache l'excédent de sang qui se trouve dans sa bouche directement au sol, comme le gros porc qu'il est. Il repousse fortement Medhi qui recule de quelques pas. Il lui jette un regard plein de mépris et de dégoût.
Client : " Ne me touche pas, Ben Laden "
Whaaaat ?! Il a vraiment du courage lui ! Medhi qui est pourtant un être très jovial et solaire, là il devient aussi froid qu'un iceberg. Ses beaux yeux s'assombrissent, il dégage une puissance meurtrière qui me fascine. Je le regarde avec attention, un petit rictus sur mon visage.
Salim s'approche de lui, pose une main sur son épaule et lui dit :
" Calme toi frère, ce genre d'individus finissent la plupart du temps dans des boîtes à partouze, le cul en offrande, à sucer des grosses bites de blacks pour se sentir un peu moins... répugnant. "
Ahahah ! Medhi éclate de rire et m'entraîne avec lui. Il faut dire qu'il a un rire assez particulier et très communicatif. J'adore la répartit de Salim, il remet toujours les gens à leur place sans jamais hésiter une seconde. Je l'admire.
Le client voit rouge, il se jette sur Salim qui a à peine le temps de réagir mais Medhi avait toujours un œil sur lui. Il se jette dessus et les deux en font qu'une bouchée. Un professeur de Kickboxing et un autre de Krav-Maga. Double échec mon pote !
Ils le jettent dehors comme un vulgaire torchon, le mec se ramasse la gueule sur le bitume et se pète le nez. Pas de bol.
Salim se frotte les mains comme pour enlever toute la saleté du jour, regarde le client qui est encore au sol et lui dit :
" La prochaine fois que je revois ta sale gueule dans le quartier c'est pas les dents que je t'explose mais... " Il mime d'un geste un pistolet sur la tempe et boum. Le client se relève tant bien que mal en titubant et part en courant sous les yeux curieux des passants.
Quand Medhi et Salim rentrent dans le magasin, tout le monde les applaudit. Ils font une sorte de révérence comme au théâtre pour les remercier. Non mais ces deux-là je vous jure. Des vrais comiques !
Moi : " Les gars je suis trop fière de vous ! Pour vous remercier de votre dévouement, c'est moi qui offre ce soir ! " Leur dis-je avec un sourire flatteur.
Salim me jette un regard noir et me dis sur un ton solennelle : " Garde ton argent Ana, c'est notre devoir de te protéger et de gérer la sécurité du magasin. "
Olalala ! Mais quel rabat-joie celui-là ! Je sais pas ce qu'il a en ce moment mais il fait tout le temps la gueule et me cherche des poux pour un rien.
Moi : " Arrête un peu de me faire chier et accepte ! Je ne suis pas si pauvre que ça déjà, alors zut à la fin ! " Malgré le fait qu'il m'agace, je lui souris gentiment et cligne des yeux innocemment.
Medhi : " Moi, en tout cas, j'accepte avec plaisir ma petite princesse adorée. " Il me prend dans ses bras après ces belles paroles, je lui rend son étreinte et on rit joyeusement. Salim nous surplombe avec froideur, j'ai même presque l'impression qu'il commence à grogner. Il y a bien une chose que Salim hait par-dessus tout, c'est que d'autres hommes qui lui franchissent la zone de confort. Ça, il DÉTESTE !
Je l'entends soupirer fortement mais il finit par courber l'échine.
Salim : " OK j'accepte c'est bon ! Mais ne me faites pas chier ! " Ce regard de fifou malade qu'il me jette en disant ça ! Ce mec va finir par me rendre dingue.
Éduardo est resté silencieux tout ce temps, nous regardant avec fierté et sympathie.
Éduardo : " Mes enfants ! Je ne sais pas ce que je ferai sans vous. Vous êtes la fierté du quartier. "
Il tend le bras gauche, regarde sa montre. Il est à peine 10h40. " Aller, aller, sortez d'ici ! Je vous donne votre journée, on se voit lundi. "
Nous : " Sérieux ?! "
Éduardo nous regarde du coin de l'œil, un sourire malicieux aux lèvres " Oui allez-y avant que je ne change d'avis ! "
Moi : " Alors là, pas deux fois, Pépito ! "
Je cours, non, je vole jusqu'aux vestiaires en riant comme une hyène. Les trois hommes derrière moi me regardaient comme des débiles, secouant la tête en riant de me voir si heureuse de partir.
" Quelle ingrate ! " se dit Éduardo le sourire aux lèvres.
Nous sommes samedi, il est 10h45 et nous voilà officiellement en week-end !!
On est liiiibre !!!