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Chapître 2 - 2

— Tu m’as attendue ? demanda-t-elle, à mi-voix.

Il ne répondit pas immédiatement, son regard restant fixé sur le rouge sombre dans son verre. Puis, lentement, il leva les yeux vers elle.

— Pas exactement.

Elle s’approcha, hésitant un instant à prendre place. L’idée de ce dîner, qui était censé être un simple échange entre deux adultes, semblait soudainement plus lourd qu’elle ne l’avait imaginé.

Quand elle s’assit enfin, il ne fit aucun geste pour la saluer autrement que par un regard furtif, comme si elle était une simple ombre dans son espace.

Les premières minutes passèrent dans un silence pesant. Aucun mot, aucun geste, rien. Camille commença à manger, mais chaque bouchée semblait coincée dans sa gorge, comme si l’air même de la pièce l’étouffait.

— Tu m’as bien fait comprendre que tu n’étais pas ici pour manger, dit Bastien, brisant enfin le silence.

Le ton froid, sec, ne laissa place à aucune confusion.

— Tu sais ce que je pense de ce genre de situation, répliqua-t-elle, la voix plus dure qu’elle ne l’aurait voulu. Tout ça me semble un peu trop… préparé.

Il la fixa, un sourire amère jouant sur ses lèvres.

— Préparé ? C’est toi qui t’es invitée dans ce monde, Camille. N’oublie pas ça.

Elle le regarda, les mâchoires serrées, l’envie de lui répondre de façon acerbe presque insupportable. Mais elle s’abstint, choisissant de laisser les mots mûrir dans son esprit avant de les laisser sortir.

— Je n’ai pas demandé à venir ici. Je n’ai pas demandé à ce que ma vie soit chamboulée.

Les mots venaient plus facilement que prévu, portés par une frustration qu’elle n’avait pas anticipée.

Bastien ne réagit pas, continuant de jouer avec son verre, son regard distant. Mais elle pouvait sentir la tension, aussi dense et menaçante qu’une tempête en mer.

— Et tu crois vraiment que tu peux comprendre ce que c’est, être dans ma position ? demanda-t-il, sa voix devenant plus grave, comme si chaque mot était chargé d’une histoire qu’il ne voulait pas raconter.

Elle se redressa dans son fauteuil, un frisson de défi parcourant ses veines.

— Je ne prétends pas comprendre, mais je sais ce que c’est que d’être pris dans des forces qui te dépassent.

Il lâcha un rire sec, sans joie.

— Vraiment ? Et qu’est-ce que tu crois savoir de moi, Camille ?

Il la regardait désormais avec une intensité nouvelle, quelque chose de plus sombre, presque menaçant. Elle sentit un frisson glacial lui parcourir l’échine, mais elle ne fléchit pas.

— Je sais que tu te caches derrière des murs. Des murs que tu as construits pour te protéger, mais aussi pour empêcher quiconque de voir ce que tu es vraiment.

Le regard de Bastien s’assombrit davantage.

— Et toi, Camille ? Qu’est-ce que tu caches ?

Le défi dans sa voix la toucha plus qu’elle ne l’aurait voulu. Elle baissa les yeux, la question la frappant comme un coup de poing. Elle ne voulait pas réfléchir à ce qu’elle cachait, ne voulait pas admettre qu’elle aussi, dans une certaine mesure, se protégeait.

— Ce n’est pas le moment de parler de ça, répliqua-t-elle, se ressaisissant rapidement.

Un silence lourd s’installa à nouveau. Bastien se leva brusquement, la chaise grinçant sur le sol. Il se dirigea vers la fenêtre, l’air perdu dans ses pensées.

— Tu penses que je suis comme toi, dit-il après un moment, la voix froide et tranchante. Mais tu n’as aucune idée de ce que c’est que de devoir porter un fardeau que personne ne peut comprendre.

Il se tourna brusquement vers elle, et son regard la fit frissonner.

— Les gens comme toi, Camille, ils ne savent pas ce que c’est de vivre avec une vérité qu’ils ne peuvent jamais partager.

Elle se leva à son tour, le regard défiant.

— Tu parles de toi comme si tu étais un monstre.

Les mots quittèrent ses lèvres avant qu’elle n’ait pu les retenir.

Il la fixa un instant, avant de secouer lentement la tête, comme si sa propre souffrance l’empêchait de répondre. Mais au fond de ses yeux, elle aperçut une lueur de… regret ?

Il avança d’un pas, se rapprochant d’elle.

— Tu sais, ce n’est pas si simple. Mais tu n’es pas prête à comprendre.

Elle sentait la distance entre eux s’étirer et se refermer à la fois, comme un piège invisible. La tension était insupportable.

Elle haussait les épaules, comme pour dissiper cette lourdeur, mais chaque geste semblait être perçu comme un défi. Il se rapprocha encore, presque trop près, jusqu’à ce que son souffle caresse sa peau.

— Et toi, tu penses être prête ? demanda-t-il, son ton plus doux, mais toujours teinté de cette froideur qui l’accompagnait partout.

Elle le regarda, incertaine, mais prête à tout pour casser ce silence entre eux. Elle ne voulait plus de cette ambiguïté.

— Je ne sais pas. Mais je suis là, Bastien.

Il se recula enfin, le regard se faisant plus dur, plus distant.

— Tu es là. Oui, c’est tout ce que tu sais. Mais il n’y a rien de simple dans ce monde. Rien de facile.

Elle baissa les yeux, se sentant soudainement seule au milieu de cette pièce démesurée.

Il tourna le dos, se dirigeant vers la porte.

— Ce n’est pas un dîner, Camille. C’est une guerre silencieuse.

Il s’arrêta juste avant de quitter la pièce, jetant un dernier regard vers elle.

— Et tu n’es pas prête à affronter ça.

La porte se ferma dans un bruit sourd, laissant Camille seule, le cœur lourd et les pensées en désordre. Elle n’avait pas compris ce qui se passait ici, ni pourquoi tout semblait si difficile. Mais une chose était certaine : elle n’avait pas l’intention de céder.

Pas maintenant. Pas après tout ce qu’il venait de lui dire.

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