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Yassin se défoule sur moi. Je n'essaie même pas de rispoter à ces coups de poing. Tout ce que je fais c'est fixer Antsa qui est couchée inconsciente sur le sol. Qu'est ce qui m'a pris ? Pourquoi je l'ai frappé de la sorte ? Pourquoi ? Je regrette.
Yassin : (tout furieux) Tu n'es qu'un imbécile. Un idiot.
Ma mère essaie de l'arrêter.
Ma mère : (tirant Yassin) Mais cesse de frapper ton grand frère Yassin. Oh mon Dieu ces enfants me rendront folle. Yassin ! Au lieu de te battre contre ton frère, réfléchissons à ce que nous allons faire de cette fille. Elle est mal en point..
Aussitôt, Yassin cesse de me battre et lance un regard furieux à notre mère.
Yassin : (hors de lui) Maman tu étais là lorsqu'il frappait la pauvre Antsa, et tu n'as rien fait pour l'arrêter. Absolument rien.
Ma mère : (à court d'excuse) Mais...je...je...
Yassin : (crûment) Tu me déçois.
Il s'avance vers Antsa puis la porte dans ces bras. Il se dirige ensuite vers la porte.
Ma mère : Que voulais-tu que je fasse inh? Et où vas-tu avec elle ?
Yassin : À l'hôpital.
Ma mère : Yassin ramène-la. C'est mieux d'appeler un médecin qui viendra la soigner à la maison. Si on te demande ce qui lui est arrivé à l'hôpital, que répondras-tu?
Yassin : Je dirai tout simplement la vérité. Que ton fils l'a battu comme un animal.
Ma mère : (nerveuse) Mais ça risque de porter préjudice à ton frère.
Yassin : Ça m'est égal.
Il s'entête et s'en va. Ma mère a essayé de l'en dissuader sans succès.
Ma mère : (accourant vers moi) Il faut faire quelque chose Ayub. Il ne peut pas la conduire à l'hôpital.
Je fixe le sol, les yeux presque larmoyants.
Moi : Pourquoi pas? Antsa a besoin de soin alors qu'il le fasse.
Ma mère : Pourquoi personne ne veut me comprendre? Ça risque de te créer des ennuis mon fils.
Moi : Tanpis.
Je lui tourne dos et commence à gravir les escaliers. Je peux l'entendre vociférer. Debout au milieu de la chambre, je regarde la main dont je me suis servie pour frapper Antsa. Il y a encore ses gouttes de sang sur mes doigts. Je ferme les yeux et me remémore tout cela. Les images de moi entrain de la tabasser à mort repassent en boucle dans ma tête. Je m'en mords les lèvres. Oh mon Dieu. Pourquoi j'ai fait cela. Pourquoi ?
Je donne un violent coup de poing dans le mur de la chambre. J'ai envie de couper cette main. J'ai été lâche. Très lâche.
Moi : (hurlant) Pourquoiiiiiiiiii?
*****Yassin KHALID
C'est en criant à l'aide que je pénètre l'intérieur de l'hôpital avec Antsa dans mes bras. La même infirmière de ce matin est venue à ma rencontre. Elle est confuse quand elle se rend compte que c'est Antsa. La même Antsa qui débordait de vie ce matin. L'étonnement se lit sur son visage. Ça se voit qu'elle se pose plusieurs questions.
Infirmière : Mais...mais c'est madame DIOP. Qu'est ce qui lui est arrivé ? Et vous, vous êtes celui qui est venue se renseigner sur elle ce matin n'est-ce pas ? Seriez-vous responsable de tout cela ? Qu'est ce que vous lui avez fait ?
Moi : Calmez-vous. Je vous expliquerai mais pour le moment est-ce que vous pouvez la prendre en charge ? Elle est vraiment mal en point.
Infirmière : Oui venez. Suivez-moi.
Moi : Merci.
Je la suis jusque devant une des chambres de l'hôpital. Une autre infirmière débarque avec un fauteuil roulant. J'ai fait asseoir Antsa à l'intérieur puis elle a été conduite aux soins.
Pendant ce temps, il m'a été demandé de patienter. Ce que je fais mais la peur au ventre et une colère indescriptible envers mon frère. Il ne perd rien pour attendre.
*****Le lendemain matin
C'est une main posée sur mon épaule qui me réveille de mon sommeil. Un court sommeil d'ailleurs puisque jusqu'aux environs de 6h j'étais encore éveillée. Présentement, il est 8h10. Je me lève de mon siège en bâillant et m'etirant. Le sourire que m'offre l'infirmière me rassure sur l'état de Antsa.
Infirmière : Bonjour monsieur.
Moi : Bonjour comment va t-elle ?
Infirmière : Elle va bien. Les blessures n'étaient pas profonde. Donc vous n'avez pas à vous en faire. Elle ira mieux.
Moi : (le sourire aux lèvres) Merci infirmière. Je peux donc la voir inh?
Infirmière : Bien sûr.
Moi : Merci.
Infirmière : Je vous laisse.
Elle s'en va. Je fais mon entrée dans la chambre où se trouve Antsa. Elle était éveillée.
Moi : Bonjour beauté. Comment te sens-tu?
*****Ayub KHALID
Comme un monstre! Voilà comment je me sens. Je n'ai pas réussi à fermer l'œil de toute la nuit. À chaque fois que j'essayais de le faire, les souvenirs du moment où je bastonnais Antsa viennent m'empêcher de le faire. Et le plus bizarre c'est que je n'arrête pas de me faire du souci pour elle. J'ignore la raison mais je suis vraiment inquiet pour elle.
Peut être parce que je suis en grande partie responsable de son état. Si elle est à l'hôpital en ce moment c'est à cause de moi. Il est vrai que je veux la faire souffrir mais pas la tuer parce que la mort est mille mieux pour elle. Ce que je ne désire pas. Je désire la voir malheureuse et ce mariage est déjà son malheur.
Je quitte le lit et rejoins la salle de bain. Il faut bien que je me prépare pour aller travailler. Mon idiot de frère doit être au chevet de Antsa en ce moment. Je l'imagine tout mielleux tout romantique aux côtés de ma femme. Et maintenant quand j'y pense, je me demande pourquoi je l'ai laissé me frapper hier. Je n'ai même pas réagi lorsqu'il me rouait de coups.
Je n'arrive toujours pas à expliquer ce qui m'est réellement arrivé hier. C'est comme si je ne voulais pas qu'il arrive quelque chose à Antsa. Je ne veux pas qu'elle meurt mais ce n'est pas ça que j'ai ressenti hier. C'était comme si je pouvais donner ma vie pour elle si j'en avais eu cette occasion hier. J'ai même pleuré pour elle. Non mais...
Je secoue la tête tout décontenancé. C'est sûrement la culpabilité qui me fait me sentir comme ça. Rien de plus. Je m'en moque de cette fille. Elle peut mourir. Je m'en fiche.
Je me brosse et prend ma douche avant de regagner la chambre pour me préparer.
*****Antsa DIOP
Yassin est à mes petits soins depuis un moment. Il essaie de me faire avaler quelque chose mais je n'ai pas faim. Je n'apprécie pas vraiment le fait qu'il soit à mes côtés en ce moment mais je l'ai tout de même remercié de m'avoir sauvé la vie si on peut le dire ainsi. Sans lui, je suppose que je serais déjà conjugué au passé à l'heure qu'il est. Il m'a raconté comment il est venu me trouver inconsciente et m'a conduite ici.
Honnêtement, je ne me souviens de rien. Tout ce dont je me rappelle c'était le moment où Ayub était au dessus de moi et me frappait sauvagement. Je coule des larmes rien qu'en y repensant. Qu'ai je fais au bon Dieu pour mériter toute cette souffrance ? Jusqu'à quand ? Je le déteste de toutes mes forces. Je vais cet homme. Je te hais Ayub KHALID. Et je te promets que tu vas le payer. Tu le paieras.
Yassin : Ne pleure pas s'il te plaît.
À l'aide d'un mouchoir, il essuie les larmes qui coule de mes yeux.
Yassin : Je te promets que Ayub ne te frappera plus jamais parce que je ne le laisserai plus jamais faire.
Moi : C'est pas comme si tu étais différent de lui. Si lui il tue une mouche, toi tu tuerais un moustique. En gros, vous êtes les mêmes.
Yassin : (attristé) Ça me blesse vraiment ce que tu dis là Antsa. Mais je ne t'en veux pas parce que je n'ai pas été gentil avec toi par le passé. Et je tiens à m'excuser pour ça. Pardonne-moi vraiment pour tous les mauvais traitements que je t'ai infligé par le passé. J'ai vraiment changé tu sais ?
Je le regarde avec méfiance. D'un côté il a l'air sincère mais d'un autre, je refuse de le croire quand je me souviens de tout ce qu'il m'a fait subir son frère et lui à la fac.
Yassin : (me prenant la main) Crois-moi s'il te plaît Antsa.
Le docteur débarque, nous interrompant. J'eclipse délicatement ma main de la sienne.
On regarde le docteur qui marche vers nous. Il effectue des vérifications.
Docteur : (à moi) Comment vous sentez-vous ?
Moi : (souriante) Bien docteur.
Docteur : Très bien. Remettez-vous vite sur pieds parce que les enfants ont besoin de vous, notre pédiatre.
On rit.
Moi : Ne vous en faites pas docteur.
Yassin : Quand est-ce qu'elle peut alors sortir docteur ?
Docteur : C'est ce que je venais vous dire. Elle peut sortir ce soir.
Moi : (aux anges) Vraiment ?
Docteur : Oui.
Yassin : C'est super.
Docteur : Je vous laisse. Au fait, vous ne m'avez toujours pas dit comment vous vous êtes mis dans cet état.
Yassin : (prenant les devants) C'est son mari qui...
Moi : (lui coupant la parole) Au fait je suis tombée docteur. J'ai glissé dans les escaliers et je suis tombée.
Je regarde Yassin qui a froncé les sourcils.
Docteur : Vous êtes mariée mademoiselle ?
Moi : Oui docteur. Je me suis récemment mariée.
Docteur : Oh je vois. Mais si vous êtes tombée comme vous le dites, pourquoi vous n'avez aucune lésion ni aucune fracture ?
Moi : Un vrai miracle n'est ce pas ?
Je termine sur un rire nerveux.
Docteur : Si vous le dites. À tout à l'heure.
Moi : Bye docteur.
Yassin : (revenant à lui) Bye docteur.
Une fois le docteur parti, Yassin me regarde bizarrement.
Yassin : Tu viens de le couvrir ou je rêve ?
Moi : Je ne l'ai pas couvert.
Yassin : Ah oui? Et comment on peut appeler ce qui vient de se produire.
Moi : J'ai nouvellement commencé à travailler dans cet hôpital et je ne désire pas que les gens me voient comme la femme battue par son mari. Je veux avoir une bonne réputation dans cet hôpital.
Yassin : Et pour avoir cette bonne réputation, tu refuses de dénoncer Ayub?
Moi : (silencieuse)...
Yassin : Ok! Comme tu voudras.
Je soupire en fixant le vide.
*****Le soir
*****Ayub KHALID
Disons qu'aujourd'hui je suis juste allé faire du tourisme à l'entreprise. Je n'ai absolument réussi à rien faire. Lorsque je prends un travail pour faire, je finis par l'abandonner. Je n'ai fait que penser à Antsa, Antsa et encore elle. Franchement !
Je descends de la voiture et laisse la responsabilité au chauffeur de la faire entrer à l'intérieur. Je me suis directement rendu dans la chambre parce que j'espérais y voir Antsa et voir comment elle allait mais lorsque j'y suis arrivé, c'était complètement vide. Elle n'était pas rentrée. Va t-elle aussi mal que ça ?
Je ferai peut-être mieux d'aller la voir. Non! Qu'est ce que je raconte ? Hors de question. Je me fiche d'elle.
Mon téléphone commence à sonner. C'est Fatim. Je décroche.
Moi : Oui..
Fatim : (voix mielleuse) Mon amour où est-ce que tu es présentement ?
Moi : Chez moi.
Fatim : (sourire mesquin) Cool je peux passer alors? Ta femme ne parlera pas j'espère. Lol!
Moi : Non elle ne parlera pas parce qu'elle n'est pas là. Elle se trouve à l'hôpital.
Fatim : C'est pas que je m'inquiète pour elle inh mais elle a quoi?
Moi : Tout ça c'est à cause de moi.
Fatim : (perdue) Pardon? Tu dis?
Moi : Bye. Je dois raccrocher. Je dois aller voir ma femme à l'hôpital.
Fatim : Quoi! Mais...mais...tu..
Moi : À plus.
Fatim : Non ne...
Je raccroche sans attendre et descend. Je me dirige vers l'extérieur plus précisément vers le parking. Je bondis dans une voiture et prend le chemin de l'hôpital. Je suppose que Yassin a dû la conduire à l'hôpital principale de la ville. C'est le meilleur et elle doit être forcément là bas. Quelques minutes plus tard, je me gare devant l'hôpital.
Lorsque je descends de la voiture, mon attention se porte brièvement sur une boutique éclairée de l'autre côté du trottoir. C'est une boutique de vente de fleurs et de chocolat. Il y avait aussi les nounours et consort. Aussi étonnant que ça puisse paraître, j'ai eu envie d'amener des fleurs et des chocolats à Antsa.
Je me suis donc rendu dans la boutique. J'ai pris les chocolats les plus chers qui se trouvaient dans la boutique accompagné d'un bouquet de roses rouges. J'ai aussi acheté un gros nounours pour elle. J'ai réglé la facture puis je suis ressorti de là. C'est en me demandant si elle va aimer tout cela, que je regagne l'autre côté.
J'étais sur le point de faire mon entrée dans l'hôpital quand je vois en ressortir Antsa en compagnie de mon frère. Ce dernier le soutenait pour marcher. J'ai vite fait de me cacher derrière une voiture pour ne pas qu'il me voit. Ils sont ensuite monter dans la voiture de mon frère avant de partir.
Je sens une colère m'envahir. Je rêve ou je suis jaloux ? Je regagne ma voiture en rogne en faisant balancer les fleurs et les chocolats à l'arrière. Je m'installe au volant. Je démarre pour la maison quelques instants après qu'ils soient partis. La voiture de mon frère repartait lorsque je suis arrivé. Comme d'habitude, mon chauffeur s'est chargé de faire entrer ma voiture. J'ai voulu délaisser tout ce que j'ai acheté pour Antsa dans la voiture mais j'ai finalement décidé de prendre les fleurs.
Au pire des cas, je peux toujours le disposer dans un vase dans la maison. J'ouvre la porte de la maison puis m'avance à l'intérieur. Je n'ai jamais été stressé d'entrer dans ma propre maison.
Antsa : Yassin tu as oublié quelque chose ? Demande t-elle en se retournant croyant que c'était mon frère.
Elle reste silencieuse lorsqu'elle s'aperçoit que c'est moi. On se regarde avec insistance dans les yeux. C'est comme si le temps s'était arrêté pendant un court instant. Elle baisse les yeux vers le bouquet de fleurs dans ma main. Elle me regarde ensuite.
Elle met un terme à ce moment magique en se retournant et prenant le chemin de la chambre. Je la suis.
On grimpe les escaliers.
Moi : Antsa écoute-moi. Je suis désolé...!