L'apparence est souvent trompeuse
Isabelle JEUDY
Je n'en reviens toujours pas qu'Ernso ait pu me traiter de la sorte. Il n'avait pas l'air d'un goujat quand je l'ai rencontré pourtant. Après tout, cela n'allait pas être inscrit sur son front que c'est un petit con. C'était à moi d'être plus critique sur les personnes que je fréquente.
Des heures se sont écoulées depuis mon départ de chez lui. Je me trouve maintenant chez moi. Pourtant, je me demande encore ce qui vient de m'arriver. Le choc ça a été de constater dans la soirée qu'il m'avait bloquée et le lendemain, il m'a complètement ignorée sur la cours du campus. Qui l'aurait crû ? Un si beau jeune homme comme lui avec ce genre de comportement d'homme des cavernes.
- C'est trop grave. L'habit ne fait vraiment pas le moine comme on dit.
Je décide donc de faire comme lui. S'il a cru bon de jouer au indifférent, ce n'est pas moi qui vais le supplier de m'adresser la parole.
- Lui et moi on n'est pas né ensemble comme on dit chez nous.
Maintenant, quand je suis au campus, je ne le calcule pas moi non plus. Et comme toutes mes amies avec qui j'ai été à la fac ont été admises ailleurs qu'au campus ou pas du tout, je n'ai plus beaucoup d'amis ici. Alors je serre le cœur.
Jessica souhaite repostuler ici l'an prochain. J'espère qu'elle reussira cette fois. Pour le moment, afin de compenser, je viens pile à l'heure des cours et je m'en vais à la minute même où celui ci est terminé. Ce fut ainsi tout le premier mois.
Dans ma classe on n'est que 30 et parmi cet effectif, juste 5 filles. Ce qui fait que cela a été très difficile pour moi de m'intégrer. D'ailleurs, ce n'est justement pas le cas jusqu'ici. J'ai peur de tomber sur un Ernso 2 quant aux garçons que j'ai déjà rencontré. Et pour ce qu'il y ait des filles, elles ont déjà leur team je crois. Je ne vais pas les emmerder.
Ce matin, je venais tout juste d'arriver quand j'ai senti quelqu'un me tapoter le dos.
- Tu es Isabelle, c'est cela ? Il me questionne en se tenant droit derrière moi.
Il faut dire que je ne m'y attendais pas du tout. Moi même je n'ai retenu aucun nom dépuis que je les entende se présenter à chaque nouveau professeur qui se pointe. Donc cela m'a assez surprise que quelqu'un arrive aussi facilement à m'identifier.
- Euh... oui. Oui. C'est moi. C'est pourquoi ? Je lui demande deconcertée.
- Tu as laissé ta tablette dans la salle hier, il m'annonce en me le rendant.
Tellement j'étais heureuse, j'ai failli le prendre dans mes bras après avoir récupéré ma tablette. Pourtant, son visage n'a rien qui m'aurait aidé à l'identifier. Ce qui est sûr, il est dans ma classe.
Cela dit, je ne le remercierai jamais assez d'avoir retrouvé ma tablette. En effet, en rentrant chez moi hier, j'avais constaté que ma tablette n'était pas dans mon sac. Je l'ai cherché partout sans succès. Malheureusement, j'avais beau retourné dans ma tête tous les endroits où j'ai été de la journée ainsi que les choses que j'ai faite, je n'ai pas pu me souvenir de l'endroit où j'aurais pu le laisser.
- C'est quoi ton nom ? Je lui demande.
- Tu ne le sais pas ? Dommage ! Je suis pourtant dans la même classe que toi.
Je grimace.
- On me nomme Sanders Elian ACHILLE, il me répond peu chaleureux.
Ça se voit qu'il est assez réservé comme personne. Un peu comme moi à première vue. Sauf que moi je ne suis ainsi qu'avec des inconnus. Avec mes amis, je suis une vraie furie.
- Merci Sanders. Moi c'est Isabelle JEUDY, je me présente en lui tendant la main.
- Il n'y a pas de quoi, il me répondit en me serrant la main.
Depuis ce jour, entre lui et moi, une très belle amitié naquit. On était devenu super pote. On était tout le temps fourré ensemble. J'ai appris d'ici là que Sanders était gonaïvien (habitants de la ville des Gonaïves). On dirait qu'il n'y a qu'eux dans cette université franchement tellement ils sont nombreux. Ou peut être que c'est moi qui les attire tout simplement.
A la différence d'Ernso, Sanders me parait très poli. Jamais il n'a eu à depasser les bornes avec moi pour nos premiers moment comme ami. Et si par inadvertance cela était arrivé, il s'excusa aussitôt.
- Qui a dit qu'entre une fille et un garçon une amitié n'était pas possible ? Lâchais-je alors que l'on quittait la classe.
- Les hommes sont cons des fois. Mais nous on est au dessus de ça Isa.
Je m'arrête et le retiens.
- Promets moi, que quoi qu'il advienne, rien ne viendra entacher notre amitié.
- Comme quoi ?
- Souvent fois on entend des histoires à propos des amitiés homme-femme. Tout allait bon train jusqu'au moment où l'un d'entre eux tombe amoureux. Ou un truc du genre.
- Il n'y a aucune raison que cela nous arrive Isa, il me rassure. Je suis déjà en couple. Je suppose que toi aussi.
- Parfait ! Je m'exclame. Rentrons.
A chaque fois, je me demande quand il allait montrer son vrai visage. Mais non, il était toujours très gentil avec moi. Il prête toujours attention à ce que je fais à l’université. Et si besoin est, il m'offre des oreilles attentives. C'est devenu un vrai ami, en fait.
Ce matin, en venant en cours, j'ai constaté qu'il n'était pas venu en classe. Quoique j'étais inquiète, j'en suis parvenue à me convaincre qu'il ne s'était peut être pas réveillé à temps et qu'il viendra pour les autres cours. Cela n'a jamais été le cas. Sa place à côté de moi est restée vide tout le long de la journée car il ne s'est pas pointé.
Alors, en quittant l'université, au moment de rentrer chez moi, bourrée d'inquiétudes, la première chose que j'ai fait c'était de passer chez lui vu qu'il habite à quelques pas de ma maison. De ce que j'ai vu, je crois que j'aurais mieux fait d'appeler avant de débarquer chez lui à l'improviste.
Normalement, les maison à quartier créole (là où l'on vit) sont très sonores. Pas besoin d'être à l'intérieur pour entendre tout ce qui s'y passe. C'est assez commun quand on vit dans un studio 2 pièces, en vrai. Là-bas, la première chose qui a attiré mon attention c'est la musique qui jouait très fort à l'intérieur.
Pour avoir vécu ici depuis presque 6 mois maintenant car je suis là dépuis la préfac, je sais ce que signifie la musique à toute volume chez un étudiant. J'ai donc compris qu'à l'intérieur il se passait des choses qui ne sont pas dutout pour les enfants. Mais étant donné qu'il ne vit pas seul, j'ai quand même toqué à la porte en me disant que cela pourrait ne pas être lui l'instigateur de tout ça.
Après quelques minutes, j'ai senti qu'il y avait du mouvement à l'intérieur. Puis la voix de quelqu'un venir vers la porte d'entrée.
- J'arrive !
Chose qu'il fit. Il est venu m'ouvrir en ne portant qu'un short, les pectos à l'air. Il était surpris de me voir. De mon côté, je ne sais vraiment pas ce que j'ai ressenti en l'ayant en face de moi. Moi, je suis morte d'inquiétude. Alors que de son côté, monsieur vit sa best life avec je ne sais qui. C'est le comble.
- Non, je rêve ?
- Qu'y a-t-il ?
- Je ne t'ai pas vu en cours aujourd'hui, entamais je agacée. J'ai cru qu'il t'était arrivé quelques chose, je suis venue voir ce que tu avais. Je t'ai même appelé avant de venir, je t'ai pas trouvé, je lui dis en restant au pas de la porte.
Je l'ai senti mal à l'aise. Il se gratte la nuque en fixant le sol.
- Mouais. Je vois le genre. Tu peux retourner à tes occupations. Je ne faisais que passer de toute façon. Contente que tu vas bien, je lui fis savoir.
La fille à l'intérieur, alertée par ma voix je suppose a sorti sa tête par l'embrasure de la porte.
- C'est qui bébé ? Elle lui demande avec son air de princesse.
Je roule des yeux.
- Viens donc que je te présente ma puce, il lui propose.
Elle n'a pas tardé à se ramener. Elle ne vit pas dans le nord du pays de ce que Sanders a dit. Pourtant, c'est elle qui se presse pour venir demander qui c'est.
- Comme si elle allait reconnaître la personne. Tchiips ! Bougonnais-je. Elle veut montrer quoi à qui ? Que c'est son gars ? Qui le lui a demandé ? Elle n'est même pas belle, je me dis intérieurement.
- Isabelle, voici Mia ma future épouse. La femme qui fait tambouriner mon cœur avec son sourire angélique, il me la présente avant de se tourner vers sa copine. Bébé, elle, c'est Isabella, l'une de mes meilleures amies. La fille dont je t'ai parlée.
Ah ! Donc comme ça, elle lui parle de moi ! Interressant. Je ne sais pas pourquoi, mais cela me plaît bien qu'il lui ait parlé de moi. Je suppose que cela voudrait dire que j'ai de l'importance à ses yeux.
- Enchantée de faire ta connaissance Mia, je me présente à elle en lui tendant la main.
Elle me regarde de haut en bas avant de prendre la main que je lui ai tendue malgré elle.
- Moi de même, lâche enfin Mia en feignant être heureuse de faire ma connaissance.
Ne voulant pas déranger les tourtereaux, j'ai demandé à partir.
- J'y vais maintenant. On se voit demain en classe Ders. Je suis contente qu'il ne t'est rien arrivé de grave.
- Merci Isa. Tu es un cœur.
- Ouais. Aurevoir ! Bye Mia !
- Bye ! Elle dit en agitant sa main de petite fille toute frêle.
Le lendemain, j'ai appris par Sanders, que la Mia en question est sa copine depuis la NS2. Et que par conséquent, cela fait presque 3 ans maintenant qu'ils sont ensemble. Ça, il ne me l'avait pas dit quand on s'est connu. Elle ne doit pas être si importante que ça dans la mesure où il n'y a rien qu'une amitié entre Sanders et moi.
- Pourquoi me cacher sa relation avec sa copine ? Ce n'est pas comme s'il attendait autre chose de moi. Ou peut être que c'est moi qui ne suis pas assez importante à ses yeux. Pourquoi lui aurait il parlé de moi alors ?
Tout comme lui, mademoiselle est gonaïvienne. Il a été au CIC (Collège Immatriculée Conception) et elle chez les sœurs de Saint Joseph de Clunie (Saint Pierre Claver). Mademoiselle a terminé son année en même temps que lui. Juste qu'elle n'est encore admise à aucune université. Ce sera sûrement pour l'an prochain vu que mademoiselle a refusé les universités privées pour pouvoir être près de son homme l'an prochain. Pour ça on verra.
- Déjà, une chose que je peux dire, je ne l'aime pas.
Elle est beaucoup trop hautaine pour un mec aussi calme que l'est Sanders. Et ça, je n'ai pas manqué de le lui faire savoir le lendemain même.