01
****Nathalie MOUKOURY****
- Mme MOUKOURY dans mon bureau !
- (Alvine me toisant): Krkrkrkrkrkrkr
Je sais déjà pourquoi il m’appelle. Je me lève essayant de réguler les battements de mon cœur et prends une grande bouffée d’air frais avant de cogner à la porte du Directeur des Ressources Humaines, puis d’entrer
- (Il est debout et visiblement hors de lui) : C’est quoi l’excuse cette fois-ci ?! Vous avez vu l’heure ???
- Je suis vraiment navrée Monsieur AMBASSA. Il fallait que j’aille demander un moratoire pour la pension de mon fils au collège et….
- (D’un geste rageur): Gardez vos excuses pour vous ! Vous pensez être la seule ici à avoir une vie en dehors du bureau ?!
- (Calmement) : Non Monsieur…
- Quand ce n’est pas l’école de votre fils c’est qu’il est malade ou que vous-même êtes malade vous vous croyez où ?! Dans un cirque ?!
- (Tête baissée) : Non Monsieur….
- (Il se calme): Bien ! Que cela ne se reproduise plus ! Au prochain retard vous pouvez me croire vous prendrez la porte ! Personne n’est indispensable à l’autre ici ! Me suis-je bien fait comprendre ?
- Oui Monsieur….
- (Il se rassoit): Sinon vous parliez de moratoire ? Vous n’avez pas pu payer toute la pension de votre fils ?
- Non Monsieur….
- Sa pension s’élève à combien ?
- 196.000 Francs Monsieur
- Et vous avez déjà payé combien ?
- 80.000frs Monsieur
- Je vois. Ma proposition tient toujours, si ça vous dit je peux vous aider à payer sa pension et même ses fournitures
- ….
- (Il se lève de nouveau et se rapprochant de moi) : Je pourrais passer outre vos retards répétitifs et même vous faire une petite augmentation si vous êtes gentille avec moi…
- (Je recule devant son doigt qu’il posait sur ma joue) : Monsieur…
- 150.000frs de salaire c’est pas grand-chose pour une mère célibataire dont l’enfant est au collège. Il fait quelle classe déjà ?
- 1ère Monsieur. Monsieur svp… (J’essaie d’éviter sa main cette fois-ci qui me caresse le cou)
- Je peux m’arranger à ce qu’il ait une bourse d’études et qu’il aille fréquenter à l’étranger dans 2 ans.
Mon cœur bat la chamade. Il a réussi l’espace d’un instant à me faire réfléchir et écouter ce qu’il me dit
- (Il ose plus loin dans le creux de ma poitrine avec son bras) : Tout ce que vous aurez à faire c’est d’être ma maîtresse. Et je veux l’exclusivité. Dites-moi oui et je vais changer votre vie et celle de votre fils
- Vous êtes marié Monsieur…
- Et alors ?! Ca ne m’empêche pas de désirer plus que tout une aussi belle femme que vous. Mais je ne partage pas ! Si tu es à moi je ne veux plus entendre parler d’un autre homme !
TOC TOC
- (Il se réajuste) : C’est qui ?!
- C’est Alvine Monsieur. C’est pour le rapport que vous avez demandé
- (Il lui ouvre la porte sur elle pendant que je reprends contenance, heureuse de sortir d’ici) : Entrez !
Elle est entrée en me lançant un regard courroucé. Si seulement elle pouvait savoir que cet homme qui lui plaît tant est celui qui me harcèle et non l’inverse !
Je retourne à mon poste me demandant sans cesse comment je vais faire pour trouver l’argent et solder la pension de Kendrick. Il m’a rapporté un avis d’expulsion des cours hier et j’ai été des plus mal de n’avoir aucun recours possible.
Du haut de mes 35 ans et de mon statut de secrétaire que j’ai eu grâce à l’intervention plus que salvatrice de la défunte meilleure amie de ma défunte mère, j’arrive enfin à pouvoir mettre de la nourriture sur la table pour mon fils, à lui payer des soins hospitaliers à la hauteur de mes moyens et à mettre un toit sur sa tête sans plus me prostituer. Je l’ai eu relativement tôt, à 20 ans, fruit d’une belle erreur de jeunesse et de débutante car pour tout dire son géniteur était une passe d’un soir. Ni lui ni moi n’avions imaginé que le préservatif s’était percé. Ce n’est que 4 mois plus tard que ma mère et moi réalisions avec effroi que j’étais enceinte et malgré toutes mes tentatives pour l’expulser, il s’est fait coriace et n’est jamais parti…..
Maman a été plus sa mère que moi durant les 7 premières années de sa vie. Ensuite elle a succombé à la maladie me laissant seule à l’effroyable responsabilité de la maternité d’un enfant. Je devais penser à lui avant de penser à moi. Je devais m’assurer que lui mange même si moi je ne mangeais pas. La maison familiale a été vendue par mon oncle, seul frère à ma mère et il a fait la malle pour l’Europe avec les sous de la vente dans ses poches. Je me suis vite retrouvée à la rue, avec mon fils de 7 ans me regardant de ses yeux naïfs et me demandant sans cesse
- Taty Nath on fait quoi maintenant ?
Je n’ai pas eu bcp de temps pour pleurer. La 1ère année j’ai jonglé avec une amie de la vie nocturne mais très vite elle s’est sentie à l’étroit avec nous dans sa chambre, la queue dans les fesses j’ai fini par aller voir cette amie de maman là, Sita Popoh qui ne me cachait pas sa désapprobation ouverte pour mon style de vie. Elle avait déjà à sa charge ses 9 enfants qu’elle élevait dans sa maison de 2 chambres, avec son commerce de beignetariat qu’elle faisait depuis l’époque de mathusalem. La vie n’a vraiment pas été de tout repos chez elle, entre ses filles qui ne me cachaient pas leur hostilité et la misère criarde dans laquelle nous vivions. Elle m’a encouragé à faire fi de ses filles et leur attitude, et à sortir de ma vie de débauche. Très vite je l’ai secondé dans son commerce, tandis que ses filles couraient les rues sous son regard impuissant. Elle passait son temps à leur dire quand je ne serai plus là vous comprendrez ! Aujourd’hui elles ont compris je pense.
C’est ainsi qu’elle m’a présenté à une sœur en Christ à elle qui recherchait une secrétaire. Je ne connaissais absolument rien du métier. Je n’avais que le probatoire. J’ai essayé le baccalauréat 3 fois puis j’ai arrêté et j’ai commencé ma vie du dehors. Mme Clotilde était quelqu’un de patiente et de généreux. Les 3 années passées à son contact m’ont permis d’acquérir très vite les techniques classiques de cette fonction. Mon fils a eu le cep et c’est elle-même qui l’a inscrit au collège au même titre que ses enfants, payant tous les frais de sa scolarité, jusqu’aux tenues et fournitures.
Quand il est arrivé en classe de 5e, elle est partie rejoindre son mari au Canada, me laissant un fond de 1 000.000 frs pour mes menus besoins et ceux de Kendrick. Je suis partie de chez Sita Popoh non sans la remercier de sa générosité avec nous et j’ai pris une chambre que j’ai aussitôt équipée. La chance m’a sourie et j’ai trouvé un autre boulot dans le même domaine à peine 6 mois plus tard. Tout se passait très bien avec ma hiérarchie jusqu’à ce que mes réserves d’argent s’amenuisent au fur et à mesure que les besoins de Kendrick grandissaient. J’ai vite fait de réaliser qu’entre la pension qui a augmenté entre temps, le loyer qui a augmenté et le coût de la vie je dépensais bien plus que je ne gagnais.
J’ai quand même de la chance que mon fils ne soit pas quelqu’un d’envieux. Il a su très vite s’accommoder avec le peu que sa feue grand-mère ou moi avons toujours pu lui donner. Il ne pouvait pas assister comme les autres aux activités extrascolaires qu’ils faisaient au contraire les soirs il m’aidait à faire le jus de bissap et les caramels que je laissais le soin à ma voisine de vendre pour moi en journée. Aujourd’hui, j’ai un frigo en panne, un téléviseur en panne un ventilateur qui donne de l’air chaud plutôt que de l’air frais et je ne vois absolument rien que je ne puisse faire avant longtemps pour arranger l’un ou l’autre. Mon seul bien précieux en ce moment c’est mon fer à repasser à vapeur. S’il me lâche je suis foutue.
(Alvine me sort de ma rêverie) : Hey ! Le patron te disait quoi ?
- Rien qui ne te regarde
- Hum ! J’espère que tu te rappelles qu’il est marié !
- J’espère que toi aussi
- Que veux-tu dire ?
- Rien de particulier. Façon tu épies ses moindres faits, gestes et paroles là j’espère quand même que tu te souviens très bien que c’est le mari de quelqu’un !
- En tout cas ce n’est pas moi qui pars durer dans son bureau
- (Je me penche sur ma machine): C’est bien ce que je disais
- (Alvine haussant le ton) : Moukoury je ne suis pas de ta trempe tu comprends norrrr
- (Je lève les yeux au ciel) : Et c’est reparti pour un tour
- Méfie-toi de moi ! Je t’ai juste demandé de garder le peu de dignité qui te reste pour te respecter ! Tu penses que j’ignore qui tu es ?
Je fais le vide dans mon esprit et me concentre sur ma tâche matinale. J’ai appris à le faire depuis qu’Alvine est arrivée. Elle est venue me trouver à mon simple poste de secrétaire. Elle toute une assistante de direction bardée de diplômes a décidé de me prendre en grippe je ne sais pourquoi. Elle a fini de vomir son venin et de retourner à son poste. La journée s’est déroulée comme à l’accoutumée et à ma pause, j’ai pris mon bocal de riz sauce d’arachides et morue fumée que je suis allée manger dans la petite kitchenette de fortune aménagée pour nous. Les autres collègues ont envoyé le technicien de surface leur acheter des plats de poisson braisé, poulet et j’en passe. J’ai commencé mon repas seule dans la pièce mais on s’est très vite retrouvé à 6 parmi lesquels Alvine qui a tôt fait de me narguer
- Y’en a ici que même manger décemment ça les dépasse ! Juste draguer les patrons vraaaiiimmment Yeuch ! S’exclame Alvine
Personne n’a pipé mot. Alvine est une nièce à l’épouse du Directeur Général. Personne n’ose se la mettre à dos. Tous ceux qui essaient s’en voient sanctionnés d’une façon ou d’une autre. Moi-même je sais qu’elle cherche ma faille et que bien souvent elle est allée me saboter auprès de la hiérarchie. Mais j’essaie autant que faire se peut de l’éviter. Tout le monde ici sait qu’elle en pince pour le DRH. Il se dit même dans les bruits de couloir qu’ils ont une relation. Mais je mettrai ma main à couper que c’est une histoire qu’elle seule invente alors que le bougre ne la calcule même pas ! Enfin bref ! A chacun ses histoires. Pour le moment il faut que je trouve une solution à mes problèmes d’argent de plus en plus réguliers
***Kendrick MOUKOURY***
Ca fait déjà 2 jours que Sydney n’a pas pointé son nez au collège. Je n’ai pas de téléphone alors j’attends ardemment la pause de midi pour l’appeler d’un callbox en face du collège. J’espère que je ne dépasserai pas le cap d’1 minute. Sinon je vais me retrouver contraint de rentrer à pieds.
Je suis assis sur le balcon de ma salle de classe en train de penser à elle quand Arthur mon voisin de banc se pointe
- Tiens ! Me tends Arthur
- Je prends l’enveloppe) : C’est pourquoi ?
- (Il me pointe une fille à l’autre bout du balcon) : C’est Ornella de la 1ère A4 All qui m’a demandé de te la donner
- (Je suis plutôt surpris) : De me la donner à moi ??
- Oui ! A toi !
- (Je la range dans ma poche) : Ok…
- Tu ne l’ouvres pas ??
- Tout à l’heure !
C’est vrai que c’est vraiment curieux qu’une des filles les plus en vue du bahut m’envoie un mot à moi. Mais c’est bizarre quand même. Elle connaît bien Sydney ; elles marchent ensemble ! Je retourne en classe pour le cours très ennuyeux du professeur d’anglais. Si ce n’était pas pour sortir ma mère de la misère vraiment je ne me serais pas gêné de faire comme plusieurs ici et prendre la porte des étoiles à un certain moment de la journée. Mais étant donné que la physique me tape un peu et qu’elle n’a pas les moyens de me prendre un répétiteur, je suis contraint de ne pas négliger toutes les autres matières même si elles ne sont pas mes matières de base. A la pause de midi je me dépêche de sortir pour le callbox juste à côté et je lance l’appel le cœur battant. Malheureusement ça sonne dans le vide. J’insiste et ça coupe à la 2ème sonnerie. Une 3e, 4e, 5e fois aussi idem. Je ne comprends pas bien ce qui se passe. Mais je n’en démords pas et retourne au bahut et me réinstalle sur le balcon. Ici il y’a de l’air frais, ça me change de la chaleur de la maison. Il faut vraiment que je fasse une activité parallèle, je ne sais pas laquelle encore le bissap et les caramels de maman paie à peine mon taxi pour l’école le matin. Et je dois encore sortir d’ici et faire le petit marché avec les 2000frs qu’elle m’a laissé. Il ne reste presque plus d’huile et de condiment. Je vais quand même nous sauter un peu de plantain avec un maquereau. Ça nous changera du riz de tous les jours.
Quand ai-je su que ma tante était ma mère ? L’année de mes 10 ans, quand je faisais le CEPE. Il fallait apporter son acte de naissance à l’école pour la constitution du dossier et j’ai pris la peine de le parcourir. A la case Nom de la mère, ce n’était pas Sita Annette comme je le pensais toujours mais Nathalie MOUKOURY. J’ai intégré l’information sans trop me poser de questions et j’ai continué à l’appeler Taty Nath. Mais en grandissant je l’ai volontairement troqué pour Maman. Nous n’en avons jamais parlé mais nous savons tous les deux. C’est l’essentiel
- Bonjour Kendrick
Je me retourne et je vois Ornella
- Bonjour Ornella
- Je… tu vas bien ?
- Je vais très bien merci et toi-même ?
- Je vais bien. Je peux m’adosser tout près là ?
- (Je me recule d’emblée) : Bien sûr ! (Puis pensant à son enveloppe) Tu m’excuseras je n’ai pas encore eu le temps de lire ton message
- Ça tombe même bien. Tu peux le déchirer
- Sans le lire ?
- Sans le lire. Je préfère te le dire en face, c’est plus simple
- Je t’écoute donc
- Si ça ne te dérange pas on peut rentrer ensemble après les cours ? J’ai noté que ta classe et la mienne sorte toujours ensemble les jeudis
- (Je suis embêté) : Euhhh en fait c’est que j’avais pas prévu de rentrer avec quelqu’un tu vois ?
- Le chauffeur vient me chercher ; Il pourra te déposer
Rien qu’à l’idée d’imaginer que j’économiserai 500frs je jubile !
- C’est d’accord !
- Ok ; je te laisse mais stp fais-moi une fleur : déchire cette enveloppe.
- Ok je le ferai
Alors qu’elle s’en va, j’ose la question qui me taraude l’esprit depuis
- Dis-moi !
- (Elle se retournant sur moi) : Oui ?
- Tu connais Sydney je crois ?
- Oui oui
- Tu aurais des nouvelles d’elle ?
- Elle est souffrante. Tu veux que je lui passe un message ?
- Oh non ! Ça ira ! C’est juste que depuis quelques temps je ne la vois plus au bahut
- Je l’ai eu hier au téléphone et elle semblait souffrante. Tel que c’est parti c’est pas avant lundi qu’elle sera là
- Ah ok ! Si jamais tu la vois tu lui diras que je lui passe mes salutations
- Tu sembles plutôt bien la connaître
- Oh pas plus que ça ! Elle avait des soucis en maths à un moment et je l’ai aidé
- Ok ok. Bon ! A 15h alors
- A 15h !
Elle s’en est allée vers un groupe de filles qui l’attendaient et qui ont tout de suite eu l’air de lui demander de quoi nous avons parlé. Tandis que moi je cherchais encore à comprendre l’attitude de Sydney. Elle a décroché l’appel d’Ornella hier elle aurait tout aussi bien pu décrocher celui d’un call box ! Elle doit forcément se douter que c’était moi car elle sait que je n’ai pas de téléphone et en plus je me suis fait insistant. Notre relation nous l’avons toujours voulu discrète. C’est vrai que tout est parti de ses lacunes en mathématiques qu’elle était venue poser à un voisin de secteur à elle dans notre classe et comme lui-même ne s’en sortait pas avec cet exercice et que je suis réputée pour être très bon en mathématiques, il est venu me voir pour que je l’aide et tout est parti de là. Notre relation a évolué tout doucement jusqu’à son stade actuel. Elle comme moi nous sommes dépucelés ensemble et avons promis que jamais rien surtout pas la pauvreté ne nous séparera. Elle est celle qui vient chez nous, dans la modeste chambre que je partage avec ma mère et parfois, sans même que je ne le lui demande m’apporte à manger ou me dépanne. Elle a un an de plus que moi. Nous n’avons pas les mêmes problèmes.
A 15h je croise Ornella aux escaliers qui visiblement m’attendait déjà tout en triturant son téléphone.
- On y va ?
- (Tout de go) : Tu as ouvert l’enveloppe ?
- Tu m’as demandé de ne pas le faire
- Tu peux donc me la rendre ?
- (Je la sos de mon sac encore scellée) : Tiens
- Merci pour ça
Nous sommes sortis ensemble du bahut et nous sommes dirigés vers le véhicule qu’elle m’a montré du doigt. Une fois installés à l’arrière elle me demande
- On te dépose de quel côté ?
- Euuuhhh Même Ndokoti ça me va
- C’est là-bas que tu habites ?
- Non non je suis à ESG
- Alors on va te déposer à ESG
- Ça ne vous dérange pas tu es sûre ?
- Non. Moi je vais à Bonamoussadi. C’est un léger détour
- Si tu le dis….
De ma vie je compte le nombre de fois où je suis entré dans une voiture climatisée. A l’époque de l’ancienne patronne de maman son chauffeur venait tous nous prendre ses enfants et moi et il me déposait d’abord au bureau de maman où j’attendais qu’elle termine avec le boulot pour qu’on rentre. Cette voiture-là était climatisée. Mais depuis elle je n’ai jamais plus pris que des vieux tas de ferraille alambiqués.
- Voilà je voulais te demander si… si euuhhhh
Je la regarde curieux ne comprenant toujours pas ce qu’elle essaie de me dire
- En fait j’aimerais savoir si tu as une petite amie
Je regarde choqué le chauffeur devant nous genre mais miss on nous entend là !
- T’inquiète ! Youssef et moi avons un accord il ne parle pas de mes choses je ne parle pas des siennes. Hein Youssef ?!
- Oui petite Madame !
- (Elle me regardant) : Alors ?
- Ecoute Ornella j’apprécierais si tu veux qu’on discute que l’on se trouve dans un environnement plus…. (je regarde le chauffeur) plus discret !
- Ok ! Ça te dit qu’on se voit samedi donc ?
- (Je réfléchis à l’état actuel de mes finances) : Où ?
- Au glacier moderne de Bonamoussadi si ça te dit
- …..
- Ok en tout cas on a tout le temps d’en parler demain à la pause de midi si tu veux bien
- Je n’ai rien contre.
Le reste du trajet s’est fait en silence. Jusqu’à mon entrée à logbaba, en allant vers St Thomas. J’ai remercié le chauffeur et Ornella puis j’ai pris quelques vivres au petit marché de mon entrée avant de rentrer troquer ma tenue de classe contre mon short de maison et l’un de mes 3 teeshirts. 17h j’avais fini de préparer, de nettoyer la plaque à gaz la chambre et la devanture de la chambre. Je suis allé faire des réserves d’eau à la fontaine publique. A 18h j’en avais fini et je sortais de la douche quand Maman est rentrée
- Ca sent bon ici !
- Sers-toi ! Moi-même j’ai bien faim là où je suis là !
C’est en se parlant de tout et de rien que nous avons mangé. Soudain on entend un vacarme dans la cour de la mini cité
- C’est quelle maison ?! Parle-vite ! Une imbécile comme ça là !
- C’est ici… SNIF
- (Maman soupire) : Il y’a encore quel problème là-bas dehors ?
- (J’ai le regard rivé sur les images floues de la TV) : C’est pour eux là-bas ça ne me regarde pas
Je finissais à peine ma phrase que le boucan s’est fait sentir devant notre porte
- C’est ici ? PAF ! (bruit d’une gifle) CE N’EST PAS A TOI QUE J’AI POSE LA QUESTION ?!
- C’est ici Papa Snif ! C’est ici
TOC ! TOC TOC !!!! TOC TOC TOC !!!!
- Pardon ne cassez pas ma porte c’est quoi?!
- (Le Monsieur entre tout en vociférant) : C’est ici qu’il y’a un MOUKOURY Kendrick ?
Mon cœur est entré direct dans mon ventre la bouchée de plantain est calée dans ma bouche
- Doucement Monsieur ! Quel est le souci ?
- ANDELA passe ici ! Fais vite !
Et je la vois qui entre le visage baignée de larmes. Je me lève dépassé par ce que je vois
- C’est bien ici que tu as dit n’est-ce pas ?!
Elle hoche la tête se protégeant le visage
- TU VAS PARLER OUI ?! C’EST BIEN CETTE MAISON ET CE GARCON N’EST-CE PAS ????
- Oui Papa !
Je n’ai même pas eu le temps de réagir que le monsieur me foutait son poing dans la gueule. Il m’a ensuite attrapé par le col
- ESPECE DE PETIT CON ! C’EST LA VIE DE MA FILLE TU VEUX DETRUIRE ?! HEIN ?! C’EST SA VIE TU VEUX DETRUIRE ?!
- LACHEZ MON FILS ! LACHEZ-LE !
Les voisins ont tôt fait d’accourir. J’étais loin d’imaginer que le petit cube que nous occupions pouvait contenir autant de monde
- ET TOI ESPECE DE TRAINEE ! JE ME TUE A LA TACHE JE TE PAIE LES GRANDES ECOLES ET C’EST AVEC DES PETITS MORVEUX COMME CELUI-CI QUE TU VAS T’ENVOYER EN L’AIR ?! IL PEUT T’OFFRIR QUOI HEIN ?! REGARDE OU IL HABITE ! C’EST ICI QUE TU T’ES FAITE ENCEINTER ?! DANS CE TAUDIS ????
- (Sydney pleure de plus belle) : Je suis désolée papa !
- Je te préviens sale bâtard ma fille n’élèvera pas de bâtard tu m’entends ?! Elle n’avortera pas mais elle n’éduquera pas ce bâtard ! Elle accouche elle vient te le donner tu en fais ce que tu veux ! Ne pense même pas à fuir ! Sinon c’est au collège je vais aller t’afficher ! Sale Nigaud !
- (Maman est hors d’elle) : Foutez- le camp de mon taudis Monsieur Le Riche ! Dégagez d’ici tout de suite !
- On s’en va ! ANDELA passe devant ! Mais je vous promets vous n’avez pas fini d’entendre parler de moi !
Ils ont fini par partir et la chambre par se vider nous laissant ma mère et moi tétaniser par l’information. Nous avons gardé le silence un petit moment
- Tu l’as vraiment mise enceinte ?
- (Je suis encore sonné) : Je ne sais pas…
- Tu as eu des rapports avec elle ?
- Oui…
- (Sèchement) : Bien ! Tu vas être Papa je te félicite !
C’est ainsi que ma vie a changé du tout au tout. C’est ainsi que je suis devenu réellement adulte bien avant même d’y être préparé.